Édition du jeudi 29 septembre 2022

Communes nouvelles
Les communes nouvelles à la recherche d'un nouveau souffle
La rencontre nationale des communes nouvelles organisée hier au Sénat, par sa délégation aux collectivités territoriales et l'AMF, a rassemblé près de 300 participants - en présentiel et en visioconférence. Parmi les priorités affichées : éviter de perdre une part de DGF pour les élus qui se lancent. L'occasion aussi de présenter la deuxième édition du Panorama des communes nouvelles.

« La commune nouvelle est une exception dans notre paysage institutionnel en incarnant la subsidiarité, approche ascendante de l’action publique fondée sur la liberté et la responsabilité. Il ne s’agit pas d’imposer un schéma technocratique mais de s’appuyer sur la volonté du terrain en mutualisant sans éloigner la décision des citoyens ». En ouverture de la 7e rencontre nationale des communes nouvelles, organisée le 28 septembre au Sénat, David Lisnard, le président de l’AMF, a bien planté le décor sur les enjeux en présence. 

Organisée par l’AMF et la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales, cette rencontre s’est penchée sur les moyens de donner un nouveau souffle aux communes nouvelles, au nombre aujourd’hui de 787 (2536 communes regroupées), dont les créations stagnent depuis 2019 – ce qui s’explique essentiellement par la période pré-municipales et la crise sanitaire. 

Présidente de la délégation et auteure de la loi du 1er août 2019 sur les communes nouvelles, la sénatrice Françoise Gatel les défend plus que jamais en estimant que « cette forme de différenciation permet de garantir de l’efficacité publique jusqu’au dernier kilomètre et de retrouver la confiance de la population ». 

Flèches contre le rapport de l’IGA

Le récent rapport de l’IGA évoquant un « bilan décevant » des communes nouvelles était dans toutes les pensées et a été fustigé par les intervenants, avec quelques flèches de la part des élus comme David Lisnard, pointant la « bureaucratisation » qu’engendrerait la création de commissions départementales ayant leur mot à dire sur l’évolution du bloc communal. Jacques Pélissard, président d’honneur de l’AMF et « père » des communes nouvelles, a lui aussi dénoncé cette idée « aux antipodes du principe de liberté de décider d’une commune nouvelle ». « La décision est prise par les élus avec une diversité d’organisations car ce sont eux qui connaissent leurs territoires », martèle-t-il. 

Demande d’accompagnement de l’État

Françoise Gatel appelle les préfectures à mieux faire la promotion des communes nouvelles auprès des élus locaux. Une tâche aussi à remplir par ceux qui se sont lancés. « Il y a un travail important d’explications à faire auprès de nos collègues, estime Paul Carrère, maire de Morcenx-la-Nouvelle (40) et coprésident du groupe de travail Communes nouvelles de l’AMF. Nous devons reprendre notre bâton de pèlerin ». « Il faut faire passer le message que la commune nouvelle c’est avant tout un moyen de survie de la commune dans les territoires hyper-ruraux », insiste quant à lui Jean-Jacques Dumas, maire de Saint-Ybard (19). 

Pour donner un nouvel élan, tous les élus s’accordent à dire que l’accompagnement par l’État (préfet et sous-préfet) est essentiel. « Dans les projets qui ont réussi à aboutir, il y a toujours un accompagnement fort », constate Philippe Chalopin, maire de Baugé-en-Anjou (49) et coprésident du groupe de travail communes nouvelles de l’AMF. « Cela rassure les élus car c’est une garantie de réussite financière et administrative », complète Thomas Janvier, le maire de Maen Roch (35). 

Garantie des dotations

La deuxième édition du panorama des communes nouvelles, publié à l’occasion de la rencontre du 28 septembre, fournit un bilan complet et formule aussi 14 propositions pour relancer le mouvement, sous la houlette de son auteur, Vincent Aubelle, professeur associé des universités.

