Maire-info
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Édition du jeudi 20 octobre 2022
Budget de l'état

Budget 2023 : après « le 49.3 », les mesures à retenir pour les collectivités

Une centaine d'amendements ont été sélectionnés par l'exécutif à la suite de l'adoption de la première partie du projet de budget sans vote. Parmi eux, on peut retenir la création d'un « filet de sécurité » énergétique et l'extension du nombre de communes autorisées à majorer la TH des résidences secondaires.

Par Aurélien Wälti

Sans surprise, Elisabeth Borne a mis un terme, hier après-midi, aux débats à l'Assemblée nationale en activant l'article 49.3 de la Constitution afin de permettre l'adoption sans vote de la première partie (recettes) du projet de loi de finances (PLF) pour 2023.

Que reste-t-il in fine de la semaine et demie passée à discuter de ce texte dans l’Hémicycle ? Une centaine d’amendements, essentiellement de la majorité et dont plus de la moitié n’ont pas été discutés en séance, la Première ministre ayant sifflé la fin des débats juste avant l’examen de l’article 5 du projet de budget, celui-là même qui vise à réduire la CVAE dès l’an prochain avant sa suppression définitive en 2024. 

CVAE : l’année 2023 intégrée au calcul de la compensation

Le gouvernement a donc finalement décidé, après s’y être opposé en commission, d’intégrer le millésime 2023 de la CVAE dans le calcul de la compensation qui sera accordée aux collectivités.

« Compte tenu du dynamisme attendu des recettes de CVAE pour cet exercice », explique l’exécutif dans son amendement, celui-ci a donc décidé d’élargir la période de référence à l'année 2023, ce qui sera plus favorable aux collectivités. Le montant de la compensation sera donc bien déterminé sur la base d’une moyenne quadriennale des recettes engrangées par les communes, intercommunalités et départements en 2020, 2021, 2022 et 2023, et non sur les trois premières années comme initialement envisagé.

En outre, cette mesure permettra de « différencier la répartition de la dynamique de la TVA en fonction des échelons de collectivités locales ». L’affectation de celle-ci au futur « fonds national d’attractivité économique des territoires »  ne concernera ainsi que le bloc local, l’objectif étant de « maintenir l’incitation pour les communes et groupements de communes à attirer de nouvelles activités économiques sur leur territoire ». Un dispositif qui avait été jugé « flou »  en commission par les oppositions, alors que les modalités de répartition de ce fonds seront « fixées par décret ». 

Il est également précisé dans l’amendement que « la compensation versée devra prendre en considération les évolutions de périmètres liées notamment aux fusions de communes pour la création de communes-nouvelles ».

« Filet de sécurité »  énergétique

Devant le mécontentement et les inquiétudes grandissantes des collectivités sur la question de la flambée des prix de l’énergie, le gouvernement a confirmé la mise en place d’un nouveau « filet de sécurité »  pour les communes et des EPCI, mais aussi les départements, pour l’année 2023, en retenant un amendement des députés Horizons.

Qualifié de « bouclier tarifaire sur l’énergie »  lors des débats en commission et reprenant le modèle du filet de sécurité mis en place cette année, ce dispositif se limitera cette fois aux « dépenses d’approvisionnement en énergie, électricité et chauffage urbain ».

Cette aide sera, en outre, réservée aux seules collectivités les plus durement touchées. Elle bénéficiera ainsi à celles qui auront subi en 2023 « une perte d’épargne brute supérieure ou égale à 25 % et dont la hausse des dépenses d’énergie sera supérieure à 60 % de la progression des recettes réelles de fonctionnement ». Le montant de la dotation correspondra à « 50 % de la différence entre la progression des dépenses d’énergie et 60 % de la hausse des recettes réelles de fonctionnement ».

En cas de « tension temporaire sur la trésorerie (sachant que les comptes seront par ailleurs équilibrés par cette dotation prévisionnelle inscrite au budget) »  au cours de l’année 2023, les collectivités pourront solliciter « des avances sur 12e de fiscalité dans l'attente du versement de la dotation », précisent les députés.

Jugé « complètement au-dessous des besoins actuels », par le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, ce « faux filet »  se résume à une « version réemballée du dispositif voté l’été dernier »  dont le CFL a rejeté le décret d’application au début du mois. « La logique demeure la même : un soutien limité à un nombre restreint de collectivités, dont on ne connaitra la liste qu’à la fin de l’année prochaine, et qui ne couvre qu’une petite partie des charges supportées », a regretté le maire d'Issoudun, dans un communiqué publié ce matin, dans lequel il estime que,  face aux difficultés et au « mur d’argent qui se dresse devant les collectivités », le gouvernement ne prévoit « rien, ou si peu »  pour répondre à leurs « besoins urgents ».

