Maire-info
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Édition du lundi 22 janvier 2024
Logement

Projet de loi habitat dégradé : début aujourd'hui des débats sur un texte largement amendé en commission

L'examen en séance publique, à l'Assemblée nationale, du projet de loi sur le traitement de l'habitat indigne débute aujourd'hui. Le texte présenté par le gouvernement a été amendé en commission, avec l'ajout de certaines dispositions allant dans le sens des demandes des associations d'élus. 

Par Franck Lemarc

Le projet de loi sur le traitement de l’habitat indigne vise, notamment, à réduire les délais de mise en œuvre des opérations de rénovation lourde des copropriétés dégradées, en donnant aux collectivités « des outils pour intervenir plus vite et plus en amont ». 

Sans revenir sur l’ensemble des dispositions de ce texte touffu, détaillé dans Maire info le 13 décembre dernier, rappelons que ce texte devrait permettre de créer une nouvelle procédure d’expropriation simplifiée des immeubles insalubres ou dégradés de façon « irrémédiable ». Le texte clarifie également le régime de « préemption renforcée »  et prévoit d’améliorer la connaissance du parc des copropriétés dégradées en ajoutant dans le registre national d’immatriculation des copropriétés les données du DPE (diagnostic de performance énergétique). 

Les amendements votés en commission

En commission, une centaine d’amendements a été ajoutée à ce texte, certains répondant à des demandes de l’AMF. C’est notamment le cas des amendements concernant les sanctions contre les marchands de sommeil – l’association s’était émue de ce que rien ne figure sur ce sujet dans le texte initial. Un amendement porte à 200 000 euros d’amende et 7 ans de prison la sanction contre « le fait de mettre à disposition d’une personne, moyennant une contrepartie, un hébergement incompatible avec la dignité humaine »  ; un autre prévoit de punir d’un an de prison et 20 000 euros d’amende le fait de louer à une personne un logement sans contrat écrit et avec paiement du loyer de la main à la main. 

Un important amendement donne de nouveaux pouvoirs au maire sur le traitement des constructions « irrégulièrement édifiées »  et présentant « un risque sécuritaire » : cette disposition permettrait aux maires de prononcer, sous contrôle du juge, « la démolition d’office de cette construction ». Jusqu’à présent, le maire ne pouvait que prononcer une mise en demeure, sans avoir de réels moyens de la faire appliquer. L’amendement, travaillé avec l’AMF, permettra aux maires d’intervenir très en amont, non seulement pour préserver la sécurité des personnes et des biens mais également pour « garantir l’effectivité de la nécessaire maîtrise, par les collectivités publiques, de l’occupation des sols et du développement urbain ». 

La commission a également souhaité introduire dans le texte une disposition permettant de faciliter le relogement des personnes délogées à l’occasion d’opérations de lutte contre l’habitat indigne. Dans le cadre de ces opérations, il deviendrait possible de bâtir des constructions temporaires sans autorisation d’urbanisme, pour une durée de cinq ans au plus. Cette construction serait soumise à l’avis du maire. 

Au sujet de la « connaissance collective »  de l’état du parc immobilier, un amendement a été voté qui permet au maire de « définir des secteurs dans lesquels est obligatoire pour tout immeuble bâti la réalisation, au moins une fois tous les dix ans, d’un diagnostic structurel de l’immeuble incluant une description des désordres observés et évaluant les risques qu’ils présentent pour la sécurité des occupants et celle du voisinage ». Un sous-amendement a ensuite modifié cette disposition pour confier la définition de ces secteurs non au seul maire, mais au PLU, selon la procédure de modification simplifiée. En effet, soulignent les auteurs de l’amendement, « la délimitation de zonages et secteurs d’urbanisme imposant des prescriptions aux immeubles bâtis ou à construire doit relever des documents du PLU ou PLUi ». 

Il est à noter, en revanche, que les députés n’ont pas fait évoluer le texte sur un sujet demandé par l’AMF : l’accompagnement financier de l’État pour soutenir les travaux engagés par les collectivités. En revanche, répondant en partie à une demande de l’AMF concernant les avances de fonds, un amendement a été adopté pour créer « une nouvelle formule d’emprunt en faveur des copropriétés, destinée à financer spécifiquement des travaux dits d’intérêt général. » 

Amendements gouvernementaux

Le texte va être débattu à partir d’aujourd’hui et jusqu’à jeudi en séance publique. Il devrait encore évoluer, puisque plus de 300 amendements ont été déposés, dont une vingtaine ont été déposés par le gouvernement.

Un certain nombre de ces amendements gouvernementaux porte sur le nouvel « emprunt collectif »  ajouté en commission par les députés. Bonne nouvelle, le gouvernement prévoit apparemment, au-delà de cette nouvelle possibilité d’emprunt, « d’élargir le champ d’intervention du fonds de garantie de la rénovation énergétique à l’ensemble des travaux de rénovation des copropriétés en difficulté, et pas uniquement aux travaux de rénovation énergétique ». 

Un autre amendement du gouvernement semble intéressant : il prévoit que les communes ou EPCI compétents puissent habiliter un « opérateur spécialisé »  (par exemple un établissement public foncier) pour conclure « avec un syndicat de copropriétaires connaissant des difficultés financières, une convention par laquelle celui-ci lui achète son terrain tout en lui laissant la pleine propriété du bâti ». Le produit de la cession devrait permettre aux copropriétés de réaliser des travaux de rénovation et d’entretien. 

Enfin, le gouvernement ne rejette pas les dispositions concernant le « diagnostic structurel », mais propose de récrire le nouvel article 8 bis pour préciser ces dispositions et « rendre le dispositif plus opérationnel ». Ce ne serait ni « le maire »  ni « le PLU »  qui seraient chargés de définir les secteurs dans lesquels ces diagnostics doivent être réalisés, mais « la commune ». Ce diagnostic ne s’appliquerait qu’aux immeubles de plus de 15 ans et ne concernerait que « la solidité de l’immeuble ». Enfin, le gouvernement souhaite que cette obligation soit satisfaite par « l’élaboration d’un projet de plan pluriannuel de travaux pour les copropriétés dans lesquelles la réalisation de ce dernier est obligatoire, dans la mesure où le projet de plan pluriannuel de travaux comporte des volets relatifs à la sauvegarde de l’immeuble et à la sécurité des occupants ». 

Accéder au texte de la commission.

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