David Lisnard insiste sur « la souplesse nécessaire pour éviter les effets de seuil ». Pour « sortir des atermoiements financiers qui freinent les créations », il plaide pour « renforcer les mesures d’accompagnement sur les trois premières années et éviter les pertes de dotation ». Parmi les propositions du panorama figure ainsi la garantie, sans condition de durée, d’une DGF au moins égale à celles dont bénéficiaient les communes fondatrices avant la création de la commune nouvelle. « Le frein essentiel est la perte d’argent », rappelle Philippe Chalopin. 

Groupe de travail du Sénat sur la décentralisation

Autre proposition : une majoration de la part forfaitaire de la DGF accessible à toutes les communes nouvelles sous réserve de respecter un plancher de 1000 habitants. Regrettant que « l’intercommunalité soit réduite aux EPCI », Vincent Aubelle plaide pour sortir de cette confusion en créant « l’intercommunalité nouvelle ». Elle serait compétente uniquement sur les compétences stratégiques sur un périmètre élargi via un syndicat mixte associant plusieurs EPCI et des communes-communautés, alors que tout le reste serait porté à l’échelle communale. « La commune nouvelle, c’est la liberté des élus de choisir la bonne échelle et le bon outil pour assurer leurs compétences dans de grands ensembles intercommunaux, pour faire face aux enjeux d’aujourd’hui », appuie Jean-Marc Vasse, maire de Terres-de-Caux (76) et maire référent de l’AMF pour l’accompagnement des communes nouvelles.

Certaines de ces propositions pourraient être reprises par le Sénat dont le président, Gérard Larcher, a annoncé l’installation le 5 octobre d’un groupe de travail sur la décentralisation qu’il présidera. En promettant que des propositions en faveur de la différenciation et de l’adaptabilité feraient partie des mesures préconisées dans le rapport remis au printemps prochain.

Associer la population 

Lors de la table ronde « démocratie et subsidiarité », Françoise Gatel a comparé la commune nouvelle à « un mariage de raison et d’affection ». « Un chemin compliqué comme pour faire vivre une famille recomposée, qui ne soit pas juste une addition mais la création d’un lien, estime-t-elle. D’où toute l’importance de concerter et d’associer la population ». Des propos partagés par de nombreux intervenants. « Il faut embarquer tout le monde très en amont sinon c’est un échec, lance Philippe Chalopin. Ensuite, il est nécessaire de beaucoup concerter pour faire vivre la commune nouvelle ». 

Maire de Loireauxence (44), Christine Blanchet a mis en place un conseil de participation citoyenne. « Nous avons associé les habitants sur l’identité de la commune nouvelle ou le projet de territoire, pour lequel ils ont priorisé six thèmes de politiques publiques que nous allons intégrer », explique-t-elle en soulignant qu’il ne faut pas oublier les élus et les services dans ce travail de concertation. 

Comités consultatifs et maires délégués

Pour sa part, Cédric Haxaire, maire de Thaon-les-Vosges (88), a organisé en novembre 2020 un référendum sur le changement de nom de la commune nouvelle. « Il ne faut pas avoir peur de la population », affirme-t-il. En outre, des comités de proximité réunissent quatre fois par an les habitants avec chaque maire délégué. Le rôle des maires délégués a d’ailleurs été largement discuté pendant cette matinée d’échange, un élu regrettant que ceux-ci soient parfois considérés comme « des sous-maires ». L’importance capitale de maintenir des communes déléguées a été soulignée par plusieurs intervenants.

Autre exemple : Maen Roch (35) a associé la population sur le nom de la commune nouvelle avec des réunions publiques et un vote. « Ensuite, pour la faire vivre, nous avons mis en place un comité consultatif citoyen, associé notamment à la création d’une marque de territoire », explique le maire Thomas Janvier. « Toute cette animation est importante pour forger l’identité de la commune nouvelle et rester connecté à la réalité des habitants », conclut Paul Carrère. 




Logement social
L'inflation menace aussi le secteur HLM
Inéluctables hausses du taux du Livret A, explosion des charges des locataires, budgets contraints... A l'instar des collectivités, des entreprises ou encore des ménages, les bailleurs sociaux doivent faire face aux conséquences de la flambée des prix, nouvelle source d'inquiétudes majeures.

