Maire-info
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Édition du mercredi 24 février 2021
Numérique

« Numérique et environnement » : la feuille de route du gouvernement

La ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, et le secrétaire d'Etat à la Transition numérique, Cédric O, ont décliné de concert, hier, leurs 15 propositions pour un numérique plus vert. Celles-ci sont articulées autour de trois axes : « connaître pour agir » ; « soutenir un numérique plus sobre » et « innover ».

Comment concilier l’inexorable montée en puissance du numérique et le besoin de maîtrise de son empreinte environnementale ? C’est l’équation que tentent de résoudre dans la durée la ministre de la Transition écologique et le secrétaire d’État à la Transition numérique. Barbara Pompili et Cédric O ont dévoilé, hier, la feuille de route « numérique et environnement »  du gouvernement, dont plusieurs propositions sont issues des travaux de la Convention citoyenne pour le climat.

Commande publique : 20 % des achats de terminaux issus du réemploi

L’heure n’est pas encore à la contrainte (déploreront certains), l’idée générale consiste davantage à attirer l'attention des consommateurs sur l’impact environnemental des appareils qu’ils achètent (campagne de sensibilisation de l'Ademe pour mettre en avant les pratiques numériques moins polluantes) et à inciter les acteurs à favoriser des usages plus durables (déploiement depuis le 1er janvier 2021 de l’indice de réparabilité).
Le secteur public est déjà censé montrer l'exemple puisqu'il est invité à « soutenir la demande pour le matériel reconditionné au travers de la politique d’achat public ». À compter de 2021, les acheteurs publics, l’Etat et les collectivités territoriales, ont « l’obligation d'acquérir des produits numériques reconditionnés ou 20 % des achats de téléphones fixes et portables et 20 % du matériel informatique (ordinateurs fixes et portables, écrans, accessoires…) avec du matériel issu du réemploi et de la réutilisation »  (loi Antigaspillage et économie circulaire). 

Une analyse des pratiques commerciales des opérateurs 

La présentation d'hier fait suite à une première salve de mesures, présentées en octobre 2020, pour limiter la pollution due au numérique et favoriser le réemploi des téléphones. Le gouvernement a annoncé, à ce sujet, la saisine de l’Arcep, régulateur des télécoms, « pour une analyse des pratiques commerciales des téléphones mobiles subventionnés et de leur impact, notamment au regard des autres modèles de vente ». 
Question sous-jacente : les opérateurs incitent-ils les consommateurs à renouveler trop souvent leurs téléphones portables avec des pratiques commerciales alléchantes, comme les téléphones dits à 1 euro ou le renouvellement des forfaits avec engagement, alors que la fabrication de ces appareils représente 70 % de l’empreinte carbone totale du numérique français et que le recyclage concerne à peine 15 % des téléphones des Français ?
« On ne demande pas cette étude juste pour occuper le temps, c’est clairement pour avoir les moyens de prendre une décision le moment venu. Nous sommes prêts à prendre des mesures »  (comme l’interdiction du subventionnement des téléphones portables ?), a assuré, à la presse, sans donner plus de détails, Antoine Darodes, directeur de cabinet de Cédric O. « L’objectif c’est clairement d’accroître la durée de vie des terminaux ». 01net.com s'étonne cependant que l'on « ne s'attaque à la plus petite frange du marché. En 2019, les abonnés engagés ne représentaient que 29 % du marché, les 71 % restant des 69 millions (2020) de lignes mobiles étant des forfaits sans engagement ».
Le gouvernement attend, d’ici mai, des engagements des fabricants et opérateurs sur la collecte, le reconditionnement et les émissions de gaz à effet de serre. De leur côté, les gestionnaires des data centers devront réduire leur consommation énergétique de 40 % d’ici à 2030. Pour les encourager, une éco-conditionnalité sera mise en place à partir de 2022 pour qu'ils puissent bénéficier de la réduction de taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité. « Ces critères pourraient être renforcés, dans une prochaine loi de finance, par la valorisation de la chaleur fatale et l’optimisation de la consommation d’eau », affirmait hier à la presse Estelle Sandré-Chardonnal, conseillère économie circulaire auprès de la ministre Barbara Pompili.

Un baromètre environnemental des acteurs du numérique

L’Arcep sera prochainement dotée (une disposition législative est nécessaire), par ailleurs, d’un « pouvoir de collecte de données auprès des acteurs du numérique (opérateurs de téléphonie mobile, fabricants, éditeurs de logiciels) »  pour établir un baromètre environnemental des acteurs du numérique. Il sera ainsi possible de constater si oui ou non les acteurs agissent pour maitriser leur empreinte environnementale. « C’est une première étape de régulation par la donnée des acteurs du numérique », souligne Antoine Darodes. Des codes de bonne conduite seront instaurés en France, et pourquoi pas plus tard en Europe afin que ces codes soient juridiquement opposables. 
Très sollicitée, l’Arcep est, enfin, chargée de « prendre en compte les enjeux environnementaux dans les critères d'attribution de la bande de fréquences 26 GHz ». Antoine Darodes de s’interroger : « Les opérateurs devront-ils proposer des antennes capables de s’éteindre la nuit ? Il s’agit là d’un travail d’identification technique, pour que, nous politiques, nous sachions sur quoi insister. »  Une étude globale sur le développement des objets connectés (permis notamment par la 5G) est officiellement lancée pour permettre une meilleure prise en compte de leurs effets.

Ludovic Galtier

Télécharger la feuille de route.

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