Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 5 octobre 2015
Migrants

Accueil des réfugiés : les communes sur la réserve

Invitées à participer, jeudi 1er octobre, au Sénat, à une table ronde sur l'accueil des réfugiés par les collectivités territoriales, les associations d'élus ont adressé une même mise en garde à l’État : ni les départements, ni les petites villes, ni les communes, ni les grandes villes, ne sont prêts à endosser la responsabilité de l’État dans l'accueil des réfugiés. Une question à la fois de principe et économique. Les départements mettent en avant la charge durable du RSA, auquel a droit un réfugié statutaire (un demandeur d'asile ayant obtenu le statut de réfugié). En Seine-et-Marne, par exemple, l'accueil de 200 réfugiés nécessitera de trouver 1,25 million d'euros supplémentaire. Concernant les communes, la sénatrice Valérie Létard, présidente de l'agglomération de Valenciennes et représentant l'AMF, a réclamé que soit établi un diagnostic des territoires avant tout accueil, car « nous ne pouvons ajouter de la souffrance à la souffrance des Français ». Certains territoires ont « beaucoup de chômage, un fort taux de logements sociaux, beaucoup d'accueils d'urgence, déjà des CADA, des quartiers en politique de la ville ». C'est donc sur la base de ce diagnostic, « et du volontariat des élus », a insisté la sénatrice, que doit se jauger leur « capacité à accueillir des familles de réfugiés ». Du côté des grandes villes de France, on a déjà calculé que les 1000 euros promis par l’État aux communes pour chaque place d'hébergement nouvelle, étaient largement inférieurs aux besoins, a minima estimés cinq fois plus élevés.
« Un pilotage national mais une coproduction territoriale, c'est la spécificité française de l'accueil des réfugiés que je défends », a réagi le préfet Kléber Arhoul, nommé récemment coordinateur national pour l'accueil des réfugiés. La délégation aux collectivités territoriales du Sénat qui organisait cette table ronde avait pensé à inviter les représentants de l’État. Ceux-ci ont voulu rassurer les élus locaux sur plusieurs points. Le premier est que la réduction des délais d'instruction des dossiers de demande d'asile, à tous les stades de la procédure, commençait à se mettre en place, de même que le renforcement des moyens de l'OFPRA (office chargé du traitement des demandes d'asile). Cette accélération du traitement des dossiers fait partie des modifications introduite par la réforme de l'asile. L'enjeu est, en accélérant la procédure, de réduire la durée d'attente et d'hébergement dans les centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) et de faciliter le retour, plus rapide, des déboutés (ceux à qui l'asile est refusé).
Le directeur général des étrangers en France, Pierre-Antoine Molina, a également voulu rassurer les élus sur la prochaine répartition des demandeurs d'asile, à l'avenir encadrée par un schéma national d'hébergement (une réforme également née de la loi asile). Cette répartition serait forcément « équilibrée ». « Là où les collectivités ont un rôle à jouer », a-t-il pointé, c'est dans la recherche du foncier nécessaire à la création des nouvelles places de CADA, ainsi qu'en aidant à ce « que la population accepte ces nouvelles structures », un point parfois sensible.
Si l'Europe doit faire face à un flux migratoire exceptionnel depuis quelques mois, la France ne subit pas d'afflux massif de demandeurs d'asile, a voulu relativiser Pierre-Antoine Molina. La demande d'asile, qui avait déjà diminué en 2014 de 5% par rapport à l'année précédente, devrait rester à la même échelle en 2015. En revanche, la France accueillera 31 000 réfugiés supplémentaires en deux ans, au titre de la relocalisation décidée entre les pays européens pour soulager les pays d'entrée notamment, l'Italie et la Grèce.
Emmanuelle Stroesser

N.B. : Un atelier du prochain Congrès de l'AMF abordera cette thématique : « Europe : les communes et les intercommunalités  face aux défis des migrations »  (jeudi 19 novembre, 14 h30).

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