Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 12 décembre 2025
Budget de l'état

Budget 2026 : comme promis, les sénateurs exonèrent les communes du Dilico

La Chambre haute a aussi renoncé à la très critiquée fusion des dotations d'investissement. Elle a, par ailleurs, débloqué des financements pour les Conseils d'architecture et les radios associatives menacés de disparition. Pour les petites communes, une aide a été votée afin que la réforme de la protection sociale complémentaire leur soit plus soutenable.

Par A.W.

Comme ils s’y étaient engagés, les sénateurs ont largement revu à la baisse l’effort demandé aux collectivités à l’occasion des débats sur la mission qui leur est consacrée, et qui se sont déroulés mercredi dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2026.

Des discussions durant lesquelles, ils ont également voté – presque à contrecœur - la « prime régalienne »  de 500 euros attribuée aux maires, dans le but de compenser le temps qu’ils passent à agir en tant qu’agents de l’État. La semaine passée, ils étaient aussi déjà revenus sur la réduction des allocations compensatrices relevant des locaux industriels et sur le resserrement du FCTVA. 

Mais, rappelons-le, pour que toutes ces mesures voient le jour, il faudra encore que les parlementaires donnent leur approbation globale au projet de budget. Un assentiment qui reste, pour l’heure, toujours aussi incertain.

Le Dilico revu et divisé par deux

Le président du Sénat, Gérard Larcher, l’avait annoncé lors du dernier congrès des maires : la Chambre haute allait sérieusement revoir l’effort réclamé aux collectivités afin de redresser les comptes publics. L’un de ses objectifs était même d’exonérer les communes de Dilico en 2026 et de « diviser par trois »  leur effort total. 

Chose promise, chose due. Les sénateurs ont donc « profondément modifié »  la mise en œuvre pour l’an prochain de ce dispositif d’épargne forcée créé en 2025. Contre l’avis du gouvernement, ils ont d’abord réduit de plus de la moitié cette contribution des collectivités en la faisant passer de 2 milliards à 890 millions d’euros.

Surtout, ils ont décidé d’en exonérer « entièrement »  les communes et de diminuer de moitié celle des intercommunalités, « compte tenu des efforts importants qui leur sont demandés par ailleurs ». De la même manière, les départements verraient le prélèvement qui leur est imposé divisé par deux, soit « 140 millions d’euros ». Un montant jugé « acceptable »  au regard de « la mobilisation du fonds de sauvegarde à hauteur de 600 millions d’euros ». Sur ce point, le palais du Luxembourg a d’ailleurs rétabli les conditions d'éligibilité de 2024 afin qu’« une soixantaine »  de départements y soit éligibles, et non pas simplement « une trentaine ».

Ensuite, les sénateurs ont choisi de balayer les nouvelles modalités de reversement – très critiquées par les élus locaux – de cette version 2026 du Dilico, en revenant à celles de la version 2025. Ils ont notamment rejeté « le passage à un reversement en cinq ans sans certitude d’un retour aux contributeurs »  pour le remplacer par « un reversement sur trois ans avec la certitude qu’il bénéficiera aux collectivités qui ont contribué les années précédentes ».

DETR et Dsil : la fusion abandonnée… à court terme

Autre modification très attendue, l’abandon de la fusion des dotations d’investissements dans un nouveau fonds d'investissement pour les territoires (FIT). 

La Haute Assemblée a ainsi rétabli la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (Dsil) et la dotation politique de la ville (DPV), alors que le gouvernement souhaitait initialement les fondre dans une même enveloppe. À noter que l’exécutif ne s’y est pas opposé et s'en est remis à « la sagesse »  du Sénat.

Les sénateurs à l’origine de l’amendement n’ont pas, pour autant, totalement balayé cette idée. Selon Isabelle Briquet (PS) et Stéphane Sautarel (apparenté LR), cette fusion « peut être envisagée à moyen terme », mais « compte tenu de l’importance des dotations d’investissement, notamment pour les collectivités les plus rurales, elle nécessite un important travail en amont pour en définir les modalités et la gouvernance ainsi que pour rassurer quant à son impact ». 

