Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 24 mars 2022
Numérique

Présidentielle : quel avenir pour les infrastructures numériques ?

La fédération InfraNum a reçu hier les candidats à l'élection présidentielle et/ou leurs conseillers numériques afin qu'ils puissent exposer leurs programmes pour les infrastructures numériques du pays et réagir aux propositions formulées récemment par la fédération.

Par Lucile Bonnin

« Il est important que le numérique soit beaucoup mieux pris en compte dans le prochain quinquennat, a déclaré en préambule Philippe Le Grand, président d’InfraNum, hier à l’occasion d’une audition des candidats devant près de 200 membres de la filière des infrastructures numériques.

Après avoir partagé ses 30 propositions pour répondre aux futurs enjeux des infrastructures numériques (lire Maire info du 10 mars), cette rencontre a eu lieu hier pour interroger les candidats et leurs représentants sur leurs intentions politiques en matière de numérique. 

Tous les candidats ont été sollicités et sept d’entre eux ont choisi de venir ou d’être représentés : Nicolas Dupont-Aignan, Éric Bothorel (pour Emmanuel Macron), Nelly Garnier (pour Valérie Pécresse), Alexandre Schon (pour Jean-Luc Mélenchon), Sylvain Raifaud (pour Yannick Jadot), Sébastien Vincini (pour Anne Hidalgo) et Frédéric Lefebvre-Naré (pour Jean Lassale). 

Souveraineté, résilience, inclusion, responsabilité environnementale : si les programmes sont différents, certaines convergences existent autour d’enjeux fondamentaux du numérique. 

Territoires ruraux et raccordements complexes

La Plan France très haut débit a évidemment été largement abordé au cours de cette rencontre. L’occasion pour certains candidats/représentants de rappeler les difficultés de déploiement que rencontrent certains territoires. Nicolas Dupont-Aignan, premier à se prêter à l’exercice, souhaite mettre en place et pérenniser « un réseau numérique égalitaire » . « On ne parle jamais des territoires ruraux » , indique le député de l’Essonne qui ajoute recevoir régulièrement des plaintes de maires ruraux à propos des raccordements dans leurs communes.

Certains font de la résolution de ce problème leur priorité comme Anne Hidalgo, représentée par Sébastien Vincini, qui souhaite « couvrir les zones blanches qui restent ». Nelly Garnier indique que Valérie Pécresse souhaite instaurer « un bonus financier pour les collectivités qui achèveront le déploiement avant 2024 ».

Pour Sylvain Raifaud, « il ne peut pas y avoir de transition numérique sans égalité » . « En tant qu’élu local, je reçois des plaintes d’usagers suite au mode STOC »  (lire Maire info du 11 mars), explique ce dernier qui soutient au nom de Yannick Jadot qu’il faudra laisser la possibilité aux élus locaux de s’exprimer sur les conditions de raccordements et ne pas laisser les opérateurs seuls maîtres des décisions. 

Gouvernance et souveraineté

L’implication de l’État dans le domaine du numérique est à reconsidérer selon plusieurs candidats. Certains comme Nicolas Dupont-Aignan ou Jean-Luc Mélenchon prônent une nationalisation des réseaux télécoms et un « retour de l’État stratège » . Alexandre Schon (pour Jean-Luc Mélenchon) a notamment déclaré que « les télécoms sont une compétence régalienne »  et que ce n’est pas aux collectivités de « réparer les erreurs des opérateurs » . Sur ce sujet, le candidat demande notamment « une réforme du zonage AMEL – AMII et de la réglementation » .

D’autres candidats souhaitent réaffirmer le rôle de l’État en matière de numérique. Valérie Pécresse par exemple, représentée hier par Nelly Garnier, prévoit la création d’un haut conseil numérique de l’égalité, d’un parquet national cyber et d’une école nationale cyber. Anne Hidalgo, elle, souhaite directement créer un ministère du Numérique autonome, comme proposé par la fédération. Pour le candidat EELV, « l’État ne doit pas innover à la place des acteurs mais doit promouvoir l’ouverture open source par exemple » 

La question de la souveraineté a aussi été très largement évoquée notamment par Éric Bothorel, représentant d’Emmanuel Macron, qui explique qu’il faut « penser une start-up nation qui soit plus puissante » . Après avoir dressé un bilan du quinquennat de ce dernier, le conseiller numérique insiste sur « la nécessité de monter en gamme »  évoquant la récente ouverture du Campus Cyber. 

La souveraineté étant aussi une question de gestion des données, certains candidats prévoient des cadres législatifs comme Valérie Pécresse qui souhaite promouvoir « une loi souveraineté et responsabilité numérique »  avec un cloud souverain 100 % français. 

Inclusion et formation

Le constat est unanime : il faut aller plus loin pour le prochain quinquennat en terme d’inclusion numérique. « Garantir l’exercice de ce droit fondamental »  est une priorité dans le programme du candidat de la France Insoumise. Son représentant a d’ailleurs rappelé qu’actuellement 14 millions de personnes sont exclus du numérique. 

Du côté d’Emmanuel Macron, l’objectif est de poursuivre le déploiement de 4 000 conseillers numériques France Services. Sylvain Raifaud indique que Yannick Jadot souhaite renforcer les capacités d’accueil proposées par la médiation numérique dans les territoires. 

Mais ces avancées sociales ne seront possibles que grâce à des professionnels formés. Ainsi, les questions de la formation, de la valorisation des métiers liés au numérique et du soutien à la création sont apparues comme incontournables. Un consensus a été établi sur « la nécessité de renforcer la formation continue, de former davantage au numérique (400.000 ingénieurs et techniciens supplémentaires dans les 5 ans selon Emmanuel Macron, création d’une école du numérique pour Valérie Pécresse, instauration d’un apprentissage informatique plus tôt dans les programmes scolaires pour Jean Lassalle avec un CAPES numérique) ou encore d’investir davantage dans la recherche, en plus de la formation initiale avec un apprentissage en alternance pour Anne Hidalgo. » 

Environnement 

 « L’enjeu environnemental lié au numérique a été abordé notamment par Sylvain Raifaud pour exiger plus d’éthique et de réglementation en vue de limiter les émissions liées au secteur » , peut-on lire dans le communiqué de la fédération. Au-delà de la question des émissions, les terminaux comme principaux responsables de la pollution numérique ont été appréhendés notamment par Valérie Pécresse qui souhaite mettre en place un chèque récupération de 10 euros « pour donner un coup de boost »  au reconditionnement. 

L’environnement aurait néanmoins pu avoir une place un peu plus importante dans les discours des 7 candidats/représentants présents. Le sujet a été quelque peu survolé alors qu’une grande place lui est attribuée au sein des propositions d’InfraNum. 

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