Résidences secondaires : davantage de communes pourront majorer la taxe d'habitation 

Afin de lutter contre la crise du logement qui s’étend à un certain nombre de territoires, le gouvernement a décidé d’étendre le nombre des communes autorisées à majorer leur taxe d’habitation (TH) sur les résidences secondaires. 

Cette mesure avait été rapidement évoquée, en commission, par le rapporteur du budget qui avait reconnu qu’il est désormais « impossible de nier les tensions qu’elles engendrent sur le marché local du logement ». Via un amendement rédigé par les députés Renaissance, l’exécutif a donc élargi le périmètre des « zones tendues »  aux communes qui, sans appartenir à une zone d’agglomération continue de plus de 50 000 habitants (comme c’est le cas jusqu’à présent), sont confrontées à « une attrition »  des logements disponibles pour l’habitation principale. Cela « en appréciant la tension immobilière à partir des prix élevés à l’achat et à la location, ainsi que de la proportion élevée de résidences secondaires par rapport à l’ensemble du parc de logements ». 

Conséquence : dans ces communes, « dont la liste sera établie par décret », expliquent les députés, les logements vacants seront imposés directement « au bout d’un an de vacance volontaire », tandis que « les exécutifs locaux pourront choisir d’y renforcer le niveau d’imposition locale en majorant la taxe d’habitation sur les résidences secondaires ». 

Le délai de délibération est, par ailleurs, prolongé « du 1er octobre 2022 au 28 février 2023 »  afin de permettre aux communes concernées « d’en tirer dès 2023, les conséquences ». « Cela concernera potentiellement 5 000 communes, principalement sur les façades atlantique et méditerranéenne, en Corse et dans les zones de montagne, contre 1 140 actuellement », avait révélé Jean-René Cazeneuve, lors des débats en commission. 

Dans cette même logique, le gouvernement a décidé d’augmenter d’un tiers les taux de la taxe sur les logements vacants, afin de les porter à 17 % la première année d’imposition, et à 34 % à partir de la deuxième. L’objectif est ainsi d’ « adresser un « signal prix »  aux propriétaires qui n’occupent pas ces logements ou ne les mettent pas en location », explique le député du Gers dans son amendement.

On peut également retenir, parmi la centaine d’amendements choisis, le décalage de deux ans des échéances du calendrier de révision des valeurs locatives des locaux d’habitation (RVLLH). 

DGF : 320 millions d’euros supplémentaires 

Comme annoncé, le gouvernement abondera de 320 millions d'euros la dotation globale de fonctionnement (DGF). Une revalorisation qui « permettra à une très grande majorité de communes de voir leur DGF augmenter en 2023 », assure le gouvernement dans son amendement.

Il concrétise notamment l’annonce d’Elisabeth Borne, en clôture de la 32e convention de l'association Intercommunalités de France, de « renforcer le soutien aux communes rurales »  via une enveloppe de 110 millions d’euros fléchée exclusivement sur la dotation de solidarité rurale (DSR). 

A noter que cet amendement « sera complété par un amendement en seconde partie qui suspendra l’écrêtement sur la dotation forfaitaire des communes et précisera les règles de répartition ».

Redevance des concessions hydroélectriques : le montant plafonné 

Dans un autre amendement porté par le gouvernement, celui-ci ampute une nouvelle fois les recettes des collectivités au profit de l’Etat via, cette fois, la redevance des concessions hydroélectriques (il y en a 340  en France) qu’elles perçoivent. 

Compte tenu de « la situation exceptionnelle du marché »  et d’un montant redevance qui devrait être « anormalement élevé », l’exécutif prévoit de fixer un seuil (qui sera déterminé, par arrêté, en fonction d’un prix moyen annuel cible de l’électricité) au-delà duquel « la totalité des montants de la redevance est reversée à l’État »  et non plus en partie aux collectivités. 

« Malgré l’instauration de ce prix cible, les collectivités territoriales percevront des montants supérieurs à ceux qu’elles auraient perçus si les prix de l’électricité étaient demeurés voisins des prix historiques », tente de rassurer l’exécutif. 

Pour mémoire, les concessions hydroélectriques sont soumises, depuis 2019, à une redevance spécifique proportionnelle à leurs bénéfices (dont le taux est fixé à 40 %), celle-ci étant versée pour moitié à l’Etat, pour un tiers aux départements, pour un douzième aux communes et pour un autre douzième aux groupements de communes. 

 

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