Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 6 janvier 2021
Marchés publics

Loi Asap : Bercy explicite les mesures « commande publique »

La Direction des affaires juridiques (Daj) du ministère de l'Economie, des Finances et de la Relance a détaillé, dans une fiche technique publiée lundi, les mesures spécifiques à la commande publique comprises dans la loi d'accélération et de simplification de l'action publique (Asap) du mois dernier.

Promulguée le 7 décembre 2020 et considérée par l’exécutif comme l’un des vecteurs du plan de relance, la loi Asap inclut plusieurs mesures relatives au droit de la commande publique. Certains marchés, au motif qu’ils seraient d’intérêt général, peuvent désormais être conclus sans publicité ni mise en concurrence préalables. Pendant l’examen du texte au Parlement, cette disposition avait fait polémique. Députée non-inscrite de la Meuse, Emilie Cariou considérait, par exemple, ce motif « beaucoup trop large en plus d’être assez flou »  et s’inquiétait de « l’ouverture trop large des procédures régissant la commande publique, qui risque de soulever la question de la corruption, des pots-de-vin et de toutes les dérives à cause desquelles nos concitoyens ne font plus confiance aux élus. » 

Le motif d’intérêt général

L’élue avait obtenu, dans l’hémicycle, comme réponse de la ministre Agnès Pannier-Runacher une fin de non-recevoir. La Daj s’emploie toutefois à la rassurer en précisant que « ce nouveau cadre n’a pas pour objet de permettre aux acheteurs de décider eux-mêmes de déroger aux procédures en fonction de leur propre appréciation de l’intérêt général, mais d’offrir au pouvoir réglementaire la possibilité d’autoriser les acheteurs à le faire dans des cas et pour des marchés expressément définis par décret. Ainsi, l’objectif d’intérêt général poursuivi et le champ d’un éventuel nouveau cas de dispense ne sont en aucun cas laissés à l’appréciation des acheteurs mais confiés au seul pouvoir réglementaire ». 
Seuls les marchés non couverts par les directives européennes seraient concernés par cette disposition. Pour la Daj, cette mesure s’inscrit dans le cadre des conclusions du Conseil de l’Union européenne du 30 novembre 2020 qui a demandé aux Etats membres de « définir des mesures supplémentaires afin de réduire la charge bureaucratique »  et « les contraintes procédurales qui pèsent sur les acheteurs publics, dans le but de simplifier et de renforcer les investissements publics ».
Pour rappel, l’absence de publicité ou de mise en concurrence s’appliquait jusqu’alors « en raison de l’infructuosité d’une première procédure, d’une urgence particulière, de l’objet ou de la valeur estimée du marché ».

Relèvement du seuil de dispense de procédure pour les marchés de travaux

Justement, avec la loi Asap, le seuil en dessous duquel les marchés publics de travaux sont dispensés de publicité et de mise en concurrence a été relevé à 100 000 euros hors taxes jusqu’au 31 décembre 2022 inclus. Ce relèvement « vise, en facilitant la passation de tels marchés, à encourager la reprise rapide dans le secteur du bâtiment et des travaux publics particulièrement exposé et affecté par la crise économique et sanitaire liée à la pandémie de covid-19 ».
« Les acheteurs, poursuit la Daj, pourront contracter plus rapidement avec des entreprises et notamment des PME ». Un argument qui avait peine à convaincre Emilie Cariou, pour qui « l’absence de publicité des commandes publiques aidera plutôt les groupes qui ont l’habitude de se porter candidats un peu partout et qui réagissent au quart de tour ! » 

Création d’un dispositif de circonstances exceptionnelles

Dès le mois de mars, Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, des Finances et de la Relance, avait incité les collectivités à ne pas appliquer les pénalités de retard aux entreprises titulaires de marchés publics (lire Maire info du 11 mars 2020) et à retenir la « force majeure »  qui exonère les parties au contrat de toute faute contractuelle (lire Maire info du 19 mars 2020). Sur le même principe, l’article 132 de la loi Asap « insère dans le Code de la commande publique deux nouveaux livres, l’un pour les marchés et l’autre pour les concessions, dans le but de permettre aux acheteurs et aux entreprises de surmonter les difficultés liées à une nouvelle crise majeure ».
Le « dispositif de circonstances exceptionnelles devra alors être mis en œuvre par décret afin de déroger exceptionnellement aux règles habituelles de passation et d’exécution des marchés publics et des contrats de concession ». Ce décret pourra notamment permettre aux acheteurs et autorités concédantes de « prolonger par avenant les contrats qui arrivent à échéance pendant la période de circonstances exceptionnelles »  ou de « proroger, de façon proportionnée, le délai d’exécution des marchés et concessions ».

Ludovic Galtier

Télécharger la fiche de la Daj.

Suivez Maire info sur Twitter : @Maireinfo2