Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 27 novembre 2019
Parité

Engagement et proximité : en 2026, 7 000 communes de 500 à 1000 habitants vont passer au scrutin de liste paritaire 

L’Assemblée nationale a adopté à une large majorité hier soir (395 voix pour, 33 contre et 126 abstentions) le projet de loi Engagement et proximité.
Les groupes LaREM et MoDem ont voté pour, tout comme l’essentiel des groupes UDI-Agir et Libertés et Territoires. Les groupes LR et socialiste se sont abstenus – les Républicains évoquant une « abstention constructive »  et les socialistes regrettant qu’au fond, « le mandat du maire ne sera pas transformé ». Les députés communistes et LFI ont voté contre le texte. 
Avant le passage du projet de loi en commission mixte paritaire, le 11 décembre, Maire info continue de faire le tour des principales dispositions adoptées par les députés. Après l’intercommunalité et les indemnités, l’urbanisme (lire article ci-dessous) et la parité.

Questions de constitutionnalité
Une des plus importantes modifications apportées dans le texte, en commission puis complétée en séance publique, concerne la parité : la commission des lois a instauré un nouvel article (11 bis AA) « abaissant le seuil d’habitants conditionnant l’application du scrutin de liste paritaire aux élections municipales » : à compter des élections municipales de 2026, ce seuil passerait de 1000 à 500 – autrement dit, le scrutin de liste paritaire serait obligatoire dans toutes les communes au-dessus de 500 habitants.
S’il s’agit d’une évidente avancée en matière de parité, un débat a eu lieu sur le fait de savoir s’il fallait, ou non, conserver un seuil, ou aller vers un scrutin de liste paritaire dans toutes les communes. La majorité a choisi le seuil de 500 habitants pour tenir compte « du principe constitutionnel de pluralisme politique ». « Sans cela, cette disposition aurait été censurée par le Conseil constitutionnel ou défaite par la jurisprudence, et l’avancée serait restée formelle », a plaidé le député LaREM Sacha Houlié. Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales, a longuement défendu cette solution : il s’agit bien de « concilier deux objectifs de nature constitutionnelle : la parité et le pluralisme politique ». Il a rappelé que pour le Conseil constitutionnel, le principe de pluralisme politique prime sur celui de la parité parce qu’il est « consubstantiel à la démocratie ». « Un scrutin proportionnel dans une commune de 80 ou de 90 habitants ne respecterait pas, par définition, le principe de pluralisme politique », a ajouté le ministre.

L'opposition divisée
À gauche de l’Hémicycle, si l’on a reconnu « la grande avancée »  que représente le passage de 1000 à 500 habitants, plusieurs amendements ont été présentés pour aller plus loin et faire totalement disparaître les seuils, en arguant que « la parité prime sur le pluralisme ». Un amendement a notamment été proposé pour permettre, afin de résoudre le problème, de « présenter des listes incomplètes dans les communes de moins de 500 habitants », afin de « favoriser la représentation de toutes les composantes de la société en milieu rural ». L’amendement proposait le système suivant : « « Dans une commune de moins de 500 habitants, lorsqu’une liste déposée est incomplète, elle recueille un nombre de sièges correspondant à la répartition proportionnelle. Si cette répartition attribue à une liste plus de sièges qu’elle ne comprend de candidats, les sièges restants sont répartis entre les autres listes suivant la règle de la plus forte moyenne. »  Il a été rejeté.
À droite, les députés se sont montrés plutôt défavorables au passage du seuil à 500. D’une part parce que ce seuil de 500 habitants « n’existe nulle part, dans aucune matière »  (Aurélien Pradié, LR). Au-delà, le groupe LR a demandé la suppression du dispositif et le « statu quo »  à 1000 habitants en estimant que l’abaissement du seuil serait « inopérant, voire impossible ». « Il est bon de rappeler, estiment les députés LR, que plus de 60 communes en 2014, n’ont pas eu d’élus compte tenu des dispositifs alors applicables (la parité entraînant un mode de scrutin de liste). Quel serait le résultat en 2026 ? À n’en pas douter plusieurs centaines de communes seraient touchées. » 
La modification adoptée concernerait, en 2026, quelque 7 000 communes. « 12 000 conseillères municipales seraient élues », a déclaré le député LaREM Jean-René Cazeneuve. Au nom de la majorité, il a justifié le refus d’aller plus loin – pour l’instant : « On ne peut pas en quelques heures changer le mode de scrutin de 18 000 communes ». 
Dans la foulée, l’Assemblée nationale a adopté un certain nombre de dispositions pour fixer le même seuil de 500 habitants dans d’autres domaines, par cohérence : par exemple, en cas de vacance, le remplacement d’un adjoint devrait se faire en respect du principe de parité, c’est-à-dire que le nouvel adjoint devrait obligatoirement être du même sexe que l’adjoint qu’il remplace. 
Notons enfin qu’au cours de la même séance, les députés ont confirmé la suppression, voulue par la commission, de l’article du Sénat qui interdisait le nuançage d’office par les préfets dans les communes de moins de 3 500 habitants. Le ministre Lecornu a répété que pour le gouvernement, cette disposition est d’ordre réglementaire et non législatif, et que le ministre de l’Intérieur adressera prochainement une instruction aux préfets pour leur demander de ne pas procéder au nuançage d’office dans les communes de moins de 9 000 habitants.

Franck Lemarc

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