Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mardi 3 juin 2025
Outre-mer

Les Outre-mer gravement menacés par le réchauffement climatique

Le Réseau action climat a rendu public hier un rapport sur l'exposition des Outre-mer au changement climatique. Sans surprise, l'association démontre que les territoires ultra-marins sont « en première ligne » face aux effets du réchauffement climatique, et estime que des mesures d'urgence s'imposent pour s'y préparer.

Par Franck Lemarc

Des Antilles à l’Océan indien en passant le Pacifique, les territoires d’outre-mer sont confrontés à une menace plus grave et plus immédiate que la métropole. C’est la conclusion du rapport du RAC (Réseau action climat) rendu public hier qui, sans être surprenant, est particulièrement inquiétant. 

Cyclones en hausse

Les territoires ultramarins font face à une situation particulièrement préoccupante – et par bien des aspects injuste : alors qu’ils ne sont que très peu responsables du réchauffement climatique, vu leur contribution « dérisoire »  aux émissions de gaz à effet de serre, ils sont pourtant les plus exposés à ses conséquences. Cette « injustice climatique », comme l’appelle le RAC, appelle des réponses fortes de la part de l’État. 
Ces territoires ont tous leurs particularités géographiques, mais ils ont en commun, à l’exception de la Guyane, d’être des archipels, et à ce titre concernés par de multiples risques : élévation du niveau de la mer, inondation, cyclones, sécheresse, difficultés d’approvisionnement en eau. 

L’élévation de la température globale de la planète a des répercussions plus sévères dans les régions déjà chaudes. Outre les risques pour la santé, cette élévation de la température entraine mécaniquement une aggravation du risque cyclonique, puisque les cyclones, ouragans et autres typhons (l’appellation change selon les régions du globe) sont provoqués par des conflits de masse d’air entre chaleur venue de l’océan et air froid en altitude. Plus la température des océans augmente, plus les cyclones sont fréquents et violents. Selon le Giec, une élévation de la température de 2 °C (on est déjà à + 1,5 °C) apportera une hausse de 13 % du nombre d’ouragans dits « intenses ». Un épisode comme Irma, qui a ravagé Saint-Martin et Saint-Barthélemy en 2017, avec des pointes de vent jamais vues atteignant les 360 km/h, est encore aujourd’hui « considéré comme exceptionnel » , mais « pourrait devenir la norme »  à la fin du siècle, estime le RAC. 

Ces cyclones, comme Irma ou Chido, ont des conséquences économiques « colossales », rappelle le Réseau : Irma a provoqué 1,26 milliard d’euros de dégâts indemnisés par les assurances, ce qui en fait la catastrophe la plus coûteuse de l’histoire des Outre-mer – tant que l’on ignore encore le coût de Chido à Mayotte.

Il est donc « urgent », selon le RAC, de prendre des mesures « d’adaptation »  au risque cyclonique dans les îles ultra-marines : « amélioration des systèmes d’alerte, renforcement des infrastructures, planification urbaine adaptée et gestion du risque littoral ». « Tout cela est faisable, note le Réseau, à condition de déployer les moyens financiers adéquats ». 

Risque littoral

L’accélération de l’élévation du niveau de la mer est le deuxième risque majeur auxquels font face les outre-mer, avec parfois un risque existentiel. Pour rappel, elle est due, d’une part, à la fonte des glaciers et des calottes polaires et, d’autre part, au réchauffement des eaux marines : par dilatation, des eaux plus chaudes occupent plus de place. 

Dans son scénario dit « intermédiaire »  (assez proche de l’évolution actuelle », dit le Rac), le Giec estime que l’élévation du niveau de la mer devrait atteindre 76 cm d’ici la fin du siècle par rapport à 2014.  Un scénario plus pessimiste fait craindre une montée des eaux qui pourrait dépasser un mètre. Ces scénarios sont particulièrement critiques en Polynésie française, où de nombreux atolls deviendraient « inhabitables »  avec une hausse de 50 cm. 

On observe en parallèle une accélération de l’érosion côtière et une augmentation du risque de submersion, qui pourrait elle aussi rendre inhabitables à court terme certains territoires, y compris aux Antilles : la rapport note que la zone industrielle de Jarry, en Guadeloupe, « pourrait être submergée 180 jours par an entre 2060 et 2100 ». 

Même bien plus au nord, à Saint-Pierre-et-Miquelon, c’est déjà un village entier qui va être « relocalisé »  1,5 km plus à l’intérieur des terres face au risque de submersion. « Il s’agit du premier cas de relocalisation planifiée d’une commune entière sur le territoire français », note le RAC. 

« Les solutions existent » 

Le rapport détaille bien d’autres risques auxquels les Outre-mer sont particulièrement exposés : perte de biodiversité – notamment sur les coraux ou les mangroves –, sécheresse, accès à l’eau, dégâts majeurs sur l’agriculture. Dans tous les cas, il devient toujours plus urgent de prendre des « mesures d’adaptation », qui sont connues et maîtrisées. Il n s’agit pas seulement, écrit le RAC, de questions économiques, mais même du respect de droits fondamentaux, comme celui de l’accès à l’eau, qui n’est pas respecté dans plus territoires ultramarins aujourd’hui. 

« Les solutions existent », conclut le RAC sans catastrophisme. Mais elles ne pourront être mises en œuvre sans un engagement « financier et humain »  majeur de l’État. Engagement qui n’est pas au rendez-vous aujourd’hui. 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2