Maire-info
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Édition du mercredi 24 mai 2023
Logement

La proposition de loi encadrant les meublés touristiques retirée de l'agenda parlementaire

Initialement prévu en juin afin de faire face à la crise du logement, l'examen de la proposition de loi à l'Assemblée a été reporté sine die, la majorité la jugeant « pas aboutie ». Une décision fustigée par la gauche alors que ce texte prévoit d'étendre les pouvoirs des collectivités en zones tendues.

Par A.W.

La proposition de loi visant à « remédier aux déséquilibres du marché locatif en zone tendue »  en régulant les locations touristiques a été reportée sine die, à l’occasion de la conférence des présidents de l’Assemblée nationale qui s’est tenue hier et qui rassemble les principaux chefs de file du Palais-Bourbon. Ce qui a provoqué la colère de l’opposition de gauche.

Alors qu’il devait être examiné le 31 mai en commission des Affaires économiques puis la semaine du 12 juin dans l’hémicycle, ce texte – co-signé par les députés Renaissance, Horizons et le socialiste Iñaki Echaniz – a donc été retiré de l’agenda parlementaire par la majorité présidentielle qui l’a jugé « pas abouti ».

« Reculade »  et « lobbying des plateformes » 

Lors d’un point presse, le député MoDem de la majorité Bruno Millienne (Yvelines) a ainsi assuré ne « pas être contre la proposition de loi », mais expliqué qu’« il y a un travail de plus grande envergure à mener, notamment sur la fiscalité ». « Si on la vote, ça veut dire que demain ou dans moins d'un an, on en fait une sur le même sujet pour essayer d'élargir les choses », a-t-il souligné, jugeant que cela « créer[ait] de l'insatisfaction et des frustrations ».

Dans la foulée, le député des Pyrénées-Atlantiques Iñaki Echaniz a fait part de sa « colère froide »  devant cette « reculade »  et appelé « solennellement le gouvernement et Olivier Klein [le ministre du Logement] à inscrire les dispositions de la PPL dans le PLF [projet de loi de finances] 2023 et d’agir plus largement sur le logement. Par respect pour les élus locaux et les asso[ciations] qui se mobilisent et tirent la sonnette d’alarme depuis bien trop longtemps »  contre la spéculation immobilière, a-t-il réagi sur Twitter

Le député écologiste de Paris Julien Bayou, à l’initiative au début du mois de propositions transpartisanes (avec Iñaki Echaniz, mais aussi le député Horizons de la Charente-Maritime, Christophe Plassard, et le sénateur LR des Pyrénées-Atlantiques Max Brisson) afin d’encadrer les activités des plateformes touristiques, a, quant à lui accusé, également sur Twitter, la majorité de céder à « la pression d'Airbnb »  avec ce « renoncement de plus ». L’argument du « lobbying des plateformes »  a également été repris par Max Brisson. 

« On n'a même pas de date »  future pour l'examen de cette proposition de loi, a dénoncé l’élu socialiste, qui devait porter la proposition de loi avec la députée Renaissance Annaïg Le Meur (Finistère).

Prenant « acte »  de la décision, cette dernière a fait savoir qu’elle fera « tout son possible »  pour que le texte soit examiné au mois d'octobre, lors de la prochaine semaine dédiée à des textes transpartisans. 

Soutien d’une cinquantaine de maires

Cette décision tombe alors qu’une cinquantaine de maires de l’ensemble du territoire et « de tous horizons politiques »  avaient fait part, dans une tribune publiée ce week-end dans le Journal du dimanche, de leur « soutien »  à l'initiative transpartisane des quatre parlementaires afin d’encadrer les locations touristiques de courte durée.

« À travers le pays, tant dans certaines grandes villes que dans les régions touristiques, ces plateformes multiplient les offres de locations à court terme. Puisque la location saisonnière est beaucoup plus lucrative que la location de longue durée, les logements disponibles sont de plus en plus systématiquement loués aux touristes de passage, aux dépens de la population locale », observent ces élus. 

« L’offre immobilière se tarit chaque jour un peu plus, les loyers augmentent, éloignant toujours plus loin la majeure partie de la population de son lieu de travail, participant de sa dépendance à la voiture avec les coûts afférents, dégradant ses conditions de vie et aggravant sa précarité », affirment-ils, constatant « amèrement »  que « nos territoires les plus touristiques se vident de leurs habitantes et habitants et certaines destinations ressemblent aujourd’hui à des villes ou des villages fantômes ».

Extension des pouvoirs des communes

Pour rappel, la proposition de loi dont l’examen vient d’être reporté prévoit trois mesures. La première conditionnerait la mise en location d’un meublé de tourisme à la réalisation préalable d’un diagnostic de performance énergétique (DPE) sur le modèle des locations de longue durée, sauf dérogation accordée par le conseil municipal si des « circonstances locales particulières »  le justifient. Dans ce cadre, le maire pourrait « mettre en demeure un bailleur de lui transmettre un diagnostic de performance énergétique attestant de la performance du meublé, et sanctionner les manquements d’une amende administrative ». 

Autre mesure concernant les collectivités, le texte prévoit de doter les élus des petites communes touristiques de « compétences élargies »  pour réglementer l’implantation des locaux à usage touristique. En zone tendue, le régime du changement d’usage d’un local serait ainsi élargi pour concerner « l’ensemble des zones tendues, c’est-à-dire situées dans une commune classée A bis, A ou B1 au titre du classement ABC ». Une prérogative qui ne concerne actuellement que les communes de plus de 200 000 habitants ainsi que celle des trois départements de la petite couronne francilienne. En outre, « la faculté d’encadrer dans le plan local d’urbanisme les destinations des nouvelles opérations de construction situées dans les zones urbaines (U) et à urbaniser (AU) sera renforcée », indiquent les auteurs de la proposition de loi. 

Enfin, l’avantage fiscal octroyé aux logements de tourisme classés serait supprimé en le resserrant sur « ceux qui sont situés dans une commune de montagne ou en zone détendue, afin notamment de contribuer à mieux protéger les gîtes ruraux ».

Consulter la proposition de loi.

 

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