Conférence nationale sur le financement des mobilités : les concertations vont enfin commencer
Par Lucile Bonnin
« Nous avons devant nous de nombreux défis en matière de financement des infrastructures et des équipements nouveaux. Pour se préparer à les relever, une conférence sur son financement durable sera organisée avec les collectivités locales et les professionnels. » C’est ce qu’avait annoncé le Premier ministre François Bayrou lors de sa déclaration de politique générale le 14 janvier dernier.
Quatre mois plus tard, les modalités de cette conférence nationale dédiée au financement des infrastructures de mobilité ont été davantage détaillées. Dans un communiqué de presse diffusé hier par le ministère chargé des Transports, le gouvernement dévoile le déroulé et le calendrier de cette conférence.
« Une plénière d’ouverture se réunira le 5 mai à Marseille, annonce le ministère. Elle sera l’occasion de présenter les enjeux de la conférence et de tracer les grandes perspectives qui guideront les travaux. » La conférence est baptisée Ambitions France Transports et réunira durant dix semaines, une cinquantaine de participants notamment des élus, des acteurs publics et privés, des experts, des fédérations professionnelles ou encore des collectifs d'usagers.
Contexte tendu et forts enjeux pour les communes
L’objectif ambitieux affiché par le gouvernement est de définir un nouveau modèle de financement des infrastructures de transports à horizon 2040.
Dans un contexte budgétaire plus que tendu, le coût exorbitant de l’entretien et de l’adaptation du réseau routier national pour les collectivités gestionnaires est devenu insoutenable et repenser le modèle économique de la route est devenu une urgence impérative. C’est notamment ce qui avait été soulevé lors des premières Assises de la route par les associations d’élus, notamment l’Association des maires de France et Départements de France (lire Maire info du 24 janvier).
L'AMF organise d'ailleurs mardi prochain une conférence de presse pour mettre en lumière le manque de financement dédié pour les infrastructures et les transports locaux. L’AMF demande au gouvernement de « garantir un accès équitable à des transports performants et à des infrastructures soutenables » et présentera mardi des mesures concrètes pour une gestion plus juste et partagée de ces équipements essentiels.
Les départements et communes gèrent en effet 98 % du réseau national d’un million de kilomètres (378 693 km par les départements, 704 211 km par le bloc communal). Pourtant, les élus dénoncent depuis plusieurs années un modèle économique injuste où l’État, les concessionnaires d’autoroute et les régions bénéficient en grande partie des recettes générées par la route, « laissant quelques miettes aux départements et au bloc communal », comme l’expliquait Maire info en janvier dernier.
Le ministère des Transports indique dans son communiqué que le nouveau modèle sur lequel doit déboucher ces travaux de plusieurs semaines devra « permettre de faire face aux investissements conséquents nécessaires ces prochaines années pour répondre aux besoins croissants de mobilités des Français, moderniser et régénérer les réseaux, accélérer la décarbonation du secteur le plus émetteur de CO2 dans notre pays. » Il est précisé que le « contexte budgétaire contraint » du pays ne pourra pas être mis de côté lors des discussions.
Dans une interview accordée à La Tribune, le ministre des Transports, Philippe Tabarot, a dévoilé certaines pistes déjà envisagées par le gouvernement notamment la présentation d’ « une loi de programmation pluriannuelle pour aller encore plus dans cette logique d'investissement sur un temps long ». L’idée n’est pas nouvelle puisque l’ex ministre délégué chargé des transports Clément Beaune avait aussi espéré pouvoir présenter une loi de programmation des infrastructures de transport en 2024, mais il n’avait pas réussi à convaincre Bercy.
Un autre enjeu de taille sera abordé, comme le confirme le ministère, à l’occasion de cette conférence. Les concessions autoroutières arrivent à échéance entre 2031 et 2036. Comme le souligne le ministère, c’est « une opportunité stratégique pour repenser le mode de gestion des autoroutes et envisager de nouvelles affectations de ressources. »
Plateforme de consultation et atelier thématiques
À quoi faut-il s’attendre dans les mois qui suivent ? Après la plénière d’ouverture qui aura lieu dans deux semaines, quatre ateliers thématiques se réuniront tout au long de la conférence (sur dix semaines), « animés par des groupes de travail rassemblant l’ensemble des acteurs du secteur des transports », dont les collectivités locales.
Un premier atelier portera sur le modèle économique des Autorités organisatrices de la mobilité (AOM) et des Services express régionaux métropolitains (SERM) où il sera abordé « l’équilibre financier actuel des AOM, les pistes de nouvelles recettes, le financement des mobilités en milieu rural et le développement des modes actifs » . Un autre atelier consacré au financement des routes « analysera les besoins de financement à court terme pour les réseaux non concédés, les investissements nécessaires à moyen terme, le bon niveau de tarification à l’issue des concessions, ainsi que les futurs modèles de gestion autoroutière. » Une troisième thématique va être fléchée sur les services ferroviaires afin de « préciser les besoins pour la régénération du réseau et la vision souhaitée des dessertes territoriales en TGV » . Enfin, le dernier atelier va permettre de traiter « des investissements nécessaires pour favoriser le transport de marchandises vers des modes décarbonés, de l’amélioration de la compétitivité du fret ferroviaire et fluvial, et des leviers pour accélérer l’électrification des poids lourds ».
En plus de ces ateliers, « trois journées ciblées sur les attentes de la société civile, les nouveaux financements et l’innovation, viendront éclairer et enrichir les travaux de la conférence » . Une réunion de convergence se tiendra début juillet pour « mettre en cohérence les conclusions des ateliers » avant la remise au Premier ministre d’un rapport « synthétisant les trajectoires associées aux différents scénarios dégagés par les 4 ateliers ».
D’ores et déjà, une plateforme de consultation est mise en ligne dans le but de « recueillir les contributions de l’ensemble de l’écosystème des transports désireux de participer aux débats. » Ces idées et contributions viendront « enrichir la réflexion des groupes de travail » dans les semaines à venir.
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