C’est « l’invitée surprise » de ce congrès. Il y a encore un an, personne n’aurait parié voir le thème de l’inflation - à l’époque particulièrement atone - ouvrir les débats du 82e congrès HLM en séance plénière. Finalement, rien de plus logique au regard de la nouvelle donne économique et des très fortes tensions sur le marché de l’énergie qui font entrer le mouvement HLM dans une période de turbulences.  

« Le plus stupéfiant est la vitesse à laquelle l’inflation est redevenue un problème », s’étonne Daniel Cohen, professeur de sciences économiques à l’Ecole Normale supérieure : « L’an dernier, son taux était inférieur à 1 % et il s’agissait pour les banques centrales de tenter de raviver un mort qui ne voulait pas se réveiller. Et tout d’un coup, on est confrontés au problème exactement inverse ! ».

Livret A : une hausse du taux qui pèse sur l’endettement

Cette rapidité, les bailleurs sociaux l’ont aussi directement ressenti avec une hausse répercutée sur le taux du Livret A. Une évolution qui pourrait les mettre très vite en difficulté puisque ceux-ci tirent leur financement de ce produit d’épargne. L’essentiel de leurs prêts étant contractés à taux variable, les intérêts qu’ils doivent rembourser augmentent ou baissent ainsi en fonction de l’évolution du taux du livret préféré des Français. 

Or, « il ne faut pas s’attendre à ce qu’il rechute. On sait que ça va augmenter en 2023, peut-être à 3 % voire plus, et on aura au moins un an, deux ans, trois ans d’augmentation du Livret A. Et ça change tout ! », a prévenu la présidente de l’Union sociale pour l’Habitat (USH), Emmanuelle Cosse.

En un an, le taux de ce produit d’épargne est passé de 0,5 % à 2 %, ce qui a déjà alourdi la charge de la dette du secteur de plus de 2 milliards d’euros. Dans ce contexte, les prélèvements effectués sur les bailleurs sociaux depuis 2018 (via la baisse des APL, la Réduction de loyer de solidarité (RLS) ou encore la hausse du taux de TVA) ne sont plus vraiment soutenables, aux yeux de l’ancienne ministre du Logement. 

La solution serait-elle alors de décorréler le taux du Livret A des prêts des bailleurs ? Pas si simple, à en croire Marcel Rogemont, président de la Fédération des offices publics de l’habitat (OPH), qui a répondu à cette question à l’occasion du débat consacré aux présidents des différentes fédérations qui composent le secteur : « Dans ce cas, qui paiera la différence? C’est très difficile, il faut faire très attention à ne pas changer de modèle dès qu’un petit problème apparaît. Le système est robuste et j’aspire à ce qu’il ne change pas », a-t-il mis en garde. 

Moins réservée sur la question, la présidente des Coop’HLM, Marie-Noëlle Lienemann, assure que, « pour combler l’écart, la méthode c’est l’aide à la pierre. J’ai vécu cette période où son niveau était calibré au regard de l’impact du Livret A sur le financement du logement social ».

Les charges, « le vrai problème de cet hiver »

Au-delà du « grignotage des outils qui font (sa) solidité », le mouvement HLM rappelle également que « l'indice de référence des loyers (IRL) ne va pas au même niveau que l’inflation, les revenus des locataires ne la suivent pas non plus et, par ailleurs, on n’a pas toujours droit à l’augmentation des loyers ».

Comment les bailleurs sociaux peuvent-ils alors retrouver des marges de manœuvre ? Pour cela, Emmanuelle Cosse dit vouloir retrouver, notamment, « plus d’aide à la pierre pour la rénovation » mais aussi davantage de « subventions locales, qui baissent ». « La difficulté c’est qu’il faut accélérer les investissements, notamment sur la rénovation des logements, mais si c’est juste avec des prêts, en fait on ne sait pas faire, à un moment donné on ne peut pas », assure-t-elle.

Reste qu’à court terme, « le vrai problème pour l’hiver prochain » c’est la question des charges. « Dans les mois à venir, nous allons voir croître les difficultés en matière de chauffage, en matière de hausse des charges qui vont être très concrètes pour les locataires et les bailleurs sociaux », a insisté le président de la Fnar (Fédération nationale des associations régionales HLM), Jean-Luc Vidon.

