Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 10 décembre 2021
Restauration collective

Égalim et commande publique : deux guides pour faciliter les achats de produits de qualité

Alors qu'il ne reste plus que quelques jours pour respecter les quotas Égalim de produits de qualité et de bio dans les cantines, les outils pour aider les communes à atteindre ces objectifs se multiplient. Deux nouveaux guides d'aide à la commande publique sont disponibles en ligne.

Par Emmanuel Guillemain d'Echon

Élus et associations avaient largement protesté : à son adoption, la loi Égalim imposait aux collectivités toute une série de mesures certes louables, mais sans les aider financièrement ou même techniquement (lire Maire info des 6 juillet et 3 octobre 2018). Il avait fallu plus de six mois pour avoir une liste par décret - encore incomplète - des produits concernés par le quota de 50 % de produits de qualité, pourtant réclamé dès le mois de janvier 2022 (lire Maire info du 24 avril 2019).

Mais le travail de collaboration entre État, collectivités, acteurs commerciaux, associatifs et civils de la restauration collective, réunis au sein du Conseil national de la restauration collective (CNRC), lancé en 2019, a porté ses fruits. Après la publication, l’an dernier, d’un livret de recettes végétariennes, au moment même de l’entrée en vigueur de l’obligation d’un repas végétarien par semaine (lire Maire info du 27 novembre 2020), le site macantine.fr, lancé au printemps en version bêta, continue à être enrichi de ressources intéressantes, issues des travaux du CNRC, pour aider les gérants de la restauration collective à respecter la loi Égalim.

Dernière brique, publiée fin novembre sur le site : deux guides à la commande publique de denrées correspondant aux quotas de la loi qui demande, à partir du 1er janvier prochain, de servir des repas comportant (en valeur) 50 % de « produits de qualité et durables » , avec un minimum de 20 % issus de l’agriculture biologique - le premier, pour les cantines en régie, le deuxième pour les communes qui ont recours à un prestataire en délégation de service public (DSP).

Une liste détaillée des produits « de qualité et durables » 

Ces documents très fournis rappellent tout d’abord le cadre légal, y compris les apports de la loi Climat et résilience, qui réduit la durée de prise en compte dans les 50 % des denrées provenant d’exploitations agricoles en certification environnementale de niveau 2, et impose un quota supérieur pour les viandes et les poissons (ils devront être à 60 % « de qualité et durables »  à partir de 2024).

La liste des produits concernés, qui a évolué au fil des discussions avec les acteurs du secteur, est présentée avec de nombreuses précisions : il y a donc le quota de 20 % minimum d’aliments bio, ce qui peut inclure des produits issus d’exploitation en conversion, mais seulement pour les « produits végétaux »  ; les labels ou mentions classiques - Label rouge, appellation d’origine (AOC/AOP), indication geographique (IGP), Specialite traditionnelle garantie (STG), mention « issu d’une exploitation a Haute Valeur Environnementale »  (HVE), mention « fermier »  ou « produit de la ferme »  ou « produit à la ferme » , ce « uniquement pour les produits pour lesquels existe une definition reglementaire des conditions de production »  (c’est-à-dire, à ce jour, les œufs, les fromages et certaines viandes labellisées), ecolabel Peche durable, logo « Région ultraperipherique »  (RUP) ; les produits issus du commerce equitable, encore exclus de la liste l’an dernier (lire Maire info du 12 février 2020), y ont finalement été ajoutés.

Toujours pas de solution juridique pour se fournir localement

En revanche, les guides ne fournissent toujours pas de définition précise pour la catégorie très cryptique, et qui avait fait couler beaucoup d’encre lors de l’adoption de la loi, des « produits acquis selon des modalités prenant en compte les coûts imputés aux externalités environnementales liées au produit pendant son cycle de vie » . À l’origine, elle était censée permettre de contourner l’interdiction faite par la réglementation européenne de mentionner le caractère « local »  d’un produit dans les critères de choix d’une offre de marché public. Le guide rappelle qu’il « n’existe pas de référentiel ni de méthodologie officiels »  pour traduire ces modalités, qui peuvent par exemple renvoyer aux coûts « des émissions de gaz a effet de serre (...) ainsi que d’autres coûts d’attenuation du changement climatique » . Visiblement, le ministère ne compte pas en proposer de sitôt : « Les modalités d’une telle sélection ne seront pas abordées dans ce document » , expliquent les guides, qui renvoient à la « responsabilité de l’acheteur ».

En revanche, le CNRC compte bien apporter à l’avenir, dans une mise à jour des guides, une analyse « technico-juridique »  d’une autre catégorie de produits éligibles qui reste confuse, celle des « produits dont l’acquisition a été fondée principalement sur la base de leurs performances en matière de protection de l’environnement et de développement des approvisionnements directs de produits de l’agriculture » . Il s’agit, pour être plus clair, d’un critère d’attribution prévu par le code de la commande publique, qui, expliquent les auteurs, pourrait répondre à la volonté de s’approvisionner en « circuits courts » , notion qui n’est pas définie juridiquement, et qui se rapporte non pas à la proximité géographique, mais à l’absence d’intermédiaire (un au maximum) entre le producteur et l’acheteur.

Une aide très pointue à la rédaction des marchés publics

La nouveauté principale de ces guides, qui intéressera les acheteurs n’ayant pas le temps ou la compétence pour écrire des marchés qui soient irréprochables sur le plan juridique, ou qui ne savent simplement pas par où commencer pour rentrer dans les clous de la loi Égalim, c’est la partie très pratique qui les guide dans la démarche du début à la fin. Cela commence par la manière d’établir un état des lieux des produits déjà achetés, avant d’enchaîner sur le repérage des producteurs et fournisseurs permettant de remplir les quotas (le « sourcing » ) , puis sur l’élaboration d’une stratégie d’achat et enfin la rédaction des marchés en elle-même, avec la procédure d’allotissement, permettant de les ouvrir aux petits producteurs locaux (voire de les favoriser), mais aussi des recommandations très détaillées sur la formulation des critères de choix des offres, leur pondération (combien le critère pèse dans la note attribuée à l’offre), et des exemples d’éléments d’appréciation de ces critères.

La version dédiée aux cantines en délégation de service public (DSP) est un peu moins étoffée, mais propose des conseils de suivi plus spécifiques à la relation avec un prestataire, et détaille certaines procédures spécifiques, comme les marchés à procédure adaptée (MAPA).

Le CNRC rappelle que la loi Égalim a prévu, à partir de l’an prochain, de transmettre chaque année au Parlement un bilan statistique sur la mise en œuvre des quotas de produits de qualité dans les cantines (rappelons qu’il y a un an, seules 36 % des collectivités interrogées par l’AMF estimaient être en mesure de les respecter en 2022 – cf. Maire info du 10 décembre 2020) ; mais là encore, le législateur comme l’État ont omis de préciser la manière dont devait être compilé ce bilan. Un groupe de travail du CNRC s’est donc attelé à définir « les données nécessaires (…) et les modalités de leur transmission, qui devraient être fixées par un arrêté » , dont la date de sortie n’a pas encore été annoncée ; à suivre donc.

Télécharger le guide Égalim de l’achat public pour les cantines en régie.

Télécharger le guide Égalim de l’achat public pour les cantines en délégation.

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