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Édition du vendredi 5 septembre 2025
Santé publique

Santé publique : un été marqué par une forte hausse des noyades

Du 1er juin au 13 août, 1 013 noyades ont été enregistrées par Santé publique France, dont 268 suivies de décès. Les conditions climatiques favorables à la baignade ont contribué à augmenter de 14 % le nombre de noyades par rapport à l'été 2024. Maire info fait le point sur ce bilan avec un épidémiologiste de Santé publique France.

Par Lucile Bonnin

Avec deux vagues de canicule enregistrées cet été, en juin et en août, les Français ont cherché à se rafraîchir. La baignade reste sans aucun doute l’option privilégiée lors d’une période estivale très chaude et notamment pendant les vacances. 

La température est un facteur à prendre en compte lorsque l’on regarde les derniers chiffres publiés par Santé publique France concernant la surveillance des noyades entre le 1er juin et le 13 août 2025. « En 2025, le nombre total de noyades est en augmentation par rapport à 2024 pour la même période : respectivement 1 013 contre 886, soit une augmentation de 14 % », est-il détaillé dans le bulletin. 

Si le nombre de noyades suivies de décès (268 cet été) reste globalement stable entre 2024 et 2025, ce chiffre reste évidemment trop élevé sachant que « les noyades accidentelles sont quasiment toutes évitables », comme le souligne Aymeric Ung, épidémiologiste à Santé publique France, en charge de la surveillance des noyades.

Chaleur et prises de risques 

« Le principal facteur qui explique la fluctuation du nombre de noyades ce sont les conditions climatiques qui ont été favorables à la baignade, explique Aymeric Ung. Météo France a sorti un premier bilan montrant que l’été 2025 est le troisième été le plus chaud, derrière 2003 et 2022. Quand on a des périodes de chaleur étendues, les personnes vont davantage chercher à se rafraîchir et ce dans des conditions qui peuvent être plus à risques comme dans des endroits interdits aux baignades ou non aménagés. » 

« Les noyades qui ont eu lieu en cours d’eau ou plans d’eau ont augmenté surtout chez les jeunes, rapporte-t-il. Ce sont des lieux sont peu aménagés pour la baignade et lorsqu’un accident survient, les secours mettent plus de temps à arriver. Ce sont des endroits plus reculés et malheureusement l’issue va être davantage fatale dans ces endroits naturels. Le nombre de noyades en mer suivies de décès a aussi augmenté de 40 % et concerne principalement les adultes. » 

Les adultes, les adolescents, les enfants ou les personnes âgées ont été touchés de la même manière par ces accidents. « Les personnes âgées (65 ans et plus) vont par exemple chercher à se baigner davantage en début et en fin de journée, moment où il n’y a pas de surveillance des plages », commente Aymeric Ung. D’un autre côté, 37 enfants et adolescents sont décédés cet été contre 28 en 2024. Plusieurs noyades ont aussi impliqué des enfants atteint de handicap dont trois enfants autistes à l’occasion d’une sortie organisée par des structures d'accueil. Le gouvernement a, en réaction, annoncé de nouvelles mesures pour mieux former les professionnels et renforcer l’apprentissage de la natation. 

Il est intéressant de relever qu’entre mi-juin et début juillet (période de vigilance canicule), les noyades ont augmenté de 142 % par rapport à la même période l’année dernière – moment où « la surveillance des sites en milieu naturel n’a pas systématiquement commencé. »  Si l’agence ne connaît pas le contexte des noyades recensées, elle menait avant 2023 des enquêtes noyades tous les trois ans. « Elles montraient qu’il y avait davantage de noyades suivies de décès dans des endroits non surveillés et dans les endroits interdits », se souvient l’épidémiologiste. D’où l’importance de trouver une solution à la pénurie de maitre nageurs sauveteurs observée depuis plusieurs années et largement dénoncée par l’AMF.

Des disparités territoriales 

Quasiment toutes les régions sont concernées par la hausse des noyades même si des différences territoriales interviennent. « Il y a davantage de noyades dans toutes les régions où il y a une façade maritime (PACA, Occitanie, façade Atlantique, Bretagne, Normandie). Dans les régions intérieures il y a des spécificités. En Auvergne-Rhône-Alpes par exemple, on trouve beaucoup de cours d’eau et de plans d’eau et les conditions météo sont aussi très favorables à la baignade. D’ailleurs, la proportion de noyades suivies de décès peut parfois même être plus importante que dans d’autres régions. » 

En ce qui concerne les outre-mer, les résultats sont « très hétérogènes car il y a des endroits où les conditions climatiques sont favorables une grande partie de l’année comme aux Antilles mais d’autres endroits où la saisonnalité pèse dans la balance comme à la Réunion. On sait que les conditions de baignade et les habitudes sont différentes qu’en métropole. Les plages sont nombreuses et globalement très peu sont surveillées et réellement aménagées. Les risques peuvent être plus importants. » 

Prévention et plan piscine

Ces drames interviennent malgré les nombreuses campagnes de prévention et les interdictions de baignade régulièrement rappelées par les autorités. Dans la perspective de renforcer à l’avenir la sécurité, Santé publique France publie des conseils de prévention. 

« Pour les jeunes enfants, rien ne remplace une surveillance permanente et rapprochée de l’enfant quel que soit le lieu de la baignade, rappelle Aymeric Ung. Chez les adolescents et l’adulte deux choses sont à prendre en compte : il faut évaluer sa condition physique et évaluer les conditions environnementales tout en privilégiant les endroits aménagés pour la baignade et en respectant les interdictions. Il y a pu avoir cet été par exemple des interdictions sur la côte Atlantique pour des conditions non favorables. On peut aussi prendre attache avec les offices de tourisme. »  Il est aussi rappelé d’éviter toute consommation d’alcool avant de se baigner. « Les enquêtes noyades ont démontré qu’en cas de consommation d’alcool la proportion de noyades suivie de décès est plus importante », ajoute le spécialiste. 

Autre clé pour lutter contre ce fléau : l’apprentissage de la natation. « Il n’y a pas d’âge pour apprendre à nager ou réapprendre à nager », précise Aymeric Ung. Mais pour apprendre à nager, encore faut-il qu’il puisse y avoir des piscines accessibles à tous. C’est dans ce cadre que l’AMF alerte sur les besoins spécifiques des piscines municipales qui, à la fois, permettent d’assurer l’enseignement de l’aisance aquatique et de la natation dans une optique de santé publique et de prévention des noyades, et sont des lieux de rafraichissement sécurisés et surveillés. Or les piscines sont des équipements financièrement très lourds à porter pour les collectivités et particulièrement marqués par le vieillissement du parc. L’AMF dit attendre un soutien clair et ambitieux de l’État envers les collectivités qui portent ces équipements, afin de les rénover et d’en construire de nouveaux notamment dans les zones sous-dotées.

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