Et Marcel Rogemont d’illustrer le problème avec une quittance de loyer d’un F3 qui va, par exemple, « passer de 476 euros à 579 euros avec le bouclier tarifaire, elle serait à 606 euros sans celui-ci ». Selon lui, « on est devant une vraie question, et j’aspire à ce que le gouvernement (...) prenne en compte la réalité de ce qui se passe, et qui fait que le bouclier tarifaire est insuffisant ».

Construction : les indicateurs en berne

Alors qu’Elisabeth Borne a proposé, cet été, un « pacte de confiance » entre l’État et les acteurs des HLM, les bailleurs sociaux réclament également des moyens supplémentaires afin d’accélérer la rénovation du parc de logements et atteindre les objectifs affichés pour 2050. « Actuellement, on dépense un milliard d’euros par an pour la rénovation thermique, il faudrait en dépenser plus de trois milliards par an pour être au rendez-vous de 2034 », date à laquelle les logements de catégories E, F et G seront interdits à la location. 

Sans compter que le secteur de la construction s’attend à voir le marché « se gripper ». Malgré un très bon premier trimestre, « tous les indicateurs craquent avec des abandons d’opérations, des appels d’offres infructueux qui se développent, des ventes de promoteurs et de maisons individuelles en chute de l’ordre de - 20 % ou - 30 % », a expliqué Bernard Coloos, ancien délégué général adjoint à la Fédération française du bâtiment. « C’est en train de se gripper partout, et on l’observe également dans les travaux sur l’existant, que ce soit sur le résidentiel ou non. Tous les indicateurs s’effondrent. »

Briser l’inflation « ne se fera pas sans coût »

Faut-il alors s’inquiéter d’un choc inflationniste qui dure ou celui-ci finira-t-il par être brisé rapidement ? « On arrivera peut-être » à endiguer l’inflation, explique Daniel Cohen, mais « cela ne se fera pas sans coût et ce sera très difficile à traverser », notamment en 2023. « Les banques centrales vont tenter de crever toutes les bulles financières qu’elles ont créées ces dix dernières années. Et on ne peut donc pas exclure que, dans le marché de l’immobilier, des tensions nouvelles se fassent jour et viennent changer la donne en matière de financement et de soutien des prix. Et la spéculation deviendra plus difficile. »

Le professeur d’économie à Normale sup’ se veut d’ailleurs plutôt rassurant pour le secteur HLM : « Ce sera dur, mais ce le sera sans doute moins » que pour d’autres secteurs. En effet, si celui du logement social va être exposé à la hausse des taux, celui-ci a un « avantage comparatif » : « Cette crise générale, (les bailleurs sociaux ont) les moyens de mieux la traverser que les autres car, au fond, c’est davantage un problème de liquidités, au moins à court terme, qu’un problème de solvabilité, du fait que les taux de long terme ne seront jamais supérieurs à l’inflation, ce qui n’est pas nécessairement le cas pour le secteur privé ».

Reste que, comme l’a rappelé Daniel Cohen, « le problème de l'inflation, c’est qu’elle s’auto entretient (et) les banques centrales n’ont pas de remède miracle pour la fixer ». Et le professeur d’économie à Normale sup’ de paraphraser une métaphore de Milton Friedman, l’un des plus célèbres économistes américains du XXe siècle : « L’inflation, c’est comme le dentifrice. Quand il est sorti du tube, c’est très difficile de l’y faire rentrer. » 
 




Finances
Projet de loi de finances 2023 : les regrets et inquiétudes des associations d'élus
Plusieurs associations d'élus - dont l'association des Maires de France et des présidents d'Intercommunalités (AMF) - ont donné leurs avis à la suite de la présentation du projet de loi de finances pour 2023. Une crainte est partagée : celle que le projet de loi de finances aggrave encore les difficultés des collectivités.

