Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 27 octobre 2022
Santé publique

Déserts médicaux et crise hospitalière : les annonces d'Emmanuel Macron

Dans une interview hier soir sur France 2, Emmanuel Macron s'est exprimé - entre autres - à propos de la crise hospitalière qui frappe la France actuellement et du problème des déserts médicaux qui s'accentue. Plusieurs annonces ont été faites.

Par Lucile Bonnin

Pas assez de médecins à l’hôpital, pas assez de médecins en ville. Le président de la République, qui a pris la parole hier soir dans le cadre d’une interview télévisée diffusée sur France 2, a reconnu l’existence de deux crises qui affectent le système de santé français : celle de l’hôpital et celle des déserts médicaux. 

Emmanuel Macron a rappelé que le gouvernement « a apporté une réponse d’urgence avec le fameux Ségur »  où les salaires ont augmenté « entre 184 et 400 euros par mois » , que des investissements ont été réalisés dans les hôpitaux mais que malgré tout cela, « les conditions de travail au quotidien à l’hôpital n’ont pas assez changé ». 

Il a alors indiqué vouloir réformer « l’organisation de nos hôpitaux »  afin que les soignants « retrouvent le pouvoir à l’échelle du service. »  Des mesures vont être prises dans ce sens. 

Mieux payer les nuits 

Interrogé sur la situation inquiétante des urgences pédiatriques (lire Maire info du 24 octobre), Emmanuel Macron a soutenu « le paquet urgence »  qui, selon lui, a permis « de mieux tenir qu’on ne le pensait »  cet été dans les hôpitaux. Il a enfin annoncé qu’il était important de « mieux payer les nuits et les week-ends. » 

Pour rappel, Élisabeth Borne avait retenu 41 propositions du rapport final de la « mission flash »  pour désengorger les hôpitaux cet été et des mesures comme un « complément de rémunération »  pour le travail de nuit, avec « un doublement des majorations pour les personnels soignants »  et une hausse de 50 % pour les gardes avaient été mises en place. Reste à voir quelles mesures exactes seront conservées dans ce paquet et pour combien de temps. 

Le président a également insisté sur le besoin « de responsabiliser, accompagner et inciter nos médecins de ville à nous aider pour réguler, prendre les appels et éviter que tout le monde aille aux urgences.»  Il veut également « convaincre celles et ceux (les soignants) qui viennent de partir de revenir parce que les conditions [de travail] sont meilleures. » 

Avantage pour les médecins 

Pour répondre au déficit de médecins dans les territoires, le gouvernement va prendre une mesure « forte » . « On avait environ – il y a quelques années – 100 000 médecins généralistes, a constaté Emmanuel Macron. On en a perdu 6 000 ces dernières années. 25 % de nos généralistes ont plus de 60 ans. » 

Fort de ce constat, le président a annoncé que les médecins arrivant à la retraite allaient pouvoir continuer à travailler « sans payer de cotisations retraites nouvelles » . La mesure va permettre aux médecins d’accumuler retraite à taux plein et salaire sans payer de droits à la retraite supplémentaires. « On a besoin de les garder » , lance Emmanuel Macron. 

Déléguer les tâches

Décharger les médecins apparaît aussi comme une solution adéquate pour lutter contre les déserts médicaux. Le président a annoncé vouloir donner « plus de responsabilités à nos infirmiers et infirmières, à nos kinés, à nos pharmaciens, à nos paramédicaux, à nos psychologues, pour que beaucoup de tâches organisées par nos médecins puissent aller vers ces derniers. » 

On sait notamment que le gouvernement a créé il y a trois ans le métier d’assistant médical pour aider dans les cabinets médicaux. Actuellement on en compte presque 4 000 et l’objectif est d’en former 10 000 à l'horizon 2025. 

Mais ce transfert de tâches ne se fera pas en un éclair. Le gouvernement a annoncé début octobre que « dans les prochaines semaines, l’État et l’Assurance-maladie travailleront en collaboration avec les ordres pour accompagner et traduire en actes concrets ces évolutions ».

Ce type de solutions va surtout être développé via les chantiers lancés dans le cadre du Conseil national de la refondation sur la santé (lire Maire info du 25 octobre). « Chaque territoire va inventer ces solutions » , a indiqué Emmanuel Macron. 

Installation des médecins 

On le sait, malgré la fin du numerus clausus, le nombre de médecins diplômés ne va pas augmenter avant plusieurs années. Le manque de médecin dans certains territoires va donc apparaître comme un défi inévitable. Mais la régulation de l’installation des praticiens libéraux ne semble pas être au programme du gouvernement pour faire face à ces crises. 

Pourtant, certains élus et soignants plaident pour une régulation plus stricte des installations de médecins dans les territoires et notamment ceux carencés.

Mardi, pendant la séance de questions au gouvernement, le sénateur de l’Eure Hervé Maurey a expliqué que, selon lui, « les mesures incitatives prises depuis deux décennies ne suffisent plus »  et demande ce qu’il en est du conventionnement sélectif dans les zones surdenses promis par Emmanuel Macron durant sa campagne. Pour le moment cette piste semble abandonnée par le gouvernement. 

Une nouvelle piste est cependant à explorer du côté des stages des internes. Une proposition de loi a été déposée le 5 octobre dernier par la sénatrice de la Charente-Maritime Corinne Imbert pour ajouter une quatrième année professionnalisante à la formation en trois ans des médecins généralistes. Cette année sera consacrée à des stages longs en ambulatoire et tenant compte des besoins de santé des territoires.

Tous ces sujets seront évoqués lors du Congrès des maires avec une table-ronde dédiée à « l’accès aux soins : des solutions locales »  le mercredi 23 novembre matin, avec la présence attendue du ministre de la Santé et de la Prévention et celle de la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et de professions de santé.

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