En l’état, le FIT comporte, à leurs yeux, « bien trop d’incertitudes »  avec « un risque de saupoudrage des crédits et la fin du financement de projets structurants ». Les deux sénateurs craignent ainsi « de nombreux effets redistributifs, qui pourraient pénaliser les collectivités rurales, qui bénéficient aujourd’hui d’une dotation dédiée avec la DETR ». Sans compter que les quelques communes bénéficiaires de la DPV risqueraient même d’être totalement « dépouillées », comme l’avait souligné le coprésident de la commission finances de l’AMF, Antoine Homé, mais aussi le ministre de la Ville, Vincent Jeanbrun, lors du congrès des maires.

Une aide d’urgence pour sauver les CAUE

Les sénateurs se sont aussi attaqués à la question particulièrement urgente des conséquences de la réforme de la taxe d'aménagement. Une réforme « mal préparée et mal exécutée », dont les importantes défaillances dans la collecte de l’impôt mettent en péril les 92 Conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) du pays et fragilisent les finances des collectivités. 

Une partie de ces organismes qui conseillent gratuitement les collectivités est ainsi en grande difficulté, certains ayant même déjà disparu. Et pour cause, la taxe d’aménagement finance à hauteur de 80 % – via une portion de la part départementale – ces structures d’ingénierie territoriale. Or celle-ci a connu un « effondrement »  spectaculaire de sa collecte avec une chute de « 75 % »  de son produit par rapport à 2023, selon une évaluation, fin août, de la Fédération nationale des CAUE. Quant à sa part départementale, elle aurait diminué de 40 % en moyenne pour la seule année 2024, selon Départements de France.

Pour y remédier, le palais du Luxembourg a donc approuvé la mise en place d’un « fonds exceptionnel »  doté de 270 millions d’euros (comme les députés) pour « compenser »  les pertes de recettes subies par les départements et afin de « leur permettre de maintenir le soutien aux CAUE ». Tout cela contre l’avis du gouvernement et de la commission. 

Afin d’éviter un autre « cataclysme »  en vue, le Sénat a aussi rétabli hier, au niveau de 2025, les crédits destinés aux quelque 800 radios associatives du pays. La baisse de la moitié de ces aides était prévue initialement dans le projet de budget. Les sénateurs ont ainsi adopté un amendement qui augmente de 15,7 millions d'euros les crédits alloués au Fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), ceux-ci représentant « entre 40 et 50 % »  de leurs ressources. En jeu, le risque de voir disparaître « plus de la moitié d'entre elles »  et le maintien de « près de 80 % des emplois du secteur, soit environ 2 400 postes directs et indirects ».

Protection sociale : un soutien aux petites communes

Afin d’aider à financer la part obligatoire de protection sociale complémentaire (PSC) des petites communes, les sénateurs ont aussi validé la création d’un « fonds de compensation »  à destination de celles de moins de 2 000 habitants bénéficiant de la fraction de la dotation de solidarité rurale (DSR). Une mesure, là aussi, pas au goût du gouvernement ni de la commission qui ont tenté en vain de s’y opposer.

Dans le cadre de la réforme de la PSC, « l’État demande aux employeurs territoriaux […] de remplir une obligation sociale nouvelle et structurante, indispensable pour garantir à tous les agents un accès équitable aux complémentaires santé et prévoyance », ont ainsi rappelé les sénateurs centristes à l’origine des deux amendements adoptés. 

Si cette révision est bien considérée comme « une avancée sociale importante au bénéfice des agents actifs et retraités »  de la fonction publique territoriale, celle-ci n’est supportée « que par les collectivités ». Or « cela représente un coût de 15 euros par mois et par agent pour la couverture santé et 7 euros par mois et par agent pour la couverture prévoyance », selon les sénateurs.

« Il apparaît donc cohérent, au moment où le Parlement s’apprête à adopter de manière définitive la proposition de loi PSC des agents publics territoriaux [elle a été adoptée entretemps, lire article ci-dessus], que le législateur mette en place un outil financier ciblé pour accompagner celles des collectivités pour lesquelles cette obligation représente un effort significatif », ont-ils défendu. 

Après l'avoir complètement récrit, le Sénat doit voter le 15 décembre, en première lecture, sur l’ensemble de ce projet de budget de l’État. Ensuite, celui-ci repartira à l'Assemblée où il pourra être remodifié.
 

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