Depuis plusieurs jours, le projet de loi de finances pour 2023 est au cœur de l’actualité. Présenté lundi par Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, et Gabriel Attal, ministre délégué chargé des Comptes publics, il suscite de nombreuses réactions chez les élus. Hors sol, déconnecté de la réalité, manquement au principe de la libre administration : les associations s’inquiètent de certaines dispositions prévues dans le PLF. 

C’est le cas de l'association des Maires de France et des présidents d'Intercommunalités (AMF) qui a publié hier un communiqué de presse dénonçant le fait que ce PLF 2023 « ne répond pas à la situation à laquelle doivent faire face les communes et intercommunalités. » 

La situation est d’ailleurs particulièrement complexe pour les collectivités à cause de l’inflation qui « provoque une hausse des charges des communes et intercommunalités sans évolution notable de leurs ressources », comme l’indique l’AMF qui rappelle que cette situation pourrait s’empirer en 2023 où l’inflation annoncée sera de 4,2 %. 

Indexation de la DGF sur l’inflation

Voilà plusieurs mois déjà que l’AMF propose « que soit garantie la stabilité des ressources en euros constants » notamment via « l’indexation sur l’inflation de la DGF. » L’AMF dit regretter que « la loi de finances ne prévoit pas cette indexation, ce qui équivaut à un prélèvement de l’État de plus d’un milliard d’euros sur de l’argent qui est dû aux communes et intercommunalités. » 

D’autres associations s’accordent sur ce point. L’association des Petites villes de France, par exemple, déplore qu’un soutien aux services locaux n’ait pas été prévu par ce biais. L’association indique dans son communiqué que beaucoup « de petites villes continueront à voir leur DGF diminuer en 2023, sans que la hausse de leurs dépenses liée à l’inflation, notamment énergétique, ne soient compensées. » Les élus des petites villes rappellent d’ailleurs que l’épargne brute des communes pourrait baisser de 11,3 %. 

Même son de cloche du côté de l’association Villes de France qui regrette que l’augmentation de la DGF ne soit « pas à la hauteur de l’inflation qui impactera fortement les collectivités locales. » La réévaluation du montant de la DGF est, selon Villes de France, indispensable pour « maintenir [les] capacités d’investissement [des collectivités] et la continuité des services publics à destination des Français. »

Suppression de la CVAE

Pour rappel, l'article 5 du PLF 2023 prévoit de réduire de moitié la CVAE en 2023 et une suppression définitive en 2024. Ce point est contesté par les associations d’élus. Pour l’AMF, cette suppression, en plus de retirer « encore une fois une ressource fiscale locale », va avoir des « dommages collatéraux ». Selon l’AMF, « la compensation par une fraction d’impôt national, la TVA, ne garantit pas en l’état le lien fiscal entre les entreprises et leur commune d’implantation, qui constitue pourtant un levier d’attractivité des communes. » Conséquence : le dispositif de compensation va générer d’importants transferts de ressources notamment entre les intercommunalités, au détriment des territoires industriels, et affecter le calcul du montant de leurs dotations. 

L’AMF remarque aussi que ce dispositif « ne permet pas une compensation à "l’euro près" : en intégrant la baisse de la CVAE 2021 (qui est assise sur la valeur ajoutée des entreprises en 2020) induite par la crise sanitaire dans les calculs, l’État baisse d’autant le montant de la compensation qu’il est censé assurer. »

Du côté des Départements de France, si la suppression de la CVAE est « regrettée », la compensation semble satisfaire : « La période de référence retenue 2020-2022 est un sujet de satisfaction d’autant que le Gouvernement s’est engagé à intégrer par la suite l’année 2023 dans le période de référence selon des modalités à préciser. L’absence d’année blanche permettra par ailleurs de bénéficier de la dynamique de TVA observée entre 2022 et 2023. » Pour Villes de France, cette compensation « est un moindre mal » mais n’efface pas le besoin « d’une véritable compensation active permettant de préserver la dynamique de nos territoires. »

Sur ce sujet l’AMF propose concrètement « un dégrèvement en 2023 et en 2024 afin de préparer correctement la mise en œuvre de la réforme. La compensation serait alors calculée sur la base des produits de CVAE 2022, 2023 et 2024. »

« Contrainte étatique » 

L’AMF parle de « nouveau dispositif de contrainte étatique des dépenses locales », Villes de France en parle comme d’un « nouvel instrument visant à contrôler l’évolution des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités »… Après le dispositif de Cahors, l’Exécutif augmente le nombre de collectivités concernées et alourdit les sanctions applicables, comme l’expliquait Maire info lundi dernier. 

