Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 22 décembre 2021
Crise sanitaire

Évolution des règles sanitaires : le gouvernement accélère le rythme

Face à une recrudescence de l'épidémie qui s'amorce déjà, le gouvernement a bousculé le planning législatif prévu et va convoquer le Parlement pendant la trêve des confiseurs, pour faire adopter son projet de loi sur le pass vaccinal « Ã  la mi-janvier ».

Par Franck Lemarc

72 832. C’est un chiffre jamais atteint depuis que l’épidémie a touché la France en février-mars 2020, et c’est celui des cas positifs détectés sur la seule journée du 21 décembre. Tous les compteurs s’affolent : alors que l’on pensait avoir atteint le pic de la 5e vague, ou du moins un plateau, il semble que, comme l’a constaté le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, hier, « l’épidémie reparte à la hausse ». 229 personnes sont décédées du covid-19 hier – portant à presque 122 000 le nombre de morts en France depuis le début de l’épidémie – et le nombre de patients en réanimation est repassé hier au-dessus de la barre des 3 000, ce qui représente un taux d’occupation des lits de réanimation de 60 %. Gabriel Attal a estimé hier que ce chiffre pourrait monter à 4 000 pendant la période des fêtes.

À l’instar de ce qui se passe dans de nombreux pays, le variant Omicron est en train de changer la donne et de nombreux experts se montrent extrêmement inquiets sur le début de l’année 2022, qui pourrait, malgré le taux de vaccination très élevé, s’avérer pire que la première vague en termes de saturation des lits d’hôpitaux.

Selon les derniers chiffres publiés, il apparaît que ce sont maintenant les personnes de 20 à 40 ans qui sont les principaux vecteurs de la circulation du virus. Alors que la 5e vague a été très fortement tirée par les enfants de 5 à 10 ans, ce qu’il va bientôt falloir appeler la 6e vague montre un autre profil : à Paris par exemple, le taux d’incidence chez les 20-29 ans atteint le chiffre vertigineux de 1748 cas pour 100 000 personnes. Autrement dit, 1,7 % des jeunes ont été testés positifs dans la semaine écoulée.

Objectif mi-janvier

Face à cette situation, le gouvernement a décidé d’accélérer le calendrier. Rappelons que le gouvernement, pour l’instant, reste sur sa ligne : ni couvre-feu ni confinement ni restrictions supplémentaires, mais une transformation du pass sanitaire en « pass vaccinal » : pour accéder à certains établissements recevant du public, il ne sera bientôt plus possible de se contenter d’un test négatif, il faudra être vacciné. 

Le gouvernement avait initialement prévu de présenter le texte organisant cette mesure au Conseil des ministres du 5 janvier, avec un débat dans la foulée au Parlement pour une adoption « avant la fin janvier ». 

Finalement, hier, il a annoncé que le texte serait présenté bien plus tôt – à l’occasion d’un Conseil des ministres qui aura lieu exceptionnellement lundi prochain, le 27 décembre. Il n’y aura pas de vacances pour les députés de la commission des lois, puisque le texte y sera aussitôt examiné, les 28 et 29 janvier apparemment. L’examen en séance publique devrait avoir lieu dès le lundi 3 janvier. L’objectif du gouvernement est maintenant de faire promulguer ce texte à la mi-janvier, ce qui n’est pas joué d’avance et demandera, à tout le moins, un examen express au Parlement – sans compter qu’il y a fort à parier que l’opposition saisira le Conseil constitutionnel sur ce texte. 

Plusieurs députés ont déjà fait état, dans la presse, ce matin, de leur irritation face à cette accélération du calendrier, estimant qu’elle rend impossible un examen d’un texte important « dans des conditions sereines ». 

Durcissement envisagé

Le gouvernement a apparemment renoncé à introduire dans son texte l’extension du pass sanitaire aux entreprises, face à l’opposition du Medef – qui s’est réjoui hier d’avoir été « entendu ». Le gouvernement s’attend néanmoins à ce que cette question revienne dans les débats sous forme d’amendement. 

Le porte-parole du gouvernement a par ailleurs, pour la première fois depuis la 3e vague du printemps dernier, ouvert la porte à la possibilité de durcir les mesures sanitaires : il a fait état hier de « la lucidité [du gouvernement] sur la possible nécessité de prendre d'autres mesures dès lors que nous constaterons dans notre pays la dégradation de la situation sanitaire ». On notera, dans cette phrase, l’usage du futur (« dès lors que nous constaterons » ) plutôt que du conditionnel…

Pas question, en revanche, d’envisager un report de l’élection présidentielle, quelle que soit la situation : cette option n’est « ni sur la table, ni en dessous de la table, ni dans le placard à côté de la table », a martelé Gabriel Attal. 

Il semble néanmoins que le gouvernement souhaite dès aujourd’hui réfléchir à l’organisation du scrutin dans ce qui va être, selon l’expression de Gabriel Attal hier, « une période de fortes turbulences ». C’est dans cet objectif que le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, va rencontrer prochainement le président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius. C’est en effet le Conseil constitutionnel qui est le juge de la régularité de l’élection présidentielle. C’est aussi lui qui est le seul habilité à prononcer un éventuel report, dans des conditions très strictement encadrées par la Constitution. 

L’AMF demande de la concertation

Jean Castex, hier, a rencontré par visio-conférence les responsables des associations d’élus. Le président de l’AMF, David Lisnard, a notamment déclaré à cette occasion, relate un communiqué de l’association, que « les maires, dans un esprit de responsabilité, (…) essaient de contribuer efficacement à la lutte contre l’épidémie », notamment en organisant les centres de vaccination. Il a rappelé que cette action représente un effort financier « qui doit absolument faire l’objet d’un remboursement juste et objectivé puisqu’il s’agit d’une action conduite pour le compte de l’État ». Le Premier ministre, annonce l’AMF, a accepté le principe d’un « dispositif de traitement des situations non réglées »  en la matière, sous la houlette du ministère de la Cohésion des territoires. 

Le maire de Cannes a également demandé que si des décisions de restrictions nouvelles étaient prises, elles le soient « en concertation avec les maires »  et de façon « adaptée aux circonstances locales ». Il a également relevé que « après deux ans de crise sanitaire, aucune adaptation significative du dispositif hospitalier n’est effective ». L’AMF a donc « rappelé son attachement au développement de l’action de la médecine de ville. (…) De même, les démarches ‘’d’aller vers’’ doivent être encouragées et permettre de toucher des personnes éloignées des circuits de vaccination ». Pour David Lisnard, « les CCAS jouent un rôle important dans cette mobilisation qui doit pouvoir s’appuyer sur une communication forte de l’État auprès des publics isolés et fragiles ». 

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