Maire-info
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Édition du vendredi 22 septembre 2023
Petite enfance

Service public de la petite enfance : les députés reviennent sur certaines dispositions apportées par le Sénat

La commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale a adopté, dans la nuit de mercredi à jeudi, le projet de loi Plein emploi. Plusieurs modifications importantes ont été apportées au chapitre consacré au SPPE (service public de la petite enfance) qui va être confié aux communes. 

Par Franck Lemarc

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La rentrée parlementaire débute à peine que les portes claquent déjà. La décision de la majorité de terminer l’examen du projet de loi Plein emploi, en commission des Affaires sociales, dans la nuit de mercredi à jeudi, plutôt que de reporter l’examen au lendemain, a ulcéré les groupes d’opposition, qui ont tous (en dehors du RN) décidé de quitter la salle. Jugeant que les sujets examinés étaient trop sérieux pour être examinés en pleine nuit (la ministre Aurore Bergé a été auditionnée à 1 h 30 du matin !), les groupes d’opposition ont donc boycotté la fin du débat et n’ont pas participé au vote sur ce texte. « Ils ont adopté leur petite loi entre eux, leur petite tambouille dans leur petite cuisine », a commenté par la suite le député LR Philippe Juvin. 

Les avancées obtenues lors du passage au Sénat

Rappelons que ce texte, adopté par le Sénat le 11 juillet et essentiellement consacré à la création de France travail en lieu et place de Pôle emploi, vise également (article 10) à créer une nouvelle compétence pour les communes : le service public de la petite enfance (SPPE), dont elles seront les autorités organisatrices. Si l’idée de ce service public de la petite enfance confié aux communes a reçu un accueil favorable de l’AMF, certaines modalités choisies par le gouvernement ne lui convenaient pas, en revanche (lire Maire info du 25 mai). 

Pour mémoire, au moment de la présentation du texte, l’AMF rejetait le principe du pouvoir de substitution accordé aux préfets, en tant que président du comité départemental des services aux familles, en cas de difficulté des communes à mettre en oeuvre leurs nouvelles compétences, notamment sur l'élaboration des schémas de maintien et de développement de l’offre d’accueil et sur la création d'un relais petite enfance dans les communes de plus de 10 000 habitants. Elle demandait également qu’un éventuel transfert de cette compétence aux EPCI puisse se faire « à la carte »  et non seulement « en bloc »  comme le proposait le gouvernement. Enfin, elle souhaite que cette nouvelle compétence ne soit mise en place qu’après les élections municipales de 2026, au 1er janvier 2027, et non en septembre 2025 comme le prévoyait initialement le gouvernement. L’AMF s’interroge aussi sur l’impact financier ainsi que sur les compensations prévues pour les autorités organisatrices de ces dispositions, points totalement absents du projet de loi. 

Lors de l’examen du texte au Sénat, un certain nombre de ces points ont été résolus : le Sénat a voté le transfert à la carte aux EPCI (les compétences peuvent être transférées « en tout ou partie » ), et il a supprimé le pouvoir de substitution accordé au préfet et prévu une mise en oeuvre en 2027. 

Certaines dispositions initiales rétablies mais assouplies

Au-delà d’un certain nombre d’amendements rédactionnels, la commission des Affaires sociales a modifié plusieurs points de l’article 10. 

