Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 7 novembre 2025
Commerce

Taxe sur les friches, foncières, managers... : le gouvernement dévoile son « plan » de lutte contre la désertification commerciale

Le ministre du Commerce, Serge Papin, a annoncé ce matin vouloir déployer neuf mesures sur les 30 préconisées par les auteurs du rapport sur la désertification commerciale. Celle prévoyant d'élargir les pouvoirs du maire - en instaurant un avis obligatoire sur les demandes d'implantations et de cessions de commerces - n'a pas été retenue.

Par A.W.

Améliorer la fiscalité sur les locaux vacants, aider les communes à réhabiliter certaines boutiques et financer des managers spécialisés. Deux jours après la présentation d’un rapport sur l’inquiétante désertification commerciale dans le pays, le gouvernement a dévoilé, ce matin, son « plan »  pour tenter de « redynamiser le commerce de proximité ».

Pour cela, il a repris neuf recommandations du rapport réalisé par Frédérique Macarez, maire LR de Saint-Quentin (Aisne), Antoine Saintoyant, directeur de la Banque des territoires, et Dominique Schelcher, PDG de Coopérative U, qui réclament d’agir rapidement contre la hausse préoccupante de la vacance commerciale. 

Friches commerciales : vers une taxe plus précise

Un rapport « très intéressant », a reconnu le ministre du Commerce, Serge Papin, interrogé ce matin sur RMC. Parmi les neuf mesures qu’il a retenues, on peut en noter trois principales. Pour la première, le gouvernement compte miser sur une amélioration de la taxe sur les friches commerciales (TFC) et ainsi en faire « un levier efficace »  de revitalisation des centres-villes. Ce qui n'est pas vraiment le cas aujourd'hui.

Si, actuellement, elle permet de sanctionner les bailleurs qui ne louent pas leurs locaux commerciaux, « son utilité est freinée car elle doit s’appliquer de manière uniforme sur le territoire ». Résultat, en 2025, seules 480 communes et 68 EPCI (soit 5 % du territoire national) avaient recours à cet outil.

Pour y remédier, l’exécutif propose donc de la rendre plus fine afin de cibler un secteur précis de la commune. « Pas forcément à l’échelle d’une rue, mais c’est l’esprit », explique-t-on au sein du ministère chargé du Commerce. La taxe pourrait ainsi s’appliquer plutôt « zonage par zonage ». Pour cela, un amendement du gouvernement au projet de budget pour 2026 doit être déposé.

Financement des foncières et des managers

En parallèle, Serge Papin souhaite continuer à soutenir les foncières de redynamisation commerciale via le déblocage d’une enveloppe de 100 millions par la Banque des territoires. Un soutien qui permettrait aux communes qui n'en sont pas dotées de « lancer une foncière de redynamisation intégrée dans leur feuille de route de revitalisation commerciale »  et de « financer directement des projets de revitalisation à fort effet levier »  via la poursuite du fonds de restructuration des locaux d'activité (FRLA).

Selon le ministre, cela permettra de « donner accès plus facilement à des nouveaux commerçants »  dans les locaux vacants. Son ministère assure d'ailleurs que ces structures permettant d’accompagner la réhabilitation de commerces dans des villes moyennes sont « plébiscitées »  car elles permettent de « remettre en état les locaux commerciaux insalubres »  et « de choisir les activités économiques installées dans ces locaux ».

Afin de soutenir la pérennisation et la professionnalisation des « managers de commerce », Serge Papin a aussi annoncé, ce matin, le financement « dans les territoires fragiles »  de ces postes d’« animateur de centres-villes ». Là aussi, la Banque des Territoires participerait au projet à hauteur de 20 millions d’euros, certains postes pouvant être « mutualisés entre plusieurs communes », selon le ministère.

Ayant « démontré leur efficacité », eux aussi sont « plébiscités par les élus ». Plus de 500 postes ont déjà été déployés pour ces experts de l’aménagement marchand des villes qui interviennent directement auprès des élus pour définir et mettre en place leur politique commerciale. L’AMF confirme d'ailleurs, ce matin, l’attachement des élus communaux à ce dispositif et demande à l’État de « continuer à participer »  à son financement à travers « un appui budgétaire pérenne aux communes et intercommunalités ».

Soutien à l’entrepreneuriat dans les QPV

Sur les loyers des baux commerciaux, l’exécutif reconnaît que « certaines règles du bail commercial mettent en risque les petites structures en engageant des sorties trop importantes de trésorerie, ce qui les met en danger ». Il renvoie donc aux mesures inscrites dans le projet de loi de simplification de la vie économique, en cours d’examen : « La consécration d’un droit à la mensualisation des baux commerciaux »  et « le plafonnement du dépôt de garantie à trois mois de loyer ».

Le développement d’une IA « qui parle aux commerçants »  et qui répond à leurs besoins est également prévu, tout comme le renforcement du soutien à l’entrepreneuriat dans les quartiers de la politique de la ville (QPV) grâce à « l’amplification du programme Entrepreneuriat Quartier 2030 ». Par ailleurs, le gouvernement propose de travailler à un renforcement de l’axe « commerce »  des programmes Action cœur de ville, Petites villes de demain et Villages d’avenir. 

On peut noter que, en l’état, l’exécutif n’a pas retenu la proposition d’élargir les pouvoirs du maire en instaurant un avis obligatoire sur les demandes d’implantations commerciales et de cessions de commerces. Ni celle visant à créer un mécanisme facilitant le changement de destination des locaux commerciaux obsolètes.

Taxer les petits colis

Mais la solution passe aussi par « la régulation de la fast-fashion », plaide le gouvernement qui a décidé, hier, de réaliser une opération de communication « coup de poing ». Avec la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, le ministre du Commerce a ainsi assisté au contrôle de l’intégralité des colis du géant chinois du commerce Shein arrivés à l'aéroport parisien de Roissy-Charles-de-Gaulle.

Une opération intervenant dans le cadre de la procédure de suspension de la plateforme en France. Serge Papin a souligné, ce matin, avoir constaté des « choses aberrantes »  avec des articles « pas aux normes », tout cela « nourrissant un commerce illicite ».

L’ancien PDG de Système U a donc indiqué vouloir que la France se « protège »  face à cette concurrence déloyale et ce qu’il a qualifié de « prédation »  et de « Far West numérique ». Dans ce contexte, l’exécutif prévoit de prélever, dès le mois de janvier prochain, 2 euros sur chaque article en provenance d’un pays extra-européen. La mesure est déjà inscrite à l’article 22 du projet de loi de finances (PLF) pour 2026, dont le sort reste, toutefois, encore bien incertain. 

On peut, cependant, rappeler que l’Union européenne veut aussi mettre fin à l'exemption de droits de douane sur les colis d'une valeur inférieure à 150 euros et prépare ainsi une taxe similaire de 2 euros qui s’appliquerait… fin 2026. Un accord existerait déjà entre la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg et la France pour y parvenir. 

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