Artificialisation des sols : François Rebsamen propose de décaler en 2034 l'objectif intermédiaire
Par A.W.
Le ministre de l'Aménagement du territoire, François Rebsamen, a dit vouloir reporter de 2031 à 2034 l’objectif intermédiaire de réduction de l'artificialisation des sols, lors d’une audition, qui s’est tenue la semaine dernière devant la commission des affaires économiques du Sénat.
Une proposition qui va à l’encontre du souhait de certains sénateurs qui comptent bien abroger ce « point d’étape » fixé en 2031 et qui prévoit de diviser par deux le rythme d'artificialisation durant la décennie en cours.
Point d’étape « indispensable »
Dans le but d’assouplir une nouvelle fois la mise en place du « Zéro artificialisation nette des sols » (ZAN) instauré par la loi Climat depuis 2021, les sénateurs Jean-Baptiste Blanc (LR, Vaucluse) et Guislain Cambier (centriste, Nord) ont ainsi déposé, en novembre, une proposition de loi qui prévoit d’abandonner le terme « repoussoir » de ZAN pour le substituer par celui de Trace, une « trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux ».
Bien qu’il ne remette pas en cause l'objectif final de 2050 visant à stopper l'étalement urbain, ce texte accorderait notamment « plus de latitude aux régions dans la fixation de leurs objectifs régionaux ». Il doit être examiné au palais du Luxembourg les 12 et 13 mars prochains.
S’il reconnaît que « des ajustements [sont] possibles », François Rebsamen estime, pour sa part, « indispensable » et « essentiel » d’avoir « un point d’étape » pour « évaluer objectivement notre avancée, rectifier la trajectoire » et « permettre à chaque collectivité de voir où elle se situe ».
« Il faut un moment d’étape, car si on attend 2048 pour vérifier les choses, je pense qu’on n’arrivera pas à atteindre » les objectifs, a défendu celui qui est toujours président de la métropole de Dijon.
Il s’est ainsi dit plutôt « favorable à décaler ce jalon intermédiaire initialement prévu sur 2021-2031 à la période d’observation 2024-2034 car, en pratique, les collectivités étaient dans l’incapacité de maîtriser leur trajectoire de consommation foncière entre 2021 et 2024, en l’absence de dispositions législatives claires et d’outils de pilotage ».
Des solutions « adaptées à chaque territoire »
Malgré les aménagements et assouplissements déjà mis en place en 2023 grâce à la loi « ZAN 2 » , des difficultés et blocages persistent dans de nombreux territoires, notamment ruraux. Une écrasante majorité d’élus (86 %) assurent ainsi ne pas utiliser les outils créés par ce nouveau texte (notamment le « sursis à statuer ZAN » ) et plus de la moitié d’entre eux estiment que les délais restent « trop courts », selon les résultats d’une enquête de l’AMF, réalisée l'été dernier.
« Le projet Trace [des sénateurs] repose sur le principe fondamental d'associer les élus locaux à la définition de la mise en œuvre de cette trajectoire » de sobriété, a rappelé le ministre, en reconnaissant que « c’est essentiel car c’est eux qui vont la mettre en œuvre ». Celui-ci ne souhaite donc « pas imposer des contraintes descendantes et des obligations qui viennent de l’extérieur », mais plutôt des « solutions adaptées à chacun des territoires ».
Dans ce cadre, François Rebsamen a aussi proposé que « la mutualisation de l’hectare communal puisse s’opérer non seulement à l’échelle des EPCI, mais aussi à l’échelle des SCoT », les schémas de cohérence territoriale. « Ils doivent pouvoir mutualiser leurs efforts et adapter les trajectoires de réduction de l’artificialisation en fonction chaque bassin de vie », a-t-il expliqué.
Il a, par ailleurs, défendu l’idée que « la conférence régionale de gouvernance puisse décider de s’affranchir, si elle le souhaite, du caractère prescriptif des Sraddet », ces schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires. Concrètement, « le Sraddet continuerait à s’imposer sauf si cette instance décidait du contraire. Ce qui est une manière d’assouplir ».
Aux yeux du ministre de l’Aménagement du territoire, le Zan n’est d’ailleurs « pas forcément un obstacle au développement de nos territoires » puisqu’il est « aussi une garantie de la préservation d'une souveraineté agricole […] et un moyen de réduire notre vulnérabilité à des risques naturels qui deviennent de plus en plus importants ».
20 000 hectares consommés par an
Il voit donc la proposition de loi sénatoriale avant tout comme « un outil pour mieux accompagner les territoires, mieux suivre notre trajectoire et répondre à tous les défis environnementaux, économiques, sociaux qui se posent à nous ».
Insistant d’ailleurs sur « l’ampleur du défi », François Rebsamen a rappelé, en citant les derniers chiffres du Cerema, que le rythme moyen de consommation d’espaces artificialisés se situe « autour de 20 000 hectares par an », dont « 66 % pour l’habitat, 24 % pour l’activité économique et 5 % pour les routes »
Il a également souligné que, « aujourd’hui encore, 61,3 % de la consommation d’espaces est localisée dans des communes détendues, de zonage C ». Ce sont ainsi « 7 820 communes [qui] perdent des ménages tout en consommant de l’espace ».
Un phénomène « très concentré » puisque « 5 % des communes sont concernées par 37 % de la consommation d’espaces », celles-ci étant situées « principalement en bordure des zones urbaines ou sur les littoraux atlantique et méditerranéen ».
Une situation qui « aggrave les inégalités d’accès au service public » (écoles, centres de santé…) en touchant notamment les « plus modestes », et qui entraîne une « fragmentation des territoires », une accentuation de la « vacance des logements » et la « désertification » des centres-villes.
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