Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 4 octobre 2021
Santé publique

27 000 lits d'hospitalisation complète fermés entre 2013 et 2020

Selon une étude émanant du ministère de la Santé lui-même, le nombre de lits d'hospitalisation complète a continué à fortement reculer en 2020, tout comme le nombre d'établissements. Un constat préoccupant, au moment où maires et associations dénoncent, une fois de plus, la désertification médicale. 

Par Franck Lemarc

Maire-Info
© CH Montceau-les-Mines

C’est un hasard du calendrier, mais il tombe particulièrement mal : moins d’une semaine après la parution, dans le Journal du dimanche, d’une tribune signée par « huit associations d’élus et de professionnels de santé »  pour dénoncer la désertification médicale, la Drees (direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) a publié une étude mettant en évidence la diminution du nombre de lits… en pleine épidémie de covid-19.

« La crise s’amplifie » 

La tribune, signée notamment par l’AMRF (maires ruraux) et Villes et banlieue, exige que l’accès aux soins soit « garanti partout et pour tous ». Les signataires « font le constat que notre système de santé est en danger, mis à mal par trente ans de choix politiques inappropriés et par une désertification sanitaire qui ne cesse de s’étendre ». Les signataires affirment que « 10 % de la population française n’a plus de médecin traitant »  et que « 6 millions de nos concitoyens vivent à plus de 30 mn d’un service d’urgence, dont 75 % en milieu rural », ce qui a pour effet de « creuser de deux ans la différence d’espérance de vie entre les habitants des villes et ceux des campagnes ». « Touchant à présent tous les départements, la crise s’amplifie sans qu’aucune solution satisfaisante ne soit déployée », écrivent les auteurs de la tribune, qui appellent les pouvoirs publics et « les candidats à la présidentielle »  à « s’engager »  sur ce sujet. 

Fermetures d’établissements

Les statistiques publiées par la Drees ne seront pas de nature à les rassurer. Certes, le titre de l’étude est plutôt positif : « Entre fin 2019 et fin 2020, la capacité d’accueil hospitalière a progressé de 3,6 % en soins critiques et de 10,8 % en hospitalisation à domicile. »  Mais c’est l’arbre qui cache la forêt : le nombre de lits, c’est-à-dire la capacité en hospitalisation complète, a diminué de 1,5 % entre fin 2019 et fin 2020. 

Premier constat dressé par la Drees : « Le nombre d’établissements hospitaliers continue de décroître ». Il existait, fin 2020, 2 983 « structures hospitalières »  en France, dont 1 342 établissements publics (centres hospitaliers régionaux, centres hospitaliers et centres hospitaliers spécialisés). La Drees comptabilise également 974 cliniques privées.

En 2020, 25 établissements publics ont fermé, « sous l’effet des réorganisations et des restructurations ». Cette diminution est constante depuis 2014 : ce sont pas moins de 78 établissements qui ont fermé pendant la période 2014-2020. La baisse du nombre d’établissements touche aussi les cliniques privées (46 établissements fermés pendant la même période). Le phénomène, signale la Drees, s’est accéléré ces deux dernières années.  

Accélération des fermetures de lits

Quant au nombre de lits (c’est-à-dire de place d’hospitalisation complète), il a donc diminué de 1,5 % entre 2019 et 2020, poursuivant une tendance constante depuis 2013 : en sept ans, ce sont 27 000 lits qui ont été fermés, soit une baisse de 6,5 %. En cause : « La volonté de réorganiser l’offre dans un contexte de virage ambulatoire », écrit la Drees, mais aussi « les contraintes de personnel (qui) ne permettent pas de maintenir les lits ». Autrement dit, les constantes suppressions d’emplois au sein de la fonction publique hospitalière finissent, mécaniquement, par rendre les services incapables de maintenir les lits. 

Le nombre de lits fermés en 2020 est plus important que pendant les années précédentes. Cela s’explique, souligne la Drees, par le contexte épidémique : plusieurs services ont été contraints de fermer des lits pour dégager des capacités au bénéfice des services de réanimation et de nombreuses hospitalisations ont été déprogrammées. 

Logiquement, la diminution du nombre de lits d’hospitalisation complète se traduit par l’augmentation des places en hospitalisation partielle : leur nombre a progressé de 1,7 % en 2020. 

L’épidémie a également eu des conséquences évidentes sur les capacités d’accueil en soins critiques : de nombreux établissements ont dû « pousser les murs »  pour créer des lits de « réa »  en catastrophe : 700 lits de soins critiques supplémentaires étaient disponibles dans le pays fin 2020 par rapport à l’année précédente (+ 3,6 %). 

On le voit, la question de la désertification hospitalière ne semble pas près d’être résolue, malgré les alertes lancées depuis des années par les associations d’élus, AMF en tête. 

À noter qu’au congrès de l’AMF, le jeudi 18 novembre, un forum sera consacré à l’action des maires pour la santé des habitants. Si ce forum n’est pas directement consacré à la question de la désertification médicale, il permettra de faire le point sur les leviers dont disposent maires et présidents d’intercommunalité pour faire « de la prévention en santé ». 

Accéder à l’étude de la Drees.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2