Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mardi 28 novembre 2023
Budget de l'état

PTZ décentré, fiscalité des meublés touristiques revue... : les sénateurs amendent le budget pour 2024

Les sénateurs ont également apporté un soutien à la voirie locale et supprimé la réforme de la redevance de l'eau dans le cadre de l'examen, en première lecture, du projet de loi de finances pour 2024.

Par A.W.

Maintien du PTZ sur tout le territoire, suppression de l’avantage fiscal des meublés touristiques, soutien à la voirie locale… Les sénateurs ont entamé, la semaine dernière, l’examen en séance du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 par une série de mesures favorables aux collectivités.

Alors que le gouvernement a dû recourir par deux fois à l'article « 49.3 »  de la Constitution à l’Assemblée, sur les première et seconde parties du texte, pour faire adopter sans vote son projet de budget, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, avait dit attendre des sénateurs « des propositions d'économies supplémentaires ».

La « chambre des territoires »  s’est surtout particulièrement attardée sur une série de dispositions en direction des collectivités locales.

Meublés de tourisme : l’avantage fiscal supprimé

Les sénateurs ont ainsi décidé d’aller plus loin que le gouvernement sur un sujet qui inquiètent sérieusement les maires et qui est considéré comme la « bombe sociale »  du moment : le logement.

Afin de contrecarrer la crise majeure que connaît le secteur, ils ont décidé de taper plus fort sur la fiscalité des meublés touristiques, jugée trop avantageuse et responsable de la pénurie de logements pour les locaux dans certaines parties du pays. Ils ont donc choisi d’aligner le régime fiscal des locations de meublés de tourisme sur celui des « locations nues »  avec l’application d’un abattement de 30 % dans la limite de 15 000 euros de recettes. Un régime dérogatoire serait, toutefois, maintenu dans les zones rurales avec un taux d’abattement de 51 %. 

Si « les propositions du gouvernement [adoptées à l’Assemblée] vont dans le bon sens »  (un abattement de 50 % dans la limite de 77 700 euros et 71 % en zone rurale), elles restent « insuffisantes pour remettre sur le marché des logements qui seraient affectés à la résidence principale », explique ainsi le sénateur des Pyrénées-Atlantiques Max Brisson (LR), dans son amendement, tout comme ceux identiques des élus centristes, socialistes ou encore communistes.

La chambre haute a également décidé d’assujettir les locations de meublés de tourisme à la TVA, comme c’est le cas dans l’hôtellerie. Le gouvernement s’est opposé sans surprise à ces deux mesures, la commission des finances ayant de son côté demandé, en vain, leur retrait.

Le PTZ maintenu sur tout le territoire

Autre mesure qui n’a, là aussi sans surprise, guère emporté le soutien de l’exécutif, le maintien du prêt à taux zéro (PTZ) pour l'acquisition d'un logement neuf sur l'ensemble du territoire.

A travers une kyrielle d’amendements issus de différents groupes politiques, les sénateurs ont donc décidé de proroger le dispositif jusqu’en 2027 « dans sa forme actuelle »  en supprimant le recentrage (sur les seuls « logements neufs en collectif »  dans les zones tendues ou sur « les logements anciens sous conditions de rénovation »  en zone détendue) souhaité par le gouvernement. Un recentrage qui « empêcherait, par exemple, de financer la construction de maisons individuelles »  alors même que les chiffres de la construction sont « très alarmants, puisqu’à fin juillet, sur un an, les ventes de maisons neuves étaient en chute de 40 % ».

Afin d’inciter les propriétaires de friches industrielles à notamment les céder aux pouvoirs publics « à prix corrects »  pour réaliser des projets divers (habitat, renaturation, parcs économiques), les sénateurs ont aussi décidé d’étendre la taxe sur les friches commerciales aux friches industrielles. Une mesure qui doit permettre aux collectivités territoriales de « définir une stratégie fiscale tendant à favoriser les requalifications des zones économiques délaissées ».

Ruralité, soutien à la voirie locale, redevance de l'eau...

Toute une série d’amendements ont ciblé le classement en zones France Ruralité Revitalisation (FRR), qui intègrent les ZRR, avec comme mesure principale l'extension du dispositif à 4 000 nouvelles communes. 

