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Édition du mercredi 17 janvier 2024
Logement

Plus de 3 millions de logements vacants recensés en France, en hausse de 60 % depuis 1990 

Alors que la France traverse une importante crise du logement, les habitations inoccupées représentent désormais plus de 8 % du parc immobilier, selon une étude de l'Insee. Une part qui reste plus importante dans les espaces en « déprise démographique ».

Par A.W.

Le nombre de logements vacants en France n'a cessé de croître depuis une vingtaine d’années, notamment dans les villes moyennes. Ce chiffre a ainsi progressé de 60 % depuis 1990, avec près de 1,2 million d’habitations inoccupées supplémentaires dans le pays, constate l'Insee, dans une étude qui a entraîné plusieurs appels à réquisition dans la foulée de sa publication.

Avec 3,1 millions de logements vacants, la France possède désormais 8,2 % de son parc total de logements vides, contre 7,2 % il y a encore 30 ans, selon l’Institut, qui souligne que la part de ces logements vacants est plus importante dans les espaces en « déprise démographique ».

Forte hausse entre 2005 et 2017

Une progression qui est essentiellement intervenue « à partir de 2005 ». Avant cette année, le nombre de logements vacants avait diminué et était même repassé « sous la barre des 2 millions ». Depuis lors, un rebond important a été observé et l’augmentation a atteint les 2,5 % en moyenne par an avec un pic à « +3,3 % par an en moyenne »  entre 2005 et 2017, période durant laquelle le nombre de ces logements inoccupés a progressé de 47,3 %.

Résultat, le nombre de logements vacants a ainsi augmenté « 2,3 fois plus vite »  que le nombre total de logements entre 2005 et 2023.

« Les causes de ces évolutions sont multiples, certaines étant directement mesurables comme l’évolution de la population et de la construction. D’autres causes potentielles le sont plus difficilement, comme les effets de la conjoncture économique ou les évolutions fiscales et réglementaires qui influent sur les pratiques des particuliers et des promoteurs », expliquent les auteurs de l’étude.

Départements ruraux davantage touchés

Si cette hausse de la vacance concerne « presque tous les départements », à l’exception de ceux de Corse et de l’Hérault, elle augmente plus rapidement dans les départements où elle était déjà élevée par le passé.

« Les départements ruraux de France métropolitaine situés le long de la diagonale des faibles densités, parfois dénommée “diagonale du vide”, ainsi que l’Orne, sont particulièrement touchés par la vacance », observe l’Insee.

Dans neuf départements de France métropolitaine (la Creuse, la Nièvre, les Ardennes, le Cher, l’Yonne, l’Indre, la Meuse, l’Orne et les Vosges), le taux de vacance des logements a ainsi augmenté de plus de 2,5 points entre 2009 et 2020 et atteint ou dépasse 11 %. Dans les départements d’outre-mer, la situation est encore plus marquée avec une hausse particulièrement forte en Martinique (+ 3,4 points), et dont « le taux de vacance est le plus élevé de France (16,1 %), devant la Creuse (15,9 %) et la Guadeloupe (15,1 %) ».

À l’inverse, la vacance des logements est moins forte dans les départements alpins et ceux situés le long de l’Atlantique et en Île-de-France (hors Paris). Dans ces départements, « la population a augmenté au cours de la période », constatent les auteurs de l’étude, qui notent que, « en moyenne, la hausse est plus forte dans les territoires où la population diminue et plus faible dans les territoires où la population augmente ».

Déclin démographique

Sans surprise, « la part de logements vacants est plus forte dans les espaces les moins denses en population », mais « elle reste plus faible dans les aires d’attraction des villes les plus peuplées, dans les territoires en croissance démographique ou dans ceux réputés pour leur attrait touristique ». En moyenne, la vacance est d’ailleurs plus élevée dans la commune-centre que dans les autres communes du pôle ou celles de la périphérie.

L’Institut observe ainsi de fortes disparités entre « les aires à fort attrait touristique longeant les littoraux »  et celles situées dans « des zones touchées par un déclin démographique ».

Dans les aires d’attraction des villes de 50 000 à 200 000 habitants par exemple, des villes comme Ajaccio, Agde ou Les Sables-d’Olonne voient leur taux de vacance plafonner sous les 4 %. À l’inverse, à l’est et au centre de la France, comme dans les aires de Montluçon et de Vichy, ainsi que dans les DOM (Basse-Terre en Guadeloupe), la vacance dépasse les 14 %.

Des disparités encore plus marquées dans les aires d’attractions des villes de moins de 50 000 habitants, avec d’un côté, « des situations de fortes tensions immobilières dans les aires très touristiques »  (Porto-Vecchio, Chamonix-Mont-Blanc ou encore Arcachon-La-Teste-de-Buch), où moins de 3 % des logements sont vacants, et de l’autre, « les aires en recul démographique comme Salbris (Loir-et-Cher), Thizy-les- Bourgs (Rhône), Marvejols (Lozère) et Langeac (Haute-Loire), ou aux Antilles, Basse-Pointe, Bouillante et Le Lorrain, où 20 % des logements, voire plus, sont vacants ».

Appels à réquisition

Cette vacance élevée dans certains territoires a fait de ce thème un « sujet sensible »  et a conduit à « la mise en place de politiques publiques ciblées »  afin de « garantir l’accès au logement pour tous et d'optimiser l'aménagement du territoire en limitant l’artificialisation des sols liée à de nouvelles constructions », rappelle l’Insee.

Hier encore, lors des questions au gouvernement, le député LFI des Yvelines William Martinet a réclamé la « réquisition des logements vacants »  afin de mettre à l’abri les personnes qui se trouvent à la rue, alors que « la vague de froid qui traverse le pays provoque une hécatombe ».

En outre, l’étude paraît une semaine après l'annonce du dépôt d'une proposition de loi communiste au Sénat qui permettrait aux maires de réquisitionner les logements vacants en zones tendues.

De son côté, Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé-Pierre, également favorable à des réquisitions, juge toutefois « plus efficace »  de proposer aux propriétaires « des solutions de mise à disposition de leurs logements vides auprès d'associations, en échange d'avantages fiscaux, ou d'augmenter la taxe sur les logements vacants ».

Afin de favoriser la mobilisation des logements vacants, différentes mesures ont été mises en place, telles que l’extension depuis le début de l’année du nombre de communes (passé de 1 150 à près de 3 700) pouvant mettre en place une taxe sur les logements vacants (TLV) lorsqu’elles sont situées dans une agglomération de plus de 50 000 habitants en « zone tendue ». Les autres communes peuvent, de leur côté, instituer, depuis 2006, une taxe d’habitation sur les logements vacants (THLV).

Consulter l’étude.

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