Quartiers prioritaires : après un nouveau report du comité interministériel, les associations d'élus pressent le gouvernement
Par A.W.
Sept associations d'élus du bloc communal ont pressé, hier, le Premier ministre à reprogrammer « le plus rapidement possible » un Comité interministériel des villes (CIV), après l'annonce d'un nouveau report de ce rendez-vous qui doit permettre de fixer les nouvelles priorités de la politique de la ville.
L’objectif étant de résorber les inégalités entre les quartiers prioritaires (QPV) et le reste du territoire. Que ce soit en termes d’éducation, de sécurité, de logement, de santé, d’emploi… Mais malgré « l'urgence de la situation », le gouvernement est accusé depuis le début de l’année de « manque d’ambition » en la matière.
La situation va « s’aggraver »
« Alors que les acteurs publics et associatifs s'inquiètent de la pérennité de leurs actions en faveur des 6 millions d'habitants des quartiers prioritaires, c'est un très mauvais signal envoyé par le Premier ministre qui s'inscrit malheureusement dans la droite lignée de ce que nous constatons sur le terrain depuis des mois », déplorent, dans un communiqué commun publié hier, l’AMF, Villes & Banlieue, l'Association des maires d'Ile-de-France (Amif), l'Association des petites villes de France, France urbaine, Villes de France et Intercommunalités de France.
Selon les associations, « l'histoire se répète » puisque l’exécutif reproduit ce qui s’était passé lors du CIV de Chanteloup-les-Vignes, en 2023, qui « avait également fait l'objet de plusieurs reports », notamment après les émeutes de l'été – et dont les résultats sont jugés particulièrement décevants. Initialement prévu le 17 avril puis le 15 mai à Montpellier, ce nouveau comité interministériel pourrait finalement avoir lieu le 6 juin prochain, a laissé entendre l'entourage de la ministre déléguée à la Ville Juliette Méadel.
Les élus locaux sont d’autant plus inquiets que « les informations reçues dans les départements concernant le budget 2025 font apparaître une baisse des divers financements ». Sans compter que l'annulation de 3 milliards d'euros de crédits dans le budget 2025 a déjà grevé 15 millions d'euros sur l'enveloppe politique de la ville. Ce qui va « aggraver la situation dans nos quartiers urbains populaires, qui n'ont de "prioritaires" que le nom », estiment les associations d'élus, celles-ci soulignant que « les suppressions de crédits rendent plus que jamais nécessaire la mobilisation des moyens du droit commun ».
Maintenir les financements de l’Anru
Lors de la mobilisation nationale des maires et des élus locaux, le 13 mars dernier à Épinay-sous-Senart, ces derniers avaient déploré le creusement des inégalités territoriales et la paupérisation de leurs habitants. Ils avaient ainsi rappelé « le besoin urgent d'actions fortes » pour que les habitants des quartiers prioritaires aient « accès aux mêmes droits et services que l'ensemble des citoyens de la République ».
« Éloignement des services publics, freins à la mobilité et à l’emploi, inégalités territoriales en termes d’accès aux soins ou d’écoles, insécurité, habitat dégradé, sont autant de difficultés que subissent au quotidien les quartiers de nos villes. À cela s’ajoute la précarité croissante des habitants de ces quartiers », expliquait ainsi l’AMF dans un communiqué publié à l’époque, dans lequel elle constatait que « la situation se dégrade fortement ». Raison pour laquelle, elle réclamait la préservation des financements de l’Anru.
« Nous craignons particulièrement l'extinction silencieuse de la politique de renouvellement urbain alors même que les attentes n'ont jamais été aussi grandes pour transformer nos quartiers », avait également averti Gilles Leproust, président de Ville et Banlieue.
Une crainte intervenue peu avant que Bercy annonce vouloir « faire du ménage » dans l’organisation de l’État en « fusionnant ou supprimant », « d'ici la fin de l'année », « un tiers des agences et des opérateurs ». Une nouvelle mesure d’économies qui peut être un motif d'inquiétude pour les élus puisque certaines agences les concernant au premier chef restent prises pour cible, et notamment l’Anru placée visiblement dans le collimateur de certains sénateurs.
Un plan européen sur le logement abordable
« Il est temps pour l'État de prendre en compte les 15 propositions concrètes que nous avions faites dans le cadre de l'Appel » d'Épinay, estiment ainsi les sept associations d’élus.
Lors de la réunion préliminaire au CIV qui s’est tenue début avril avec les associations d’élus, les débats organisés en présence d'une petite centaine de maires avaient porté sur les trois priorités fixées par la ministre de la Ville : l'enfance et l'adolescence, la tranquillité publique et le développement économique des quartiers au bénéfice des femmes.
Les maires présents avaient notamment insisté sur l'importance des Cités éducatives, la nécessité de mieux accompagner au quotidien les familles monoparentales, mais aussi pointé du doigt les coupes budgétaires à l'œuvre dans la prévention et les dispositifs de médiation ou la carence des quartiers populaires en lieux d'accueil de la petite enfance. Ils avaient, entre autres, alerté de l'importance de faire coïncider la carte des QPV avec celles des écoles classées « réseau d'éducation prioritaire » (REP) pour garantir un meilleur ciblage des interventions.
D’autres réunions ont eu lieu avec les représentants du monde économique, les bailleurs sociaux et des associations, ces dernières ayant notamment suggéré d'obliger les collectivités à réserver du foncier pour les associations et les activités commerciales dans les QPV.
À noter qu’une délégation de maires – l’Alliance européenne des maires pour le logement – était, hier, à Bruxelles pour présenter ses propositions visant à lutter contre la crise du logement qui frappe le continent. Ils ont ainsi demandé la création d'un fonds de 300 milliards d'euros dédié à la construction et la rénovation de logements abordables, et en particulier des logements sociaux et publics.
Malgré leurs propositions jugées « concrètes et bonnes », le commissaire européen en charge de ce sujet a estimé qu’il était encore « trop tôt » pour savoir quelles mesures seraient incluses dans le plan européen qu’il prépare sur cette question.
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