Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 5 septembre 2019
Société

Grenelle contre les violences conjugales : Édouard Philippe en appelle aussi à la mobilisation des élus locaux

« Je ne croyais pas avoir à dire cette phrase un jour dans une grande démocratie comme la nôtre, mais certains hommes n’arrivent pas encore à supporter que leur compagne existe autrement que pour eux. Si bien qu’aujourd’hui dans notre pays, des femmes, nos concitoyennes, meurent étranglées, poignardées, brûlées, rouées de coup, tous les deux ou trois jours. »  C’est avec ces mots forts que le Premier ministre, Édouard Philippe, a ouvert avant-hier le Grenelle des violences conjugales, à Matignon, devant un parterre de responsables associatifs, de juristes, de parlementaires, d’élus, dont le président de l’AMF, François Baroin.
Le « Grenelle »  va se dérouler sur un peu plus de deux mois (jusqu’au 25 novembre), avec une centaine de déclinaisons régionales. Il mobilisera « pleinement »  le gouvernement, a affirmé Édouard Philippe, mais ne se fera pas « sans l’expérience des associations, des parlementaires, des maires et des élus locaux ».
Dès l’ouverture du Grenelle, et sans préjuger des décisions qui seront prises à son issue, le Premier ministre a présenté un certain nombre de mesures d’ores et déjà actées. Ces mesures s’articulent autour de « trois axes : prévenir, protéger et prendre en charge, punir ».
Pour ce qui est de la prévention, le Premier ministre a annoncé la création de « 1000 nouvelles places d’hébergement et de logement temporaire »  à partir du 1er janvier prochain – hébergement temporaire qui pourra aller jusqu’à un an. L’accès des femmes en danger à la garantie locative Visale sera « facilité »  afin qu’elles puissent trouver un logement plus rapidement. Enfin, un « outil de géolocalisation »  va être mis en place pour permettre aux professionnels « d’identifier rapidement les places d’hébergement disponibles à proximité ».
Le gouvernement va « mobiliser »  cinq millions d’euros sur ces problématiques – somme que les associations de défense des femmes victimes de violence ont déjà estimé extrêmement insuffisante.
Afin de mieux protéger les victimes, le gouvernement veut généraliser la mise en place d’un bracelet électronique « anti-rapprochement »  dont le port serait imposé aux auteurs de violences dès le prononcé d’une ordonnance de protection – une mesure qui a par exemple été très efficace en Espagne.
 
Former les forces de l’ordre
Le Premier ministre a également pointé du doigt la question de l’insuffisante formation des forces de l’ordre chargées de recueillir les plaintes des victimes : « Quand une femme a le courage de porter plainte, l’accueil dans chaque commissariat et chaque gendarmerie doit être exemplaire. »  Un audit va être lancé dans quelque 400 commissariats et gendarmeries, afin de « détecter les dysfonctionnements ». La possibilité de porter déposer plainte directement dans les hôpitaux va être « généralisée », et un « retour d’expérience »  va être organisé au niveau local à l’occasion de chaque meurtre de femme par son conjoint, « afin de tirer les leçons de ce qui n’a pas fonctionné et d’améliorer les dispositifs en place ».
Autre annonce : en cas de féminicide, l’autorité parentale de l’auteur des faits sera « suspendue de plein droit »  dès la phase d’enquête ou d’instruction.

Les maires mobilisés
À l'occasion de cette réunion, François Baroin, le président de l'AMF, a fait part de la volonté de l'association de prendre toute sa part dans ce combat contre les violences faites aux femmes. Lors du prochain Congrès des maires, par exemple, le forum Égalité femmes-hommes abordera notamment la question de la lutte contre les violences. « Les maires actionnent différents leviers pour accompagner les femmes victimes de violences conjugales, a rappelé avant-hier François Baroin. De nombreuses collectivités financent des intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie (ISCG) pour mieux accueillir et orienter les victimes. Dans le cadre des Conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, des associations agissent au plus près du terrain avec le soutien des communes et des intercommunalités. » 
Sur la question de l'hébergement d'urgence, le maire de Troyes a encouragé l'idée de mettre en place des hébergements temporaires qui soient différenciés des structures d'hébergement d'urgence classiques : « Il me semble important d’offrir aux femmes victimes un accueil et un accompagnement spécifiques. Les espaces mixtes ouverts également aux SDF et aux migrants ne permettent pas d’enclencher dans les meilleures conditions le processus judiciaire comme le travail long de résilience personnelle et de reconstruction sociale. »  Enfin, le président de l'AMF a rappelé le rôle que les communes peuvent jouer dans l'éducation à l'égalité entre les femmes et les hommes, soulignant que nombre d'entre elles conduisent des actions dans ce sens,  « visant à promouvoir la non-violence, le respect, le droit des filles à s’engager dans les mêmes études et d’avoir les mêmes projets professionnels que les garçons comme les mêmes pratiques culturelles ou sportives ». 

F.L.
 

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