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Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 27 septembre 2021
Ruralité

Agenda rural : Jean Castex fait le bilan deux ans après son lancement

En déplacement dans l'Yonne vendredi, le Premier ministre, Jean Castex, a réservé aux maires ruraux, réunis en congrès tout le week-end, la primeur des conclusions du troisième Comité interministériel aux ruralités (CIR).

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© Premier ministre

C’était il y a deux ans à Eppe-Sauvage (Nord), le grand débat national (janvier-avril 2019) accouchait de l’Agenda rural : 181 mesures visant à « faire des territoires ruraux les fers de lance de la transition écologique, renforcer leur attractivité, améliorer la vie quotidienne des habitants et appuyer les élus locaux dans leur action ». Le renforcement de certaines d’entre elles, relatives aux services publics, la santé, la sécurité et le commerce, a été annoncé par le Premier ministre, Jean Castex, vendredi à Villevallier (Yonne), où se déroulait tout le week-end le 50e congrès de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). 

Le chef du gouvernement a décidé de faire coïncider l’ouverture du congrès de l’association d’élus, présidée par Michel Fournier, maire des Voivres (Vosges), avec le troisième Comité interministériel aux ruralités qui se tenait non loin de là à Épineau-les-Voves (Yonne). L’occasion d’apprendre que l’exécutif a finalement consacré 8,4 milliards d’euros du Plan de relance (100 milliards d’euros sur deux ans) aux territoires ruraux notamment via les CRTE. Au départ, 5 milliards d'euros avaient été fléchés dans leur direction.

« La crise sanitaire nous a conduit collectivement à ouvrir nos yeux sur un certain nombre de choses qui étaient peut-être sans doute évidentes, mais que parfois on se refusait à voir », a reconnu le Premier ministre. « Les collectivités locales françaises, toutes confondues, ont été impactées [par cette crise à hauteur de] 4 milliards d’euros […] Alors, certes, on n'a pas effacé la totalité des pertes. C'est exact. Mais je vous le dis vraiment, l'État n’a pas laissé tomber les collectivités territoriales alors que la crise a été d'une ampleur, y compris sur le plan financier, particulièrement forte ». 

30 nouveaux bus France services

Puis, après avoir vanté l’action de l’État en faveur du service universel postal, l’ancien maire de Prades (Pyrénées-Orientales) a longuement évoqué les services publics de proximité. Le Premier ministre a annoncé la « labellisation de 30 nouveaux »  bus France services. 80 véhicules similaires à celui que le Premier ministre a visité à Bassou (Yonne) sillonnent déjà les campagnes pour aider les habitants dans leurs démarches administratives. 

Ce dispositif itinérant a son pendant physique : les espaces France services. Ce nouveau modèle de services publics de proximité, géré par deux agents d’accueil, doit permettre d’accompagner les citoyens dans leurs démarches administratives au quotidien à moins de 30 minutes de leur domicile. Aujourd’hui 1 494 France services sont « en place », a assuré le Premier ministre. L’objectif de 2 000 espaces France services en 2022 est donc en passe d’être tenu. À retenir : une journée des secrétaires de mairie sera organisée dans les France services en novembre 2021.

2022 devrait, à en croire Jean Castex, être également l’année de la hausse des effectifs de l’État à l’échelon départemental (préfectures, sous-préfectures et directions interministérielles) après dix années d’émiettement (- 30 % entre 2010 et 2020). « On arrête cette hémorragie », a déclaré Jean Castex, afin de tenir la promesse d’efficacité des services publics territoriaux de proximité. Cette augmentation d’effectifs sera indolore puisqu’elle a été décidée « au détriment des administrations régionales de l'État et surtout des administrations centrales ». Les effectifs de l’État resteront donc « stables ».

Le salariat de médecins pour lutter contre la désertification médicale

Avec la raréfaction des services publics, la désertification médicale est un autre des défis auxquels font face les élus des territoires ruraux. D'autant plus lorsque, paramètre nouveau, 80 % des communes rurales sont en croissance démographique. Dominique Dhumeaux, maire de Fercé-sur-Sarthe (Sarthe) et premier vice-président de l’AMRF, a relayé ces inquiétudes dans une interview accordée à Ouest-France la semaine dernière. Dans une déclaration commune, l'AMRF s'alarme, aux côtés de sept organisations professionnelles de santé, que « 10% de la population française n'a plus de médecin traitant ». L'Yonne ne fait pas exception. Le département « ne compte que 68 médecins pour 100 000 habitants contre 91 pour l'ensemble du territoire national », s’est désolé le Premier ministre, qui compte sur « la suppression du numerus clausus et le développement des maisons de santé »  (1 889 ont été créées) pour « inverser partout cette tendance ». 

