Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 8 mars 2024
ZAN

Financement du ZAN : le Sénat s'attaque à l'angle mort de la réforme

Après avoir corrigé la loi Climat et résilience de 2021, les sénateurs reviennent à la charge sur le volet financier du zéro artificialisation nette. La Chambre des territoires poursuit ses travaux en lançant une nouvelle mission d'information dédiée. Objectif : définir le modèle économique du ZAN, et réarmer en conséquence les collectivités sur les plans financier et fiscal.

Par Caroline Reinhart

Qui va payer le ZAN ? La question est d’autant plus brûlante qu’elle n’est pas nouvelle. La loi Climat et résilience de 2021, qui a fixé le cadre de cet objectif à atteindre en 2050, sommait déjà le gouvernement de proposer, dans les six mois suivant son adoption, des « dispositions en matière de fiscalité du logement et de la construction pour financer le ZAN ». Depuis, le sujet revient à chaque débat, rapport, Congrès des maires, à chaque parution de textes officiels – sans réponse probante du gouvernement. 

À l’automne dernier, l’AMF a donc pris l’initiative de publier « 20 nouvelles propositions sur le volet relatif au financement du nouveau modèle économique induit par la trajectoire ZAN » . Par ses rapports successifs, sa mission de suivi des lois de 2021 et 2023, l’organisation de débats, le Sénat aussi multiplie les alertes pour que soit enfin traitée cette question cruciale. C’est cette fois la commission des finances qui prend le relais en lançant une mission d’information dédiée, avec pour rapporteurs Jean-Baptiste Blanc et Hervé Maurey, et dont les travaux commenceront fin mars. 

Définir un modèle économique

« L’objectif n’est pas de créer un nouvel impôt ZAN, mais de réfléchir à un modèle de financement au-delà de la seule question fiscale. Le ZAN a un coût (renaturation, pénurie foncière…), or aucune étude d’impact n’a été réalisée sur ce point » , indiquait hier à Maire info le sénateur Jean-Baptiste Blanc, déjà auteur d’un rapport sur le sujet en 2022. « Malgré les assouplissements de la loi (d’initiative sénatoriale) du 20 juillet 2023 corrigeant la loi Climat et résilience, de nouvelles tensions émergent chez les élus autour du ZAN. La remise en cause du modèle pavillonnaire, encore maladroitement formulée dans une circulaire récente du ministère, renforce la grogne. Les anti-ZAN sont de plus en plus nombreux… ».

Publié en janvier 2023, le livre blanc de la SCET intitulé « objectif ZAN : réarmer l’intervention publique face au défi du zéro artificialisation nette »  évoquait déjà la question du coût, et donnait des pistes pour doter les élus d’outils financiers et fiscaux efficaces pour y parvenir. Parmi elles, étaient évoquées « l’exclusion de l’éligibilité au dispositif Pinel et au prêt à taux zéro (PTZ) des constructions sur des terres non artificialisées, ou encore l’exonération totale de taxe d’aménagement pour les projets qui ne changent pas l’emprise au sol du bâti (surélévation, rénovation, reconstruction). »  De ce point de vue, la loi de finances pour 2024 a partiellement suivi les préconisations du livre blanc de la SCET. Le dispositif Pinel a été supprimé, le PTZ recentré, et l’abattement Airbnb a même été – involontairement – revu.

Réorienter la fiscalité locale

Le Fonds vert, dont l’enveloppe est passée à 2,5 Mds d’euros, est l’autre outil de financement du ZAN mis en avant par le ministre Christophe Béchu (lire Maire info du 19 janvier). Mais le levier pérenne de la fiscalité locale n’a pas encore été abordé, malgré l’obligation pour l’État de transférer les ressources correspondant aux charges nouvelles assignées aux collectivités. C’est sur cette règle constitutionnelle – l’autonomie financière et fiscale des collectivités –, que va s’appuyer le Sénat pour négocier avec le gouvernement. 

« La mission d’information est l’occasion de revoir la fiscalité locale pour la réorienter vers la sobriété foncière. L’idée pourrait être de toiletter les assiettes des impôts et taxes – la taxe d’aménagement, par exemple – pour les réaffecter en ce sens. » , a précisé Jean-Baptiste Blanc. Objectif : trouver des solutions et financer cette nouvelle compétence, la « ville complexe ». « Il faut faire confiance aux élus locaux, et leur donner les outils juridiques et financiers nécessaires pour territorialiser le ZAN, entre pénurie de foncier et réindustrialisation. » , plaide le sénateur.  

Fiscalité, aide à l’ingénierie, réorientation de dotations, tous les leviers seront ainsi étudiés pour répondre à l’enjeu du ZAN, dont l’objectif est partagé par tous – mais dont la méthode divise encore. Les travaux de la mission d’information, ainsi que ceux de la mission de suivi des lois ZAN de 2021 et 2023, doivent aboutir en septembre prochain. Une nouvelle proposition de loi pourrait émerger… et un paquet d’amendements à la prochaine loi de finances.

Les 20 propositions de l’AMF pour financer le ZAN

Communiqué du Sénat sur la mission d’information 


 

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