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Édition du vendredi 7 avril 2023
Transports

Les petits trains du futur agitent le monde du ferroviaire

Autorails futuristes, autocars sur rails ou grosses voitures roulant sur des voies ferrées, autonomes ou à hydrogène: toute une génération de nouveaux trains légers pourrait voir le jour ces prochaines années en France, pour sauver les petites lignes.

Par Jean Liou (AFP)

« Il y a beaucoup d’inventivité, d’innovation », a salué le président de la SNCF Jean-Pierre Farandou, mardi à l’Assemblée nationale. « On est en train d’inventer le matériel régional de demain ! » 

Il s’agit de mettre au point des trains bien plus légers que les TER actuels, moins chers et plus adaptés aux plus petites des petites lignes, et si possible français.

Le petit monde du ferroviaire s’est vraiment mis à plancher sur la question sous l’impulsion du secrétaire d’État aux Transports Jean-Baptiste Djebbari début 2020.

Des start-up avaient déjà fait des propositions, prises plus ou moins au sérieux. Et la SNCF a pris le taureau par les cornes, mobilisant des grands noms pour inventer des trains: Alstom, Bosch, CAF, Capgemini, Michelin, Thales, Wabtec...

« Il faut qu’on se secoue un peu et qu’on arrive à innover », expose Carole Desnost, la directrice de l’innovation à la SNCF. 

« Après, qui porte l’ambition, si ce n’est pas la SNCF ? »  La compagnie a selon elle « un rôle de catalyseur », avec en toile de fond l’ambition du groupe public de doubler la part du ferroviaire dans les transports en une dizaine d’années, ainsi que la perspective de l’abandon des trains diesel en 2035. 

« On n’a pas voulu proposer un modèle, mais une gamme qui se décline en fonction de la densité des trafics, de l’état de la voie et du nombre de passagers », expose Carole Desnost. Avec un mot d’ordre : « simplifier ».

Renaissance de la Micheline

Officiellement lancé en mars chez l’équipementier Texelis – qui fournit des essieux ultralégers – à Limoges, le « train léger innovant »  ressemble à un autorail futuriste de deux voitures, avec une drôle de cabine perchée sur le toit qui rappelle le mythique Picasso de la SNCF des années 1950. Deux fois plus léger et 30 % moins cher qu’un (petit) TER, avec des batteries permettant de parcourir 200 km, il pourrait être mis en circulation en 2029.

Le modèle suivant, Draisy, est un autocar sur rail design pouvant embarquer jusqu’à 80 personnes. Une renaissance high-tech de la Micheline des années 1930 ! Ce « tramway des campagnes »  sur batteries est conçu pour rouler sur de courtes distances, de 20 à 100 km. Il pourrait faire ses premiers tours de roues dès 2025 et être commercialisé deux ans plus tard.

Plus novateur, Flexy est un gros taxi collectif de 14 places assises, capable de rouler sur des voies ferrées, puis de les quitter aux passages à niveau pour s’engager sur des routes, grâce à des pneus et des roues conçus par Michelin qui s’adaptent aux rails.

Démonstration en 2025

Sur plus ou moins le même créneau, la Société d’ingénierie, de construction et d’exploitation de la Ferromobile, présidée par l’ancien ministre Arnaud Montebourg veut lancer des monospaces passant d’un univers à l’autre, en libre-service sur la route et autonomes sur les rails.

Deux start-up, enfin, planchent sur des navettes autonomes.

Taxirail propose de petits véhicules de 40 places – qui pourront circuler seuls, à deux ou à trois modules – fonctionnant avec des batteries et de l’hydrogène. Son concepteur Régis Coat promet un début des essais à la fin de l’année sur un bout de ligne à Port-Jérôme (Seine-Maritime).

Ecotrain promet de son côté une navette autonome « frugale »  de 30 places, à l’énergie solaire. Avec un prototype début 2025.
« En même temps qu’on travaille sur la machine, la vraie complexité porte sur le modèle économique », relève le coordinateur du projet Philippe Bourguignon. Il s’agit de réinventer toute l’exploitation des lignes, avec des normes moins contraignantes pour les voies, une signalisation adaptée aux besoins du véhicule, une production d’énergie intégrée, etc. 

Plusieurs centaines de petites lignes en France pourraient accueillir cette génération de trains légers, encore en exploitation ou fermées depuis longtemps. Pour aller à Etretat, Cabourg, Autun, Digne, Roscoff, Quiberon, Felletin... L’idée est partout d’offrir des services fréquents, tout en réduisant fortement les coûts. « Toutes les régions sont intéressées », assure Jean-Aimé Mougenot, le patron des TER chez SNCF Voyageurs. C’est elles qui achèteront les trains.
 

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