Du point de vue des petites villes de France, ce projet de loi de programmation « pose les bases d’un nouvel encadrement (…) restrictif et bureaucratique. L'État ne peut à la fois demander une réduction de dépenses et en imposer sans cesse de nouvelles. » François Sauvadet, président de Départements de France appelle ainsi « le Gouvernement à faire confiance aux Départements, à lâcher prise, et à mettre effectivement leurs moyens en adéquation avec l’évolution des charges qu’il leur impose ! »

Vivement attachés au principe de libre administration des collectivités locales, nombreux sont les élus qui dénoncent ce dispositif de limitation des hausses des dépenses de fonctionnement des collectivités, que le ministère juge pourtant « fondamentalement différent » de celui des contrats de Cahors (lire le Maire info d’hier)

D’autres associations ne se sont pas encore directement exprimées sur le sujet. C’est le cas par exemple de l’association France urbaine dont la présidente Johanna Rolland et une délégation d’élus ont rencontré mardi la Première ministre pour présenter 12 mesures d’urgence « pour lutter contre les fractures sociales et territoriales ». Parmi elles se trouve notamment la non-suppression de la CVAE.
 




Restauration scolaire
Le bio à la cantine progresse, mais la bataille du local est loin d'être gagnée
La part d'achat du bio progresse dans les cantines scolaires, mais alors que la Commission Européenne envisage d'imiter l'exemple de la loi Egalim en la matière, elle reste sourde aux demandes des élus pour une exception alimentaire permettant d'inscrire un critère de provenance locale dans la commande publique.

L’Observatoire national de la restauration collective bio et durable vient de publier son rapport 2022, avec un échantillon record : cette année, 9 536 cantines, soit 2 770 cantines de plus qu’en 2021, ont répondu à l’enquête, ce qui represente 16 % de la restauration scolaire en France (avec plus d’1,4 million de repas par jour). La progression depuis le premier rapport est impressionnante : « Entre 2017 et 2021, les achats bio des cantines ont progresse de pres de 10 % en moyenne », révèle l’observatoire, avec une majorité de l’échantillon qui se situe entre 20 % et 40 %.

Les 20 % de bio d’Egalim encore loin pour un tiers des sondés

Cependant, reconnaît l’observatoire, « 23 % des cantines n’ont pas atteint les 20 % » fixés comme objectif pour la fin de l’année par la loi Egalim. Plus inquiétant, « pour 14 % des cantines de l’echantillon, le pourcentage de bio n’est pas connu, soit parce qu'elles ont des donnees partielles soit parce qu'elles n'ont pas d'outil de suivi des achats en bio », problème déjà soulevé il y a deux ans par une enquête de l’AMF (lire Maire info du 10 décembre 2020).

« On arrive à la fin 2022 et les objectifs Egalim ne sont pas atteints : il n’y a pas 50 % d’achats responsables et durables, pas 20 % de bio. Certes, il y a eu le Covid, l’inflation cette année, et ce sont des freins importants. Mais il y a toujours beaucoup de gaspillage alimentaire, on pourrait également servir plus de protéines végétales pour acheter moins de viande de meilleure qualité, et faire ainsi des économies », a souligné Gilles Pérole, co-président du groupe de travail sur la restauration scolaire à l’AMF.

L’élu s’exprimait mardi en ouverture du colloque « À table ! », organisé par la mairie de Mouans-Sartoux (Alpes-Maritimes), dont il est adjoint au maire à l’éducation ; la rencontre visait « à faire entendre au niveau européen la voix des villes européennes engagées pour la souveraineté et la démocratie alimentaires ».

