Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 13 avril 2023
Dotations de l'état

À l'Assemblée nationale, les députés de la commission des lois favorables à l'indexation de la DGF sur l'inflation

Si cette mesure, réclamée par les associations d'élus, a pu passer l'étape de la commission des lois, l'issue finale, en séance publique en mai prochain, reste encore plus qu'incertaine puisque les membres de la majorité présidentielle s'y opposent toujours. La Nupes, le RN et les LR s'y disent toutefois favorables.

Par A.W.

L’Assemblée nationale est-elle prête à indexer la DGF sur l’inflation ? Une première étape a, en tout cas, été franchie, hier, après que les membres de la commission des lois ont adopté un texte allant dans ce sens. 

Après les sénateurs qui avaient tenté, à l’automne dernier, d’augmenter de 4,2 % la principale dotation des collectivités territoriales, c’est au tour des députés de la commission de décider « d’assurer chaque année, a minima, un montant constant de dotation en termes réels »  aux collectivités. 

Pour cela, ils ont choisi « d’ajouter un alinéa supplémentaire à l’article 6 de la loi organique des lois de finances (LOLF) de 2001 garantissant que le montant des prélèvements sur recettes à destination des collectivités territoriales ne puisse être inférieur, à périmètre constant, au montant de l’année précédente majorée de l’inflation ». Une demande sans cesse renouvelée par les associations d’élus, en particulier l'AMF, et, cette fois, portée par les députés communistes dans le cadre de la niche parlementaire de leur groupe Gauche démocrate et républicaine (GDR).

« L’indexation est un dû » 

« L’indexation est un dû pour les collectivités, et relève du bon sens économique »  puisque « les dépenses des collectivités subissent elles aussi l’inflation, et parfois plus fortement », selon les termes employés, dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, par son rapporteur Jean-Marc Tellier (Gauche démocrate et républicaine/Nupes), qui juge ainsi « logique que les recettes suivent pour maintenir un niveau constant de service ». 

Après avoir subi une « chute draconienne »  des dotations avec « une baisse drastique de 11,2 milliards d’euros de DGF entre 2013 et 2017 », puis « le détricotage de la fiscalité locale (taxe d’habitation, CVAE) »  et « la crise covid qui les [a mis] une nouvelle fois à l’épreuve », c’est désormais « l’inflation qui vient réduire encore les moyens des collectivités »  avec un panier du maire qui a explosé de 7,2 % l'an passé, « soit plus que l’inflation classique ». Une situation qui s’avère donc « intenable pour nombre de collectivités », dont la situation financière est jugée « critique, voire très critique pour certaines », par les auteurs de la proposition de loi. 

Et, contrairement aux attentes, ces derniers s’alarment du fait que « l’inflation ne reflue pas : les prix des contrats énergétiques proposés aux collectivités sont multipliés par deux ou trois et l’inflation sur les produits alimentaires dépasse les 10 %. Quant au filet de sécurité, la mesure de compensation prévue par le gouvernement dans la loi de finances s’avère toujours mal calibrée et clairement insuffisante ». 

Résultat, « l’année en cours s’annonce périlleuse », aux yeux des auteurs du texte, qui rappellent que « les élus locaux, en particulier les maires, sont livrés à eux-mêmes et commencent déjà le bricolage pour effectuer les quelques maigres économies encore possibles ». « Le gouvernement rest[ant] sourd »  à leurs difficultés, selon eux, malgré une hausse de 320 millions d'euros de DGF cette année. 

Le jour même, les Départements de France ont, d’ailleurs, rappelé dans un communiqué « la fragilité »  de leurs finances tandis que l’Insee a révélé récemment la « dégradation »  des finances communales l’an passé. 

La majorité toujours opposée

Mais, sans surprise, cette idée est loin de faire l’unanimité chez les parlementaires, notamment dans la majorité présidentielle. Rémy Rebeyrotte (Saône-et-Loire, Renaissance), Mathilde Desjonquères (Loir-et-Cher, MoDem) et Philippe Pradal (Alpes-Maritimes, Horizons) y sont tous « défavorables ». 

Privilégiant le « cousu main »  et vantant le filet de sécurité et l’amortisseur (qui a « évité des hausses de 20 à 30 % de l’énergie pour certaines collectivités » ), Rémy Rebeyrotte a ainsi pointé « le risque »  inhérent à « l’indexation mécanique sur l’inflation »  d’aider « proportionnellement les collectivités qui n’ont pas forcément le plus besoin de soutien supplémentaire ». « Une proposition courtermiste […] pas la plus efficace »  pour Philippe Pradal. Si ce n’est un simple « saupoudrage », pour Mathilde Desjonquères.

De son côté, le député LR Raphaël Schellenberger (Haut-Rhin) – dont le groupe pourrait faire la différence lors du vote en séance – a assuré que « le groupe LR sera favorable à l’augmentation de la DGF sur l’inflation ». Bien qu’il ne soit « pas certain »  qu’augmenter la DGF « de façon linéaire en se collant à l’inflation »  soit « la solution », il y a tout de même perçu, « peut-être, le début d’une réponse »  et a réclamé de « s’attaquer au chantier de l’autonomie fiscale et financière des collectivités ».

On peut également rappeler que les sénateurs, à majorité de droite, avaient décidé de revaloriser cette dotation de l’État, l’an passé, via une série d’amendements au projet de loi de finances (PLF) pour 2023 et notamment sous l’impulsion d'un amendement des sénateurs LR, contre les avis du gouvernement et de la commission. La discussion à l’Assemblée sur ce point n’avait, elle, pas eu lieu à l’époque.

« En choisissant d’empêcher tout débat sur les finances des collectivités à l’automne dernier avec dix 49-3, le gouvernement, croyant clouer le bec des oppositions quand il était minoritaire, a envoyé cette missive aux élus locaux : circulez, il n’y a rien à voir ! », a d’ailleurs rappelé Sébastien Rome (Hérault, France Insoumise), favorable au texte. Référence à la décision de la Première ministre, en novembre dernier, de mettre fin au débat de la partie « dépenses »  du PLF pour 2023 en usant du 49-3. Les collectivités locales n’avaient ainsi pas eu droit à la discussion – qui s’annonçait tendue – qu’elles attendaient, en séance. Privé de majorité absolue, le gouvernement risquait de s'exposer à des déconvenues lors des votes.

Soutenant la proposition de loi, le député de l’Aude, Julien Rancoule (Rassemblement national), a, quant à lui, estimé qu’« il y a nécessité a assurer un montant constant de dotations en termes réels année après année ». Pour la financer, il souhaite « minorer les ressources que la France affecte à sa participation au budget de l’Union européenne ».

Le texte communiste a également reçu le soutien du groupe Liot (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) en la personne de Jean-Philippe Acquaviva, député de Haute-Corse.

Pour savoir si cette proposition de loi sera finalement bien adoptée par l'Assemblée, il faudra donc suivre la discussion en séance qui se tiendra le 4 mai prochain.

Consulter le texte de la commission.
 

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