« Cette année, plus de 1 %, 1 800 jeunes vont entrer en formation. Alors évidemment, comme ça je ne vais pas vous raconter d'histoire, il faut finir de les former, a-t-il assuré. Dans l'intervalle, on utilise toutes les ressources, y compris le salariat de médecin. Il va falloir expliquer aux universitaires, aux doyens, qu’aller exercer la médecine dans le monde rural, ce n'est pas déchoir ».

La santé est aussi l’un des axes majeurs des plans de relance et de réindustrialisation de la France. « Ça fait 30 ans que l’on perd des emplois dans l'industrie, 30 ans. Le plan de relance nous permet de relocaliser des industries, à commencer par les industries de santé où là aussi, vous l'avez vu, grand temps de déshérence a abouti à ce que la France ne soit pas dans la course au vaccin. » 

1 209 « Petites villes de demain »  labellisées 

À l'heure où 210 Volontariats territoriaux en administration (VTA) ont été recrutés par les collectivités, le développement de l’attractivité économique n’est pas en reste dans les intentions du Premier ministre. Le programme « Petites villes de demain »  représente « 3 milliards d'euros programmés d'ici 2026 pour soutenir plus de 1600 communes ». 1209 communes ont déjà été labélisées, parmi lesquelles un peu plus de la moitié ont moins de 3500 habitants.

« Derrière ça, il y a les habitants, j'en ai parlé. Il y a les petits commerçants, il y a les artisans. Ce matin, on a été à cette opération sur les cafés qui est formidable. Et ici dans l’Yonne, ça marche bien », poursuivait le Premier ministre en référence à l’opération « 1000 cafés »  qui sera élargie aux cafés ruraux fragilisés, a indiqué Matignon.

« Nous accompagnerons 100 nouveaux cafés avec le Groupe SOS », a précisé Jean Castex. « Plutôt que de se battre à rouvrir uniquement de nouveau cafés, essayons d'empêcher la fermeture du dernier », explique encore Matignon.

10 millions d’euros pour les centres mutualisés de supervision de télésurveillance

Le Premier ministre a insisté, en outre, sur les questions de sécurité, thématique on ne peut plus d’actualité en cette rentrée. Conquis par les résultats de l’expérimentation de centres mutualisés de supervision de télésurveillance visant à mutualiser un service de lecture directe de toutes les caméras partout dans le département de l’Oise « moyennant une modeste cotisation », le Premier ministre a invité « tous les présidents de département, toutes les associations des maires à se réunir pour essayer de déployer, s'ils le souhaitent, ces nouveaux outils. » 

Un « abondement budgétaire de 10 millions d'euros sur deux ans du fonds interministériel de prévention de la délinquance »  pour « soutenir la création de centres mutualisés de supervision de télésurveillance au niveau, par exemple, du département, et au bénéfice des territoires ruraux »  est prévu, a indiqué Matignon.

Pour finir, le Premier ministre a eu un mot dans son discours sur un point de crispation de nombreux élus : l’artificialisation des sols. Pour tenter de les rassurer, le chef du gouvernement a précisé que « la loi Climat et résilience ne dit pas zéro artificialisation. Elle dit ‘’réduire de moitié le rythme de l'artificialisation en 10 ans’’. On va, à partir d'une vision régionale et des réalités territoriales, répartir cet effort selon les territoires. On ne va pas appliquer cette règle de façon absolue et partout. Un décret est en cours de préparation, discuté avec les associations d'élus ». Notons enfin, s'agissant encore de l'environnement, que 20 millions d'euros seront alloués à la dotation biodiversité en 2022 « afin de renforcer la prise en compte pour les communes des aménités rurales. Ce doublement des moyens sera accompagné d’un élargissement de la dotation aux communes des parcs naturels régionaux. » 

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