Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 6 mai 2020
Déconfinement

Plages : pourquoi le maintien de leur fermeture après le 11 mai divise

Le fait que le gouvernement ait décidé de rouvrir partiellement les parcs et jardins le 11 mai mais de poursuivre l'interdiction d'accès aux plages suscite, aujourd'hui encore, de vifs débats. Plusieurs élus et parlementaires demandent à l'exécutif un changement de pied.
À moins de deux mois du début de la saison estivale, les vacances d’été sont toujours aussi incertaines. Entre deux déclarations sur les modalités de la reprise de l’école le 11 mai, Emmanuel Macron a assuré, hier encore à Poissy (Yvelines), qu’il était « trop tôt pour dire si l'on pourra avoir des vacances. » « On le saura début juin ». Moment choisi par l’exécutif pour annoncer ou non la reprise de leur activité à des professionnels du tourisme déjà durement touchés par la crise (lire Maire info du 27 avril). 

« On est en train de restreindre une population qui vit en bord de mer » 
Impatients néanmoins, certains parlementaires et élus locaux pressent le gouvernement de procéder, au plus vite, à la réouverture des plages. C’est ainsi que Christophe Sueur, maire de Saint-Pierre-d’Oléron (Charente-Maritime), a écrit, le 4 mai, au président de la République pour lui annoncer qu’il rouvrirait, contre vents et marées, les plages de sa commune le 11 mai. Et ce malgré « l’illégalité des arrêtés municipaux »  en la matière, rappelée par la préfecture de Charente-Maritime. « On est en train de restreindre une population qui vit en bordure de mer, par inquiétude d'une population qui n'est pas là et qui risque de venir », s’insurge-t-il. 
Michel Vaspart, sénateur Les Républicains des Côtes-d’Armor, serait sans doute l’un de ses soutiens. Dans une missive adressée hier à Christophe Castaner, il demande au ministre de l’Intérieur « d’adresser une instruction aux préfets afin d’autoriser la réouverture des plages dès le 11 mai en lien avec les maires des communes concernées, dès lors que les conditions permettant d’assurer le respect des gestes barrières et de la distanciation sociale sont réunies localement et que l’état sanitaire de la population ainsi que l’état de circulation du virus le permettent ». Ce qui serait probablement le cas aujourd’hui : à en croire la carte tricolore du déconfinement présentée chaque soir par le ministère des Solidarités et de la Santé, les départements littoraux sont effectivement classés en vert (hormis le Nord et le Pas-de-Calais en orange).
Le président du groupe d’études « Mer et littoral »  du Sénat milite, par ailleurs, pour qu’une plus grande latitude soit accordée au « couple maire-préfet ». Selon lui, maintenir les plages fermées jusqu’au 2 juin partout et dans tous les cas de figure ne lui « paraît pas conforme aux principes de différenciation et d’adaptation territoriales mis en avant pour réussir le déconfinement ».

Des élus divisés
Pour proposer davantage « d’espaces de respiration »  dès la première phase du déconfinement (11 mai - 2 juin), le Sénat a adopté, hier, un amendement pour imposer au gouvernement la prise rapide d'un décret visant à rouvrir les plages au public « pour la pratique d’une activité sportive individuelle ». Dans son objet, leurs auteurs, Annick Billon (Vendée, Union centriste), Anne-Catherine Loisier (Côte-d’Or, Union centriste) et Loïc Hervé (Haute-Savoie, Union centriste), s’étonnent de la décision du gouvernement de « rendre les plages inaccessibles au public au moins jusqu’au 1er juin, alors même que les parcs et jardins, si essentiels à l’équilibre de vie en ville, pourraient être ouverts ». « Une telle limitation du droit d'aller et venir n'est-elle pas disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi ? », s’interrogeait, hier au Sénat, Philippe Bas (Manche, Les Républicains). « Il faut en finir avec cet interdit de principe. En quoi les plages seraient-elles plus dangereuses que les transports en commun ou les grandes surfaces ? », a questionné Marc Le Fur (Côtes-d’Armor, Les Républicains) à l’Assemblée nationale.
Malgré l’enjeu économique pour les professionnels du tourisme - le littoral représente la première destination touristique en France et concentre 40 %  des lits touristiques - la réouverture immédiate des plages ne trouve pas grâce aux yeux de tous les élus. « Dans ma région, les plages sont petites, et la position allongée y est plus fréquente... Les 4,5 millions de Provençaux vont s'y agglutiner, comme à Nice ou à Mougins, et remettre en route le virus. Déjà, hier, l'avenue Masséna était bondée. Imaginez qu'une personne ait été porteuse du virus : trois, quatre cents personnes peuvent l'être aujourd'hui, en grossissant à peine le trait », s’inquiétait Alain Milon, sénateur Les Républicains du Vaucluse. Max Brisson, son homologue dans les Pyrénées-Atlantiques, le rejoint : « La côte basque, c'est 25 kilomètres. Les maires concernés ne veulent pas d'une réouverture, qui créerait un appel d'air. Eux qui ont vu les images de Saint-Sébastien ce week-end - la plage de la Concha noire de monde - ne croient pas au respect de la règle des cent kilomètres et des distanciations sociales. » 
« Ne commettons pas l'erreur de laisser de nouveaux foyers se développer, a acquiescé le ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran. Lorsque nous aurons la conviction que le virus est au tapis, qu'il ne reste plus qu'à l'achever, alors, oui, nous rouvrirons les plages et plus largement nos frontières pour faire découvrir les beautés de notre pays. » 

Ludovic Galtier

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