Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 5 octobre 2022
Crise énergétique

Coût de l'énergie pour les collectivités : des réponses du gouvernement bien insuffisantes

La question de la facture énergétique qui explose pour les collectivités territoriales a été abordée hier, lors de la séance de questions au gouvernement. La réponse du ministre Christophe Béchu montre que le gouvernement n'entend pas étendre le bouclier tarifaire à toutes les collectivités, comme le demandent les associations d'élus. 

Par Franck Lemarc

Les mois se suivent et se ressemblent : les associations d’élus, AMF en tête, alertent de façon continue le gouvernement depuis l’automne dernier sur la nécessité d’aider les collectivités à faire face à l’explosion des tarifs de l’énergie. Et le gouvernement répond par des décisions qui sont très loin d’être à la hauteur du problème. 

Vendredi dernier encore (lire Maire info du 3 octobre), toutes les associations du bloc communal ainsi que l’Union nationale des CCAS signaient un courrier commun à la Première ministre pour l’alerter sur le fait que cette fois, « c’est la question du bouclage même des budgets 2023 qui est aujourd’hui posée ». Et ce n’est pas une vue de l’esprit : sur les réseaux sociaux, par exemple, nombreux sont les maires qui expliquent ne pas savoir, à cette heure, comment ils vont réussir à boucler un budget à l’équilibre eu égard à l’augmentation exponentielle de leurs dépenses d’énergie. 

La principale revendication « d’urgence »  des associations est la mise en place d’un bouclier tarifaire « plafonnant le prix d’achat de l’électricité des collectivités ». Et, en deuxième lieu, de redonner à toutes les collectivités qui le souhaitent la possibilité de revenir aux tarifs réglementés. 

Sur l’une de ces demandes comme sur l’autre, Christophe Béchu est resté muet. 

Communes « étranglées » 

C’est la députée Horizons de la Seine-Maritime Marie-Agnès Poussier-Winsback qui a interpellé le gouvernement dans l’Hémicycle, hier après-midi. Sans contester « la bonne santé financière »  des collectivités, la députée a alerté la Première ministre sur « la situation des villes moyennes », qui « supportent des charges de centralité très importantes et exercent pour cette raison sur leurs contribuables une pression fiscale déjà conséquente ». Ces communes, a poursuivi l’ancienne maire de Fécamp, « vont se retrouver face à un mur d’ici la fin de l’année » , « étranglées par des charges imprévisibles, étranglées par des factures d’énergie bien supérieures à ce qu’on pouvait prévoir lors des préparations budgétaires, étranglées par l’augmentation importante des coûts de l’alimentation lorsqu’elles disposent de restaurants scolaires, étranglées par une augmentation du point d’indice de leurs agents que nous avons décidée cet été ». 

La députée a par ailleurs pointé la situation guère plus enviable des communes rurales, contraintes « d’ajourner des projets d’investissement », ce qui « inquiète terriblement les entreprises du bâtiment et des travaux publics ». Marie-Agnès Poussier-Winsback, qui appartient à la majorité, a affirmé que de nombreux maires « ne savent pas comment construire leur prochain budget »  et a demandé au gouvernement ce qu’il entend faire pour les « aider ». 

Des réponses insuffisantes

Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, a répondu en évoquant les chiffres de la Cour des comptes : « La situation [financière] des collectivités territoriales s’est améliorée au cours du dernier quinquennat ». Il a toutefois reconnu que « la poussée de l’inflation et la progression des prix de l’énergie »  changeait la donne. 

Le ministre a listé les mesures prises par le gouvernement depuis un an, notamment le relèvement du niveau de l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Il a par ailleurs évoqué une « suppression de la TICFE »  qui aurait permis aux collectivités d’économiser « 400 millions d’euros ». On ne voit pas clairement à quoi fait allusion le ministre, la TICFE n’ayant jamais été « supprimée »  mais simplement minorée de façon à plafonner la hausse du prix de l’électricité à 4 %. 

Christophe Béchu a rappelé que le projet de loi de finances rectificatives pour 2022 avait accordé au bloc communal un soutien de 430 millions d’euros pour faire face à l’augmentation des prix (lire Maire info du 1er septembre). Il a annoncé au passage que le décret d’application de ce dispositif serait présenté aujourd’hui, mercredi 5 octobre, devant le Comité des finances locales. 

L’ancien maire d’Angers s’est félicité de ce que le gouvernement ait, « pour la première fois depuis 13 ans », décidé d’augmenter la DGF pour 2023 – mais il faut rappeler que cette majoration sera très loin de couvrir l’inflation, et ne répond pas à la demande de l’AMF d’indexation de la dotation globale de fonctionnement sur la hausse des prix. 

Enfin, le ministre a rappelé que le « bouclier tarifaire »  s’applique à « 28 000 communes »  – chiffre qui est mis en doute par les associations d’élus, la FNCCR et la Banque postale. 

Et les villes moyennes évoquées par la députée de la Seine-Maritime, précisément, ne bénéficient pas de ces tarifs réglementés. Pour elles, comme pour les grandes villes, Christophe Béchu a indiqué que des actions à plus ou moins long terme étaient envisagées par le gouvernement. En particulier, « obtenir une réforme du marché de l’électricité européen pour éviter d’avoir à payer une rente à cause du couplage gaz et électricité ». Ce qui serait certainement bénéfique, mais mettra, au mieux, des mois. 

Le ministre a enfin évoqué le « filet de sécurité »  qui devrait être mis en place dans le cadre de la future loi de finances pour 2023 – dont les conditions, là encore, ne satisfont pas les associations d’élus.

En n’en parlant pas, Christophe Béchu a donc rejeté la demande des associations de voir le bouclier tarifaire étendu à toutes les communes et de bénéficier d’un plafonnement des prix d’achat. 

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