D’ailleurs, l’édition 2022 du rapport de l’observatoire confirme que « les collectivites qui proposent des repas bio a la cantine continuent de maitriser leur budget » : malgré de grandes disparités, le coût par repas des denrées alimentaires, pour « la majorite de l'echantillon, se situe autour de 2€ ».

Outre la lutte contre le gaspillage et les repas végétariens, les cantines qui s’investissent dans le bio cherchent aussi des solutions pour acheter local, ce qui a été un avantage en terme de maîtrise de l’inflation des denrées, comme le rappelait récemment l’association de gestionnaires de cantines scolaires, Agores (lire Maire info du 25 mai).

Gilles Pérole n’a d’ailleurs pas manqué de dénoncer la hausse des coûts des denrées alimentaires par des grands groupes agro-alimentaires, tandis que l’État a demandé aux collectivités d’assumer seules cette hausse : « Je n’ai pas remarqué que l’État ait demandé à l’industrie agro-alimentaire de rebaisser ses prix au niveau d’avant la guerre en Ukraine ! » Le cours mondial du blé est en effet revenu à 340 euros la tonne, contre 440 en mars (+29 %) ; « pour autant, les pâtes bio ont augmenté de 50 %, et on n’a pas vu le prix rebaisser : ce sont des marges que les entreprises semblent vouloir pérenniser », a précisé Gilles Pérole pour Maire info.

L’épineux problème de l’achat local dans la commande publique

Or, les collectivités qui essaient d’échapper à la loi des cours mondiaux des denrées alimentaires, en passant par l’achat aux producteurs locaux, doivent toujours se contorsionner pour rester dans les clous de la commande publique, dont le cadre européen interdit de mentionner directement le critère de la provenance locale dans les appels d’offres.

L’AMF s’est prononcée à plusieurs reprises, notamment lors de la dernière élection présidentielle, pour une « exception alimentaire » dans le code de la commande publique, permettant d’y ajouter ce critère local – revendication reprise la semaine dernière par France Urbaine, lors de ses journées nationales (lire Maire info du 26 septembre).

Hier à Mouans-Sartoux, les élus de différents pays d’Europe ont réitéré cette demande, à l’image du premier échevin de Bruxelles qui déplorait que, voulant acheter des pommes bio pour sa cantine, il se soit vu proposer par son fournisseur des pommes bio… De Nouvelle-Zélande.

Présente lors des débats, Marion Maignan, membre de la Commission europeenne a la Direction generale de l'agriculture et du developpement rural, n’a pas directement réagi, se contentant de présenter la future initiative législative de la commission sur la « durabilité du système alimentaire de l’Union », qui devrait aboutir à une adoption par la Commission fin 2023.

Celle-ci reprend notamment l’idée lancée par la loi Egalim d’un « pourcentage minimal de produits de l’agriculture biologique dans les achats nationaux. » Ce à quoi Gilles Pérole répond que, si le texte reste encore à découvrir, « nous aurons des objectifs sans savoir comment faire pour les remplir… ».

Télécharger le rapport de l’Observatoire de la restauration durable.
 




Urbanisme
Taxe d'aménagement : un nouvel outil pour notifier à la DGFiP les taux et exonérations
Depuis le 23 septembre, les collectivités territoriales qui délibèrent sur la taxe d'aménagement (TA) ont accès à un nouvel outil mis à disposition par la DGFiP, baptisé Delta. Il s'agit d'un « outil de notification à la DGFiP des taux et exonérations votés par les collectivités ». 

La taxe d’aménagement est perçue par les communes, les départements et la région Île-de-France. Elle est due par tous les propriétaires qui réalisent des travaux soumis à permis de construire, permis d’aménager ou autorisation préalable. 

Chaque année, le gouvernement publie, par arrêté, les valeurs annuelles par mètre carré (soit en 2022, 820 €/m² hors Île-de-France et 929 €/M² dans la région capitale). Pour calculer le montant de la TA, il faut multiplier la surface de la construction créée par la valeur annuelle, puis par le un taux qui, lui, est délibéré par la collectivité. 

Un certain nombre de possibilité d’exonérations sont prévues par le Code de l’urbanisme, de droit. D’autres sont facultatives (abris de jardin de plus de 5 m² et de moins de 20 m²…) et doivent faire l’objet d’une délibération de la commune.

