Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 23 novembre 2020
Aménagement du territoire

Agence des territoires : un an après sa création, les sénateurs restent sur leur faim

Le 1er janvier prochain, l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) soufflera sa première bougie. Elle suscite encore bon nombre d'attentes et d'interrogations sur les bancs du Sénat, comme l'a démontré un débat organisé, la semaine dernière, en présence du secrétaire d'Etat à la Ruralité, Joël Giraud.

Si le temps du bilan apparaît encore « prématuré », juge Jean-Claude Requier, sénateur du Lot du groupe RDSE, il serait bon, d’après lui, de garder en tête les ambitions de l’agence présidée par la maire de Beauvais (Oise), Caroline Cayeux. Selon lui, l’ANCT « doit reposer sur la subsidiarité (…) permettre de rompre avec la verticalité et le cloisonnement des services administratifs (et de) sortir (comme l’avait annoncé Jacqueline Gourault en novembre 2019, ndlr) de la logique des appels à projets, auxquels ne peuvent répondre que les collectivités, toujours les mêmes, disposant de services techniques et de moyens financiers », identifie le sénateur. 

800 volontariats territoriaux en administration
Pour combler, en outre, la « carence de l’ingénierie territoriale », ambition première de l’ANCT selon les mots de Jean-Claude Requier, Joël Giraud, secrétaire d’Etat chargé de la Ruralité, compte sur le déploiement d’un nouveau dispositif : le volontariat territorial en administration (VTA). Bâti sur le modèle du volontariat territorial en entreprise (VTE), « il permettra à 800 jeunes, à terme, de fournir un apport précieux d'ingénierie aux collectivités, dans un partenariat gagnant-gagnant au service des territoires et de la jeunesse », explique-t-il. « Les projets alimentaires territoriaux (PAT) en sont un autre exemple : ils bénéficient de 80 millions d'euros, dont 5 millions d'euros dédiés à l'ingénierie ».
A ce sujet, le doublement des crédits à l'ingénierie a été acté « pour aider toutes les collectivités à monter leurs projets, notamment à travers les crédits de la relance », a assuré Joël Giraud. « Plusieurs chapitres du plan de relance concernent l'ANCT, qui assurera la gestion des fonds de subvention d'investissements mis en place par l'État pour la rénovation des bâtiments, des réseaux d'eau potable et d'assainissement, soit 180 millions dont 60 millions d'euros sur les deux premières années. » 

20 millions d’euros de crédits d’ingénierie
Malgré les intentions du gouvernement, les sénateurs sont en attente de concret. « L’Agence est encore une coquille plutôt vide ; il est encore difficile de mobiliser les ressources d'ingénierie des administrations centrales et des opérateurs nationaux en complément des préfectures et services déconcentrés », observe Stéphane Sautarel, sénateur Les Républicains du Cantal. Guylène Pantel, sénatrice RDSE de la Lozère, reste sur sa faim. « Nous voyons les premiers effets de l'ingénierie locale, mais cela ne suffit pas à compenser le retrait des services de l'État », regrette-t-elle. Marie-Claude Varaillas, sénatrice communiste de la Dordogne, elle, est désabusée. « L'ANCT peine à convaincre : elle renforce les pouvoirs des préfets, et n'a été sollicitée que pour 81 projets locaux hors programmes nationaux, dont 70 opérations de restructuration commerciales déjà en cours. Seuls 20 millions d'euros sont affectés aux nouveaux projets d'ingénierie, une somme dérisoire. Les opérateurs de l'État en matière écologique vont perdre 800 postes, ce qui pénalisera l'Agence ». 

Nécessité du « sur-mesure » 
« Pour 2021, l'ANCT dispose de 20 millions d'euros de crédits d'ingénierie, a bien confirmé le secrétaire d’Etat, mais elle fait aussi office de mécano pour rassembler tous les acteurs autour des projets. L'ANCT est aussi un pourvoyeur de bonnes pratiques. Sa doctrine d'intervention repose sur trois principes : la complémentarité, avec l'intervention des acteurs locaux, notamment les départements ; la déconcentration, avec le préfet comme premier interlocuteur ; la simplification, avec les conventions entre l'ANCT et les grands opérateurs de l'État ».
Pour rappel, l’ANCT « agit à travers plusieurs programmes : Action coeur de ville, avec 222 villes accompagnées à hauteur de 1,4 milliard d'euros depuis deux ans, à terme de 5 milliards d'euros, Petites villes de demain, avec 170 communes sélectionnées dans trois régions, Territoires d'industrie ». La nécessité du « sur-mesure »  était au cœur d’un rapport présenté en septembre par les sénateurs Charles Guéné (Haute-Marne, Les Républicains) et Josiane Costes (Cantal, Mouvement radical). « C'est essentiel pour éviter le saupoudrage, abonde dans leur sens Eric Gold, sénateur RDSE de l'Allier. Le pouvoir réglementaire doit définir des circuits efficaces de décision, comme l'a recommandé le Conseil d'État. L'Agence doit également être dotée de ressources suffisantes. Les critères de sélection des projets et le rôle des différentes instances mériteraient également d'être précisés. » 

Ludovic Galtier

Accéder au compte-rendu intégral du débat.

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