D’abord sur les seuils. Rappelons que le texte définit quatre compétences pour le SPPE : recensement des besoins des parents d'enfants de moins de 3 ans en matière de services aux familles ; informer et accompagner les familles ; planifier, en fonction de ce recensement, le développement des modes d’accueil ; « soutenir la qualité des modes d’accueil ». Les deux premières compétences (recensement et information) seront exercées par « toutes les communes ». Quant aux deux autres (planification et soutien), elles ne seront obligatoires que pour les communes de plus de 3 500 habitants. La commission n'a rien changé à tout cela. En revanche, elle a modifié les seuils pour la compétence d’élaboration et de mise en œuvre du « schéma pluriannuel de maintien et de développement de l’accueil du jeune enfant ». Le Sénat avait adopté un amendement visant à ce que cette compétence ne concerne que les communes de plus de 10 000 habitants. Le seuil a été abaissé à 3 500. Il s’agit en fait de revenir à l’intention initiale du gouvernement, qui avait placé la barre à 3 500 avant que le Sénat la remonte à 10 000 habitants. L’amendement Renaissance qui a modifié ce seuil précise qu’« au regard des besoins importants en mode d’accueil dans les zones rurales et périurbaines, il est important que les communes entre 3 500 et 10 000 habitants (soit 2 236 communes) établissent leur stratégie en matière d’accueil des enfants de moins de trois ans ». Néanmoins, l’amendement prévoit que les modalités d’élaboration de ce schéma seront « adaptées »  pour les communes comptant entre 3 500 et 10 000 habitants. Ce qui répond à une préoccupation de l’AMF, dont le président a échangé à plusieurs reprises avec la ministre des Solidarités et des Familles, Aurore Bergé, à l’occasion de l’examen du texte en commission des affaires sociales de l’Assemblée Nationale.

Les députés de la commission des Affaires sociales n’ont pas touché au « transfert à la carte »  des compétences. Ils ont par ailleurs établi une forme d’accompagnement des autorités organisatrices par le comité départemental des services aux familles sur la question du schéma pluriannuel et du relais petite enfance. Mais la forme a été travaillée pour retirer le principe du pouvoir de substitution et rendre cette intervention du préfet moins brutale et plus constructive. « Lorsqu’une autorité organisatrice rencontre des difficultés »  dans la mise en œuvre de ses obligations, dit maintenant le texte, le préfet « peut lui apporter son concours »  pour résoudre ces difficultés, il « l’invite »  à « exposer les difficultés rencontrées »  (problèmes financiers, indisponibilité du foncier, tension sur le recrutement de professionnels…). Puis, le comité départemental de services aux familles (présidé par le préfet), pourra « établir une liste d’actions susceptibles d’être conduites »  pour résoudre les difficultés, sous forme d’un « plan de rattrapage ». 

Autre modification importante : la commission a créé une dérogation à l’obligation d’élaborer un schéma pluriannuel de maintien et de développement de l’offre d’accueil du jeune enfant : les communes ayant déjà conclu une convention territoriale globale (CTG) avec la Caf seront dispensées de cette obligation, « dès lors que le contenu de cette convention correspondrait à celui du schéma ». La grande majorité des communes concernées ont déjà signé une telle convention. 

Néanmoins, l’AMF alerte sur le fait que ces CTG ne sont pas toujours construites en lien étroit avec les communes, la CAF fléchant souvent la signature à l’échelle de l’intercommunalité. Aussi, elle demande la suppression de cette disposition. 

Enfin, le texte adopté en commission avance la date de mise en œuvre au 1er janvier 2025. L'AMF demande, a minima, de la souplesse, en particulier pour les communes de plus de 10 000 habitants ne disposant aujourd’hui pas de relais petite enfance (près de 10 % des communes). 

Du nouveau sur les crèches

Signalons enfin que le gouvernement a introduit dans le texte, par amendement, un article entièrement nouveau consacré aux crèches et visant à répondre à « certains dysfonctionnements ». L’exposé des motifs de cet amendement mentionne « la publication récente de livres sur ce thème », allusion à l’ouvrage Le Prix du berceau, de Daphné Gastaldi et Mathieu Perisse, paru début septembre, qui dénonce de graves dérives dans les crèches privées. Le gouvernement rappelle qu’un rapport de l’Igas rendu public en avril dernier (lire Maire info du 12 avril) avait mis en lumière des constats inquiétants, liés en particulier à la pénurie de personnel, et établi 39 recommandations. L’amendement introduit dans le projet de loi (article 10 bis), « vise à rendre concrètes plusieurs de ces recommandations ». Maire info reviendra, dans une prochaine édition, sur ces importantes mesures, qui touchent aux procédures d’organisation, à l’évaluation et au contrôle des établissements, au rôle des Caf, etc. A noter toutefois la réponse à une demande ancienne de l’AMF : tout nouveau projet d’accueil sera désormais soumis à un avis favorable du maire. 

Accéder au texte adopté par la commission.

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