Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 27 octobre 2022
Climat

Sécheresse : une situation de plus en plus préoccupante

L'automne n'a pas amené de modification notable à la situation qui prévalait à la fin de l'été en matière de sécheresse. Entre températures exceptionnellement élevées pour une fin octobre et manque de pluie, de nombreuses communes sont amenées à prendre des arrêtés de restriction d'eau.

Par Franck Lemarc

28 ° C prévus à Tarbes aujourd’hui, 27 octobre. À quelques jours de la Toussaint, on en oublierait que le mois de novembre, dans le calendrier républicain issu de la Révolution française, s’appelait « frimaire » , du fait « du froid tantôt sec tantôt humide qui se fait ressentir » 

Mais plus préoccupant encore est le déficit pluviométrique, qui atteint ou dépasse 50 % dans plusieurs départements. Calculé depuis le 1er janvier, le déficit est de 41,6 % à Toulouse, 49,3 % à Nice, 55,1 % à Marseille. 

Canicule et manque de pluie

L’été caniculaire a fait s’évaporer une bonne partie des plans d’eau, et le manque de pluie ne permet pas de les remplir, pas plus que les nappes phréatiques. Au 1er octobre, selon le BRGM, seulement quatre grandes nappes phréatiques étaient en hausse par rapport au niveau constaté deux mois auparavant, six étant stables et le reste (22 nappes) étant en baisse. Aucune nappe n’est en niveau « haut » , neuf sont « autour de la moyenne » , et toutes les autres en niveau « modérément bas », « bas »  ou « très bas ». 

La situation a semblé s’améliorer un peu fin septembre avec l’arrivée de pluies relativement importantes, mais elles n’ont pas duré. En octobre, malgré quelques épisodes pluvieux, le déficit reste important. « Ces pluies ont été largement insuffisantes pour compenser les déficits accumulés depuis le début de l’année, note le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières). Les niveaux des nappes à l’entrée de l’hiver 2022-2023 sont nettement inférieurs à ceux de l’année dernière avec de nombreuses nappes affichant des niveaux bas à très bas. » 

La situation est également fort inquiétante pour ce qui est des plans d’eau de surface : les lacs – notamment les lacs de barrage – sont dans plusieurs régions à des niveaux anormalement bas, parfois même les plus bas de leur histoire. C’est le cas par exemple du lac de Sainte-Croix (Alpes-de-Haute-Provence), mesuré hier à 6 m en dessous de son niveau normal, de celui de Saint-Cassiens (Var), 7 m plus bas que la normale, le pire étant constaté sur le lac de Serre-Ponçon (Hautes-Alpes), à 17 m en-dessous de son niveau habituel ! 

La situation de ces lacs oblige d’ailleurs EDF à fortement limiter l’activité des barrages hydroélectriques (75 % de réduction sur le barrage de Saint-Cassiens), ce qui tombe particulièrement mal dans cette période de pénurie de gaz. 

Sobriété

Résultat : il n’y a pas d’autre solution pour préserver le niveau des nappes que de « limiter les prélèvements en eau » . Autrement dit, si l’on parle beaucoup de sobriété énergétique ces temps-ci, il va falloir ne pas oublier la sobriété en matière d’eau. 

Alors que plusieurs maires ont pris des arrêtés limitant les prélèvements, ou encore se voient obligés de ponctionner l’eau des lacs pour alimenter le réseau d’eau potable, les sources étant taries (c’est le cas par exemple à Gerardmer, dans les Vosges), quelque 70 départements sont concernés par des restrictions d’eau décidées par les préfets. 

Le site Propluvia, proposé par le ministère de la Transition énergétique, centralise les arrêtés de restriction d’eau. On y constate qu’à peine une douzaine de départements sont exempts de tels arrêtés, ce qui est exceptionnel à cette période de l’année. Une autre douzaine de départements sont en « vigilance »  (premier niveau d’alerte, où il est demandé « aux particuliers et aux professionnels de faire des économies d’eau » . Les autres s’échelonnent entre l’alerte, l’alerte renforcée et la « crise ». 

Ces différents niveaux correspondent à des restrictions plus ou moins dures : en « alerte » , les prélèvements agricoles doivent diminuer de 50 %, et il est interdit à certaines heures d’arroser jardins et espaces verts ; en alerte « renforcée », qui touche par exemple aujourd’hui toute la Bretagne, les prélèvements agricoles baissent de 50 %, et les arrosages peuvent être totalement interdits. En « crise »  enfin, tous les prélèvements « non prioritaires » , c’est-à-dire n’étant pas liés à la santé, la sécurité civile, la salubrité ou l’eau potable) sont interdits. C’est actuellement le cas sur la totalité du départements de la Haute-Vienne, de la Lozère, du Gers et sur une bonne partie de la Vendée. 

Même si des perturbations pluvieuses sont prévues dans la première semaine de novembre, les experts estiment qu’il va falloir plusieurs semaines de pluie pour espérer rétablir quelque peu cette situation exceptionnellement sévère.

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