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Édition du vendredi 6 octobre 2023
Constitution

Référendums, décentralisation : Emmanuel Macron souhaite une révision de la Constitution 

Dans un discours prononcé à l'occasion du 65e anniversaire de la Constitution de la Ve République, Emmanuel Macron a tracé les contours de la réforme constitutionnelle qu'il souhaite lancer. Elle devrait impliquer « une nouvelle étape de la décentralisation ». 

Par Franck Lemarc

Le 4 octobre 2023 a marqué le 65e anniversaire de la Constitution de la Ve République. À cette occasion, le chef de l’État a prononcé un long discours au Conseil constitutionnel, en grande partie consacré à un hommage à « cette Constitution la plus pérenne de notre histoire ». La Constitution de 1958 est, en effet, celle qui a eu la durée de vie la plus longue depuis la Révolution française. 

Les référendums 

Au-delà de l’hommage à ce texte qui, pour le chef de l’État, « représente l’avènement d’un régime qui combine la liberté et l’autorité, l’ordre et le pluralisme, la démocratie et l’unité dans un mélange heureux, français, républicain », Emmanuel Macron a longuement évoqué les évolutions qu’il pourrait connaître, en particulier sur la question du référendum. Il s’est interrogé sur l’équilibre entre « l’État de droit et la souveraineté du peuple », entre « la voix du peuple et la force de nos droits fondamentaux ».

Emmanuel Macron a clairement exclu tout changement de République, qui serait pour lui « inutile et présomptueux ». Il a fustigé « la mode du moment »  consistant à dire qu’« appliquer la Constitution serait non démocratique »  – allusion claire aux critiques sur l’usage régulier de l’article 49-3 par son gouvernement. « Notre Constitution dispose d'outils légitimes et leur usage est toujours justifié, sauf à raturer notre histoire républicaine », a martelé le chef de l’État. 

Mais la Constitution a évolué en 65 ans, « elle a accueilli les évolutions de notre temps », et doit évoluer encore pour « répondre aux principales attentes »  de la période. 

Première évolution envisagée : « Permettre aux citoyens d’être (…) davantage sollicités et mieux associés ». Emmanuel Macron a souligné que plusieurs formations politiques souhaitent « une extension du champ référendaire », et il s’y dit prêt. Rappelons qu’aujourd’hui, la Constitution encadre strictement l’usage du référendum : l’article 11 dispose qu’un référendum ne peut concerner, outre la ratification d’un traité, que « l'organisation des pouvoirs publics (ou) des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent ». Cette liste ne comprend donc pas les sujets de société, ce qui rendrait en l’état actuel des choses impossible l’organisation d’un référendum sur l’euthanasie ou l’immigration. 

Emmanuel Macron a décidé de « mener ce chantier à son terme ». 

Par ailleurs, il a dit souhaiter une « simplification »  de la mise en œuvre du référendum d’initiative populaire (RIP), elle aussi prévue par l’article 11, cette mise en œuvre étant aujourd’hui « excessivement contrainte ». Toutes les tentatives de provoquer un tel référendum ont en effet, jusqu’à présent, buté sur l’obligation de réunir près de 5 millions de soutiens citoyens (« un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales » ). Emmanuel Macron se dit prêt à envisager que « les seuils »  comme « les procédures »  puissent être « revus ». 

La stratégie du chef de l’État paraît claire : par ces deux annonces, il donne du grain à moudre aux deux côtés de l’opposition. L’extension du champ référendaire aux sujets de société permettrait l’organisation d’un référendum sur l’immigration, comme le réclament Les Républicains et le Rassemblement national ; la simplification du RIP répondrait à une revendication de la gauche. 

Il sera en effet indispensable d’avoir le soutien de la droite et de la gauche pour pouvoir espérer faire passer une réforme constitutionnelle. Et ce n’est pas, cette fois, à cause de la majorité relative dont dispose le gouvernement : une réforme constitutionnelle doit être adoptée dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et le Sénat et être votée par les deux chambres réunies en congrès à la majorité des trois cinquièmes. C’est ce qui explique que même lorsqu’Emmanuel Macron disposait d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale, il a échoué à faire aboutir de précédentes réformes de la Constitution, en 2018 et 2019. 

« Nouvelle étape de la décentralisation » 

Cette future réforme constitutionnelle ne s’arrêtera pas à la question du référendum. Elle devrait inclure, conformément aux annonces récentes du chef de l’État, la question de l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie et de la Corse. Emmanuel Macron a répété le 4 octobre qu’il souhaite « ouvrir la voie à une forme d’autonomie dans la République »  pour la Corse. La République « indivisible ne signifie pas uniforme. L’idéal républicain est assez fort pour accueillir les adaptations, les spécificités, les particularités ». Le chef de l’État a d’ailleurs dit souhaiter que « l’ensemble de nos outre-mer »  fasse l’objet d’une évolution de la Constitution, afin qu’ils soient « mieux reconnus ». 

Reste la question de la décentralisation. Emmanuel Macron semble avoir de grandes ambitions en la matière puisqu’il a déclaré mercredi que « toute notre architecture territoriale est à repenser ». Il a estimé que la décentralisation est « inachevée » : « Depuis 40 ans, l'idéal de démocratie locale a organisé l'empiètement, la concurrence parfois, la coexistence en tout cas de collectivités et de l'État, parfois des collectivités entre elles, sans que l'écheveau des compétences ne soit réellement tranché. Cette décentralisation inachevée produit de l’inefficacité pour l’action publique. Elle produit aussi de la perte de repères pour nos concitoyens. » 

Emmanuel Macron veut donc simplifier l’organisation territoriale, lui donner « de la clarté et de la légitimité », afin que les citoyens sachent « qui est responsable de quoi, quel impôt concourt à quel service public ». Il veut également « aider nos maires à agir mieux (…), à adapter les normes, à leur donner plus de libertés », cette liberté devant être assortie de « plus de responsabilités ». Au-delà de ces idées générales, le chef de l’État n’a pas donné de détails sur cette future « nouvelle étape de la décentralisation »  qu’il appelle de ses vœux. Elle sera réalisée « avec l’ensemble des forces politiques ». 

Prochaine étape : le président de la République va à nouveau réunir, le 30 octobre prochain, les responsables des partis politiques représentés au Parlement, à Saint-Denis. Cette réunion devrait être en grande partie consacrée à ses projets de réforme de la Constitution. 

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