Vérification nécessaire avant le 15 octobre

Le nouvel outil Delta ne prend en compte que les délibérations relatives aux taux et aux exonérations. Attention, les délibérations portant sur les reversements entre collectivités ne sont pas prises en compte par Delta. 

Lors de la mise en service de Delta, les délibérations prises en matière de TA ont été « automatiquement intégrées » par les services de la DGFiP, à la suite d’une opération prévue par l’ordonnance du 14 juin 2022, dont toute une partie traite du transfert de la gestion de la gestion de la taxe d’aménagement à la DGFiP, entrée en vigueur le 1er septembre dernier (lire Maire info du 8 septembre). La DGFiP explique que « les services cadastraux des directions locales de la DGFiP ont traduit les taux sectoriels applicables à des zones infra-communales définies par les délibérations, en parcelles cadastrales », pour pouvoir « remplir » Delta avec les délibérations des collectivités. 

Ce transfert a pu donner lieu à des erreurs. Il est donc demandé aux agents territoriaux « de consulter la délibération de leur collectivité et de s’assurer de l’exactitude des taux et exonérations intégrées ». En cas d’anomalie, il est possible de demander une correction, mais il faut faire vite, puisque la demande doit être envoyée à la DGFiP avant le 15 octobre. « Après le 15 octobre, aucune modification ne pourra être effectuée sur les délibérations initialisées dans Delta », insiste Bercy. 

Évolutions

Des évolutions sont prévues dans les mois qui viennent. Dès octobre, il sera possible de saisir « une délibération avec au moins deux taux sectorisés ». En novembre, la nouvelle version de Delta intégrera de nouvelles fonctions : « Consultation des délibérations à partir d’un code topographique : cette fonctionnalité est utile pour accéder rapidement au taux et exonérations qui s’appliquent à une parcelle cadastrale ; export d’une délibération au format pdf ou csv ; relance automatique des collectivités locales qui n’auront pas validé la saisie de leur délibération. »

Habilitation

Tous les agents qui bénéficient déjà d’un accès à l’application FDL (Fiscalité directe locale) « ont été automatiquement habilités à Delta ». Ils pourront donc s’y connecter avec les mêmes identifiants. Pour obtenir de nouvelles habilitations, la collectivité doit passer par le service de fiscalité directe locale de la direction régionale ou départementale des finances publiques. « Cette demande devra comporter le nom et prénom de l’agent à habiliter, ainsi que le Siren de la collectivité ». 

Calendrier

L’ordonnance du 14 juin 2022 a fixé de nouvelles règles sur les délibérations en matière de taxe d’urbanisme. Pour rappel, pour les délibérations prenant effet en 2023, il faut délibérer avant le 1er octobre prochain, il y a donc urgence ! Pour les années suivantes, la délibération devra intervenir avant le 1er juillet pour une prise d’effet au 1er janvier de l’année suivante. 

Une fois la délibération prise, il faudra désormais l’entrer dans Delta, à partir de 2023. Des relances seront envoyées par mail, en septembre et en novembre – ce qui suppose que la  collectivité ait fourni une adresse mail de contact. Attention, « si aucune saisie de délibération n’a été faite ou si la validation de la délibération en cours de saisie n’a pas été réalisée correctement, la dernière délibération enregistrée dans Delta continuera de s’appliquer ». 

Toutes ces informations, plusieurs recommandations techniques et opérationnelles et une « boîte à outils » sont à retrouver sur une page dédiée du portail des collectivités locales.  

Deux notes sur le sujet de la réforme de la gestion de la taxe d’aménagement et sur les modalités de calcul de la taxe d’aménagement sont également disponibles sur le site de l'AMF. 






Journal Officiel du jeudi 29 septembre 2022

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Arrêté du 5 septembre 2022 modifiant l'arrêté du 2 juillet 1982 relatif aux transports en commun de personnes
Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Arrêté du 16 septembre 2022 modifiant l'arrêté du 6 décembre 2011 fixant les circonscriptions des chefs de service économique régional

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