Le Sénat a notamment élargi aux communes de la Guadeloupe et de la Martinique le bénéfice du nouveau zonage unique et intégré une disposition spécifique pour les zones de montagne. Il a également redéfini les critères de revenus et limité le classement en zones FRR et FRR + aux communes de moins de 20 000 habitants. Sont incluses également « les communes de moins de 30 000 habitants lorsque la densité de population du département est inférieure à 33 habitants par kilomètre carré et que son revenu médian disponible par unité de consommation est inférieur à la médiane des revenus médians disponibles par unité de consommation par département ».

La chambre haute a, par ailleurs, adopté une extension du FCTVA aux investissements dans l'immobilier de soins pour toutes les communes rurales. 

S’agissant de la voirie, les sénateurs ont choisi d’affecter une part du produit de la nouvelle taxe sur l’exploitation des infrastructures de transport de longue distance aux départements et aux communes, à hauteur de 50 millions d’euros chacun, pour contribuer au financement de l’entretien des voiries départementales et communales.

Ils ont également supprimé la réforme des redevances de l’eau, celle-ci ne présentant pas « suffisamment de garanties »  pour les acteurs qui sont redevables ou qui gèrent ces redevances. « Comme il est prévu que la réforme entre en vigueur au 1er janvier 2025, cet amendement de suppression invite le gouvernement à poursuivre les discussions en 2024 », expliquent les sénateurs.

Dotation et chèques énergie

Plusieurs dispositions visant l’énergie ont également été adoptées. Le Sénat a d’abord voté la suppression du « bouclier tarifaire »  sur l'électricité au profit du déploiement de « chèques énergie »  ciblés en direction des ménages les plus modestes. Le gouvernement s'y est opposé.

Concernant les collectivités, il a décidé de verser une dotation de 10 euros par habitant aux EPCI ayant adopté un PCAET et de 5 euros par habitant aux régions ayant adopté un SRADDET. Et ce via « l’affectation d’une fraction de l’accise sur les énergies ». 

« Le versement de cette dotation pourrait être conditionné par des engagements concrets des collectivités bénéficiaires sur leurs actions en faveur de la transition écologique et énergétique, au travers des futurs contrats de réussite de la transition écologique (CRTE) annoncés par le gouvernement », expliquent les auteurs de l’amendement, qui soulignent que « cette ressource, connue d’avance, sera d’une plus grande efficacité que des crédits accordés via des appels à manifestation d’intérêt dans le cadre du fonds vert ».

Par ailleurs, la « chambre des territoires »  a voté un amendement visant à étendre aux abonnements et à la fourniture de froid renouvelable le taux réduit de TVA réduit de 5,5 % actuellement applicable aux abonnements et à la fourniture de chaleur renouvelable. 

« Le développement des réseaux de froid doit en effet être plus largement soutenu pour adapter les territoires et protéger les populations face au réchauffement climatique, tout en limitant le recours à la climatisation individuelle, source d'îlots de chaleur et émettrice de gaz à effet de serre », explique le sénateur de Saône-et-Loire, Fabien Genet (apparenté LR), au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Selon lui, « un réseau de froid consomme 90 % de fluide frigorigène en moins et émet en moyenne 50 % d'électricité et de dioxyde de carbone en moins qu'une série de climatiseurs individuels ».

DGF augmentée en commission

Alors que le vote solennel sur ce texte est prévu le 12 décembre, on peut rappeler que les sénateurs avaient adopté, en commission, une enveloppe exceptionnelle de 100 millions d'euros pour les départements, confrontés à une forte dégradation de leur situation financière (à cause de la chute des DMTO notamment). Une disposition qui avait été adoptée dans le projet examiné à l’Assemblée, mais non retenue dans le texte envoyé au Sénat après l’utilisation du « 49.3 ».

En commission toujours, ils avaient également décidé d’une augmentation de la DGF de 70 millions d’euros - afin d’abonder la dotation d’intercommunalités (60 millions d’euros) et la dotation de péréquation des départements (10 millions d’euros) - et de la suppression des minorations de la dotation de compensation de la réforme de la taxe professionnelle (DCRTP) et des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle (FDPTP) à hauteur de 67 millions d’euros. A suivre donc.
 

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