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Édition du lundi 8 décembre 2025
Élections

Pourquoi le coût des élections municipales sera en forte hausse en 2026

L'organisation des élections municipales de mars prochain devrait coûter environ 200 millions d'euros à l'État, ce qui est nettement plus qu'en 2020. Concernant les communes, il n'est toujours pas envisagé d'augmenter leur remboursement forfaitaire. 

Par Franck Lemarc

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Deux rapports parlementaires, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2026, se penchent sur la question du coût des élections : le Parlement, comme chaque année, doit en effet voter les crédits du programme 232 du PLF, intitulé Vie politique, qui varient fortement d’une année à l’autre en fonction des différentes échéances électorales. 

221 millions d’euros

Ce programme 232 regroupe à la fois le financement des partis politiques, le budget de fonctionnement de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et les crédits destinés à l’organisation des élections. D’une année sur l’autre, ce dernier poste varie énormément : entre 2025, année sans élections nationales, et 2026, où auront lieu les élections municipales et sénatoriales, les crédits de ce programme seront multipliés par dix, passant de 22 à 221 millions d’euros. 

Les élections sénatoriales ne représenteront qu’une faible part de ce budget : un peu moins de 4 millions d’euros leur seront consacrés. Par ailleurs, par amendement, un somme de 680 000 euros a été introduite, en commission, pour le financement des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie, qui doivent se tenir avant la fin du mois de juin 2026. 

Ce sont donc bien les élections municipales qui représenteront la plus grande partie des crédits du programme 232 : pour 2026, leur coût, pour l’État, est estimé à un peu plus de 193 millions d’euros.

Évolutions législatives

Ces crédits permettent de financer, d’une part, le remboursement des dépenses de campagne et des frais d’impression de la propagande officielle des candidats (uniquement s’ils ont obtenu plus de 5 % des suffrages), la mise sous pli et l’envoi aux électeurs des circulaires (professions de foi) et des bulletins de vote, et enfin les « frais d’assemblée électorale », c’est-à-dire la participation de l’État aux frais engagés par les communes pour l’organisation du scrutin. 

Selon les estimations du ministère de l’Intérieur, les élections municipales de 2026 devraient coûter 46 millions d’euros de plus que celles de 2020, qui avaient pourtant déjà été très coûteuses du fait des surcoûts liés à l’épidémie de covid-19. 

Ces coûts supplémentaires tiennent à plusieurs facteurs. D’abord, les très importantes augmentations des tarifs facturés par La Poste pour l’acheminement du matériel électoral (+ 22 millions d’euros). Ensuite, ce sont les évolutions législatives de cette année qui vont renchérir le coût des élections : à Paris, Lyon et Marseille, du fait de la loi du 11 août 2025, ce sont deux scrutins distincts qui devront être organisés le même jour (et même trois à Lyon, puisque les élus de la métropole sont élus le même jour) : l’un pour élire les conseils municipaux « centraux », l’autre pour élire les conseils d’arrondissement ou de secteur. Cette réforme devrait générer, pour l’État, un surcoût de 15 millions d’euros.

Il est plus difficile d’estimer le coût engendré par la loi du 21 mai 2025 qui a étendu le scrutin de liste paritaire aux communes de moins de 1 000 habitants. Selon les estimations du ministère de l’Intérieur, il devrait y avoir, en mars prochain, environ 59 000 listes déposées, regroupant environ un million de candidats. Toutefois, cette réforme n’engendrera sans doute pas de très importants surcoûts pour l’État, pour une raison simple : elle ne concerne que les communes de moins de 1 000 habitants et dans celles-ci – comme dans toutes les communes de moins de 9 000 habitants – aucun remboursement public des dépenses de campagne des candidats n’est prévu par la loi. 

Protection fonctionnelle

Enfin, un dernier élément va surenchérir le coût du scrutin : c’est l’entrée en vigueur de la loi du 21 mars 2024 « renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux » . Cette loi prévoit d’étendre la protection fonctionnelle aux candidats et le remboursement de leurs dépenses de sécurité, si besoin, pendant les six mois précédant le scrutin. Les modalités concrètes d’application de cette loi seront définies dans un décret en cours de rédaction, mais le ministère de l’Intérieur estime que cette réforme coûtera environ 7,6 millions d’euros à l’État pour les élections municipales de 2026. 

Les communes lésées

Il reste à savoir ce que ce scrutin coûtera aux communes elles-mêmes. Une chose est sûre : comme pour les précédents, ce coût ne sera que très partiellement compensé par l’État. Il n’est en effet pas question, semble-t-il, d’augmenter le montant des « frais d’assemblée électorale »  (FAE), c’est-à-dire le montant forfaitaire versé par l’État pour compenser les dépenses engagées par les communes : 44,73 euros par bureau de vote et 10 centimes par électeur inscrit. 

Pour mémoire, ce montant n’a pas été revalorisé depuis… 2006, et ne tient donc aucun compte de l’inflation de ces vingt dernières années. 

Tous les maires savent que cette subvention est très loin de rembourser les frais réellement engagés pour organiser le scrutin – notamment les dépenses de personnel, un dimanche. Ce qui est, en soi, un accroc au Code électoral, qui dispose à l’article L70 que « les dépenses résultant des assemblées électorales tenues dans les communes sont à la charge de l’État » . Ce sont donc bien 100 % des frais qui devraient être remboursés.

Pourtant, année après année, malgré les demandes insistantes de l’AMF et du Sénat, les gouvernements successifs refusent d’augmenter les FAE. Avec un argument qui relève d’une certaine dose de mauvaise foi : revaloriser les FAE supposerait « de documenter objectivement et de manière concertée entre l’État et les communes le niveau moyen de dépenses réalisées par ces dernières en matière d’organisation des élections », a répondu plusieurs fois le ministère de l’Intérieur à des questions de parlementaires. On ne voit pas bien ce qui empêche l’État de se livrer à une telle « documentation objective »  – d’autant que l’AMF se tient à sa disposition pour ce faire. 

Mais ce n’est apparemment pas à l’ordre du jour et, cette fois encore, les communes devront payer de leur poche une large partie de l’organisation du scrutin. En croisant les doigts pour qu’une nouvelle dissolution de l’Assemblée nationale n’intervienne pas, venant encore renchérir ces coûts importants.

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