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Édition du jeudi 9 juin 2022
Santé publique

Transports souterrains : la réduction des concentrations de particules fines est une « nécessité », selon l'Anses

L'Agence de sécurité sanitaire met en garde contre de possibles « effets cardiorespiratoires » pour les usagers. Elle recommande notamment de renouveler les matériels et d'optimiser la ventilation pour améliorer la qualité de l'air dans les réseaux de métro alors que celui-ci y est trois fois plus chargé en particules fines qu'en surface. 

Par A.W.

L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) presse les pouvoirs publics de mieux lutter contre les concentrations de particules fines dans les réseaux souterrains de métro, de RER ou encore de tramways. 

C’est la conclusion qu’elle a émise, dans un avis publié mercredi, après avoir étudié les effets de la qualité de l'air dans les réseaux de transports souterrains, sept agglomérations étant concernées en France : Lille, Lyon, Marseille, Paris (de loin le réseau le plus important avec 624 stations et 331 km de linéaires métro et RER sur le réseau de la RATP), Rennes, Toulouse et, de manière « plus anecdotique », Rouen, dont le tramway circule en partie sous terre mais reste de « très petite taille ».

Trois fois plus de particules fines qu’en surface

En jeu, les questions de santé publique soulevées par la pollution aux particules de l’air dans les enceintes ferroviaires souterraines (EFS), alors que « des millions de personnes »  empruntent ces réseaux souterrains. Des actions en justice ont d’ailleurs déjà été engagées, comme avec l'association Respire qui a porté plainte contre la RATP, l’an passé, pour « tromperie aggravée »  et « blessures involontaires », en mettant en cause les niveaux de pollution de l'air. 

Saisie en 2019 par les pouvoirs publics afin de préciser les risques sanitaires pour les usagers exposés à cette pollution, l’Anses confirme d’abord que, dans le métro et le RER, la concentration de particules fines dans l'air est « en moyenne trois fois plus élevées que dans l'air extérieur urbain »  et « à proximité du trafic routier ». 

Une pollution qui est d'ailleurs jugée « spécifique »  à l’activité ferroviaire souterraine. Et si « plusieurs paramètres »  influencent ce niveau de pollution aux particules, les « principales sources »  sont « l’usure des matériaux due au freinage des rames et aux contacts entre le matériel roulant et la voie ferrée »  et « la remise en suspension du fait de la circulation des rames ».

Effets cardiorespiratoires « possibles » 

Au regard des données épidémiologiques et toxicologiques disponibles, les auteurs de l’étude estiment qu’il « n’apparaît pas faisable d’élaborer […] des valeurs guides de qualité de l’air intérieur (VGAI) spécifique(s) à l’exposition des usagers », une des missions pour laquelle l’Agence avait été saisie.

Cependant, et bien que l’état actuel des connaissances soit « trop limité pour pouvoir tirer des conclusions fermes sur d’éventuels effets sanitaires de l’exposition des usagers à la pollution de l’air », l’Agence met en garde sur « la possibilité d’effets cardiorespiratoires »  compte tenu de plusieurs modifications biologiques observées (« effets sur la fonction cardiaque autonome », « inflammation et stress oxydant systémiques »  ou encore « inflammation des voies respiratoires » ). Selon les auteurs de l'étude, « les populations les plus sensibles »  telles que « les personnes asthmatiques »  pourraient être particulièrement concernées.

Pour rappel, en 2015, l’Anses avait publié des travaux d’expertise ciblant les travailleurs (et pas les usagers) exerçant dans ces enceintes souterraines qui avaient permis de conclure à « une inflammation des voies respiratoires et des effets consécutifs probables en lien avec une exposition chronique aux particules des EFS, ainsi qu’à des effets délétères attendus sur la santé cardio-respiratoire par analogie avec les risques sanitaires des particules de l’air ambiant extérieur ».

De nouveaux systèmes de freinage

Au vu de ces observations, l’Anses confirme « la nécessité »  de réduire les concentrations des particules en suspension dans l’air « en visant des niveaux les plus bas possible ». Elle encourage donc les opérateurs à poursuivre les actions limitant les expositions des usagers telles que le renouvellement des matériels roulants, l’utilisation de systèmes de freinage qui émettent moins de particules ainsi que l’amélioration de la ventilation des enceintes souterraines.

En outre, l’Agence propose la mise en place de nouveaux indicateurs de suivi pour renforcer la surveillance de la qualité de l’air et contribuer à « évaluer l’efficacité des actions de réduction à la source ». Des indicateurs qui sont destinés à « situer l’exposition des usagers […] et non celles des travailleurs ». Ceux-ci sont « applicables sur chaque réseau selon une durée caractéristique des trajets de leurs usagers »  et intègrent « les expositions sur une journée dans différents environnements (à la maison, au travail et dans les transports) ».

L’Anses recommande également des concentrations en particules dans l’air qui ne dépassent pas, « a minima », les normes fixées par l’OMS et par une directive européenne datant de 2008.

Dans ce cadre, on peut rappeler qu’Île-de-France Mobilités (l'autorité organisatrice de la mobilité de la région capitale) a lancé, fin mai, un plan d'action pour améliorer la qualité de l'air dans les stations de métro et RER. De nouveaux points de mesures sont prévus, notamment sur les particules ultra-fines, dont les résultats seront publics. 

La RATP a, elle, lancé des tests dans le RER sur de nouvelles garnitures de frein, dont les résultats préliminaires seraient « très prometteurs »  puisqu’ils afficheraient « une réduction de 90 %  »  des émissions de particules. Des investissements de 57 millions d'euros sont en outre prévus pour la ventilation. Des expérimentations sont également en cours, en régions, sur le freinage électronique ou la filtration de l'air.

Télécharger l'avis.


 

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