Crise du logement : le Parlement facilite définitivement la transformation de bureaux (et autres locaux) en habitations
Par A.W.

Dérogations au PLU, création d’un permis de construire à destinations multiples ou encore construction de logements étudiants simplifiée… En pleine crise du logement, le Parlement a définitivement adopté, hier, via un ultime vote des sénateurs, une proposition de loi visant à « faciliter la transformation des bureaux et autres bâtiments en logements ».
Alors que sénateurs et députés ont réussi à se mettre d’accord sur un texte commun le 20 mai dernier, à l’occasion d’une commission mixte paritaire (CMP), ce texte a connu un parcours législatif laborieux puisqu’il avait commencé en tout début d’année 2024 avant qu’il ne soit interrompu à la suite de la dissolution de l'Assemblée nationale, il y a tout juste un an.
Débloquer des « centaines de projets »
Cette proposition de loi « ne réglera pas la crise du logement. Mais il permettra de débloquer des centaines de projets dans nos territoires », avait souligné le député de l’Ain à l’origine de cette initiative, Romain Daubié (MoDem), en début de semaine, à l’occasion du dernier vote des députés sur cette proposition de loi.
Un texte qui permettra « d’aller au-delà des seuls 2 000 nouveaux logements produits chaque année par la reconversion des bâtiments existants » et « contribue[ra] utilement à étoffer la palette des outils qui peuvent être mobilisés par les collectivités pour amplifier l'offre de logement », s’est également félicitée hier la rapporteure du texte au Sénat Martine Berthet (LR), celle-ci regrettant néanmoins l'absence d'une « loi programmatique ambitieuse spécifiquement dédiée au logement ».
Jugeant qu’il sera bien « un levier concret pour résorber la crise du logement dans les grandes métropoles », la ministre du Logement, Valérie Létard, a aussi rappelé que ce texte « ne sera pas la solution partout ni la solution à tout ».
Dérogations au PLU
Alors que la reconversion de bâtiments existants reste encore insuffisante, ce texte permettra aux maires (ou aux présidents d'intercommunalités) de « déroger plus rapidement » aux règles fixées dans le plan local d’urbanisme (PLU) en autorisant la reconversion de bâtiments tertiaires en logements. Ce qui permettra ainsi de « gagner entre six et douze mois ».
Initialement ciblé sur les transformations de bureaux qui ont vu leur vacance fortement progresser depuis la crise sanitaire (avec la généralisation du télétravail, le taux d'occupation des bureaux a diminué de 5,4 % et rien qu’en Île-de-France, il y aurait « 4,5 millions de mètres carrés » de bureaux vides), ce texte porté par les députés MoDem a donc vu son champ d’application être étendu à tous les « bâtiments de destination autre qu'habitation ».
Dans le détail, cet élargissement concernerait aussi bien les « locaux commerciaux », les « bâtiments d'enseignement », les « hôtels ou les garages » non utilisés, mais aussi d’anciennes trésoreries, Postes ou cités administratives ainsi que « les bâtiments ruraux qui n’ont plus de vocation agricole ». « Dans les vieilles zones commerciales d'entrée de ville, un million de logements pourraient être créés », avait ainsi estimé Martine Berthet lors de la discussion.
Pour soutenir les projets des collectivités locales dans cette voie, les parlementaires ont intégré aux missions de l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) l’accompagnement des élus locaux « dans la conception, la définition et la mise en œuvre de leurs projets ». Ces opérations étant complexes en termes d’ingénierie, l'Agence pourra ainsi les accompagner dans « l'identification des locaux qui pourraient potentiellement être transformés en habitations, ainsi que pour la phase d’étude du potentiel de transformation en logements ».
Permis réversible
Afin de favoriser la création de logements étudiants, les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous) bénéficieront de certains avantages jusque-là réservés aux bailleurs sociaux, comme le fait de recourir de façon pérenne aux marchés publics de conception-réalisation.
Le texte prévoit également de créer un permis de construire « réversible » qui serait « délivré à un instant unique et permettrait aux surfaces d’un bâtiment d’évoluer entre plusieurs destinations » successives. « Encore une fois, il s’agit d’un outil laissé à la main des élus locaux qui pourront choisir de l’utiliser ou non », expliquait l’an passé Romain Daubié qui s’est inspiré de ce qui a été fait en Seine-Saint-Denis pour le village olympique.
À l’époque, le député d'Eure-et-Loir et ancien ministre du Logement, Guillaume Kasbarian (Renaissance), avait précisé que ce permis « permettra au porteur de projet de modifier la destination du bâtiment sans qu’il lui ait été nécessaire d’en prévenir la commune au moment du dépôt du permis de construire, et ce autant de fois qu’il le souhaitera ».
Reste que la durée de ce permis multidestinations a été bornée dans le temps (20 ans) et le maire pourra exiger la mention de la première destination.
Surfaces supplémentaires assujetties à la taxe d’habitation
Comme l’a rappelé la ministre du Logement dans un communiqué publié hier soir, deux mesures fiscales initialement intégrées au texte ont, entretemps, « déjà été adoptées dans la loi de finances pour 2025 » : « l’exonération de taxe sur les bureaux pour les locaux transformés en logements » ainsi que « la possibilité pour les collectivités de percevoir la taxe d’aménagement afin de réaliser les investissements publics rendus nécessaires par l’accueil de nouveaux habitants ».
« Si ces opérations de transformation aboutissaient à une augmentation de la surface, elles seraient alors assujetties à la taxe d’habitation », là aussi afin de « couvrir les frais d’investissement des communes dans les équipements collectifs nécessaires aux nouveaux habitants », a rappelé, de son côté, le Sénat dans un communiqué publié hier.
Consulter le texte issu de la CMP.
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