Les revenus des « très aisés » ont augmenté trois fois plus vite que ceux du reste de la population en vingt ans, selon la DGFiP
Par Franck Lemarc
Dans le jargon du fisc, on les appelle les « THR » et les « THP » : ce sont les ménages à « très haut revenu » ou « très haut patrimoine », ou les deux à la fois, soit les 74 500 foyers les plus riches du pays.
Une étude de la DGFiP s’appuyant sur les déclarations d’impôt sur le revenu, d’impôt sur la fortune et d’impôt sur la fortune immobilière permet de dessiner les contours de cette catégorie sociale.
74 500 foyers « très aisés »
D’une part, les foyers « THR » ou très haut revenus : il s’agit des 40 700 ménages qui déclarent plus de 463 000 euros de revenus par an. Mais ce chiffre ne représente que le ticket d’entrée dans cette catégorie, dont les revenus sont en fait bien supérieurs : le revenu moyen des ménages appartenant à cette catégorie sont de 1,03 million d’euros par an (le revenu moyen déclaré en France est de 32 000 euros par an). Cette catégorie est composée de hauts cadres de la banque ou de l’informatique, de professions libérales telles que chirurgiens ou avocats, ainsi que de sportifs (il s’agit ici, naturellement, de stars du ballon rond par exemple). Ces foyers, qui ne représentent donc que 0,1 % des ménages, représentent en revanche 3 % du revenu de l’ensemble des foyers et payent à eux seuls 13 % de l’impôt sur le revenu total – signe que le caractère proportionnel de l’impôt sur le revenu est assez efficace. Avec une nuance, note la DGFiP : au sein même de ce groupe de très privilégiés, les plus hauts revenus ont davantage de moyens d’échapper en partie à l’impôt : si les foyers THR ont un taux moyen d’imposition de 46 % de leurs revenus, ce taux chute à 26 % pour les 80 ménages les plus riches du pays.
Ces foyers THR ont vu leurs revenus augmenter beaucoup plus vite que le reste de la population : entre 2003 et 2022, les revenus des foyers THR ont augmenté de 119 %, contre 46 % pour le reste de la population.
Deuxième catégorie : les foyers THP (très haut patrimoine), ceux qui possèdent un patrimoine immobilier supérieur à 2,7 millions d’euros. Le patrimoine immobilier moyen de ces foyers s’établit à 4,8 millions d’euros (contre 250 000 euros en moyenne nationale).
Enfin, 6 900 foyers – soit 0,022 % du nombre total de foyers fiscaux – entrent dans les deux catégories à la fois (THR et THP).
En tout, il y a donc 74 500 foyers qui entrent dans l’une ou l’autre catégorie, ou les deux à la fois, et « peuvent être qualifiés de très aisés ».
Faible part des salaires
L’étude montre que les ménages « THR » sont assez concentrés en Île-de-France (la moitié d’entre eux y habite, contre 18 % des autres ménages) et que plus de la moitié d’entre eux a plus de 60 ans.
Leurs revenus sont beaucoup plus diversifiés que ceux des autres ménages. En France, dans la population générale, les revenus sont composés à 63 % de traitements et salaires. Chez les « très aisés », ce chiffre tombe à 33 % : autrement dit, un tiers seulement de leurs revenus viennent de leur salaire, et 43 % du produit de leurs capitaux mobiliers (placements financiers). Seulement un tiers de 74 500 foyers très aisés déclarent d’ailleurs percevoir des salaires. Parmi eux, 40 % travaillent dans le secteur bancaire ou au siège social d’une société. 17 000 foyers relèvent des professions indépendantes, dont une grosse moitié au régime des BNC (bénéfices non commerciaux). Ces derniers sont répartis entre médecins, dentistes, juristes et comptables.
Revenus « volatils »
L’étude établit enfin que les revenus des THR ont certes évolué, globalement, plus vite que ceux des autres foyers, mais qu’ils sont aussi « plus volatils », c’est-à-dire davantage soumis à des aléas tels que la conjoncture économique ou les évolutions législatives.
Il apparaît clairement dans cette étude que plus on est riche, plus on s’enrichit vite : sans même parler de comparaison avec les foyers modestes, « les écarts se creusent même entre foyers aisés ». Ainsi, si l’on considère le groupe des 1 % les plus aisés, leurs revenus n’ont progressé « que » de 79 % en vingt ans, contre 119 %, on l’a dit, pour les 0,1 % les plus riches.
En revanche, les revenus des foyers THP sont soumis à bien plus de variabilité que les autres, à la hausse comme à la baisse – ce qui est parfaitement logique : les personnes ne vivant que de leur salaire ont en général un revenu stable, alors que des personnes dont le revenu est indexé, par exemple, sur des produits financiers, verra ses revenus fluctuer en fonction des aléas de la vie économique. La crise des subprimes de 2008, par exemple, a conduit à une baisse de revenus de 8,5 % des THR, illustre la DGFiP, alors que la même année les revenus des autres ménages ont augmenté de 1,2 %. À l’inverse, la réforme fiscale de 2018, qui a vu l’instauration du PFU (prélèvement forfaitaire unique pour les revenus du capital), a conduit à une hausse de 27,8 % des revenus des THR en un an, tandis que ceux de l’ensemble des ménages n’augmentaient que de 3 %.
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