Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 27 avril 2022
Mobilité durable

Plan vélo : un décret pour « lever les freins » au développement des voies vertes

Plus de trois ans après la présentation du Plan vélo, le gouvernement a publié un texte qui doit permettre à certains véhicules motorisés de circuler sur ces voies. Perplexe, le collège des élus du Cnen y voit une « complexification inutile du droit ».

Par A.W.

Afin de permettre la création de nouvelles voies vertes dont le développement est « limité », le gouvernement vient de publier un décret assouplissant leur définition actuelle - jugée « trop restrictive »  - et « clarifiant »  la procédure de création de ces voies. L’objectif vise à « améliorer »  le maillage du territoire et à « faire des chemins ruraux des voies vertes ».

Un texte qui arrive, toutefois, plus de trois ans après la date initialement prévuemars 2019 » ) et les mesures annoncées lors de la présentation du Plan vélo en 2018 dans lequel s’inscrit ce décret. 

Dérogation pour certains véhicules motorisés 

Jusqu’à présent la circulation sur les voies vertes était « exclusivement réservée »  aux véhicules non motorisés (à l'exception des engins de déplacement personnel motorisés, des cyclomobiles légers, des piétons et des cavaliers). Résultat, il était impossible d’attribuer ce statut à un chemin de halage, à une route forestière ou à une voie qui dessert des parcelles agricoles, par exemple, puisque des véhicules motorisés y circulent.

Afin de lever ce frein, le gouvernement a donc prévu une « dérogation »  au Code la route. Désormais, certains « véhicules motorisés »  pourront également être autorisés à circuler sur ces voies vertes et à « accéder aux terrains riverains », « sous réserve de respecter la vitesse maximale autorisée […] qui ne peut excéder 30 km/ h »  et de ne pas occasionner de gêne aux autres usagers.

Dans ce cadre, ce texte codifie la procédure de création de voies vertes en reprenant celle des « zones de rencontre »  et des « zones 30 ». Le statut de voie verte sera ainsi fixé par arrêté de l’autorité détentrice du pouvoir de police de la circulation après consultation des autorités gestionnaires de la voirie concernée, ou du support foncier dans l’hypothèse d’une superposition d’affectation, précise le texte.

L’objectif de cette évolution règlementaire vise à « rapprocher le régime applicable à la voie verte de celui de droit commun »  et de permettre de « faire des chemins ruraux des voies vertes », expliquait le ministère de la Transition énergétique lors du passage de ce décret (encore à l’état de projet) devant le Conseil national dévaluation des normes (Cnen).

Le dossier de presse du Plan vélo, paru en 2018, soulignait également que cette disposition devait « faciliter la cohabitation des usages avec les véhicules d’exploitation des gestionnaires du domaine public (VNF, ONF…) ». 

Les réserves du Cnen

Reste que les membres élus du Cnen sont restés plutôt dubitatifs devant cette évolution règlementaire et ont fait part de leurs interrogations, à l’occasion d’une première délibération rendue le 3 février. 

Des interrogations qui ont porté sur « l’utilité »  de réglementer la procédure de création des voies vertes « alors même que les collectivités territoriales peuvent déjà conférer ce statut sans difficultés particulières en l’état du droit en vigueur depuis maintenant de nombreuses années », mais également sur le respect de « l’esprit du principe de libre administration ».

Après que ces derniers ont formulé un avis défavorable et qu’une réunion « sous l’égide du président du Cnen en lien avec l’AMF »  a été organisée le 18 février dernier, le gouvernement a quelque peu amendé son projet de décret afin « d’éviter toute ambiguïté quant au périmètre du pouvoir de police de la circulation des maires sur les voies vertes ».

Finalement, lors d’une seconde délibération rendue le 22 février, les membres élus du Cnen ont concédé un avis favorable sur ce décret… en réitérant toutefois leurs réserves. Ceux-ci ont ainsi réaffirmé qu’il serait « plus opportun de laisser au pouvoir réglementaire local […] la possibilité de déterminer les modalités de circulation dans les conditions de droit commun en fonction des besoins et des impératifs de sécurité déterminés localement, sans que le pouvoir réglementaire national n’ait à définir une liste des véhicules pouvant être autorisés ou interdits à la circulation sur les voies vertes ». 

« Outre une complexification inutile du droit, notamment par la création de dérogations, l’ordonnancement juridique actuel continue d’interroger sur le respect du principe de clarté juridique, mais également de l’esprit du principe de libre administration des collectivités territoriales », ont-ils répété.

À noter que la procédure ne devrait pas créer de charges supplémentaires pour les collectivités.

« Depuis fin 2017, les pistes cyclables et voies vertes ont augmenté d’un tiers, soit 13 000 nouveaux kilomètres (53 000 kilomètres au total) », se félicitait pourtant le gouvernement en septembre dernier.

Télécharger le décret.
 

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2