Maire-info
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Édition du vendredi 18 juillet 2025
Logement social

La baisse du livret A, une « bonne nouvelle » pour le logement social et certaines collectivités

Cette décision va réduire le coût des emprunts indexés sur le livret A contractés par les bailleurs sociaux et certaines collectivités. Mais le monde HLM s'inquiète déjà pour l'année 2026, après les annonces faites sur le budget. 

Par A.W.

C’est « un signal fort en faveur du logement social ». Le gouvernement s’est félicité, mardi, d’avoir, une nouvelle fois, décidé d’abaisser, dès le mois d'août, le taux du livret A à 1,7 %. En raison d’un net recul de l’inflation par rapport à ces dernières années.

Une baisse inédite par son ampleur depuis 2009 et qui est la deuxième cette année. Alors que le taux était encore à 3 % au début du mois de janvier, il avait été une première fois réduit à 2,4 % - le taux actuel - avant cette nouvelle révision. Des baisses successives qui se font aux dépens des épargnants, qui vont voir leurs intérêts fondre.

Logement social : un « levier »  pour la construction

« C'est en soi une bonne nouvelle et, accompagnée de soutiens à nos actions, elle doit permettre de poursuivre les investissements au service du droit au logement », s’est ainsi félicitée la présidente de l'Union sociale pour l'habitat (USH), Emmanuelle Cosse, dans un communiqué paru dans la foulée, soulignant que « cette baisse du taux du livret A était attendue, et elle est conforme au niveau d'inflation actuel ».

Une satisfaction qui s’explique par le fait que le livret A finance, historiquement, le logement social - mais aussi, depuis peu, le renouvellement urbain. Résultat, cette décision va réduire le coût des emprunts contractés par les bailleurs sociaux auprès de la Caisse des Dépôts et donc « renforcer leurs marges de manœuvre pour la production et la rénovation des logements sociaux », s’est réjouie la ministre du Logement, Valérie Létard, citée par son ministère via un communiqué. 

Selon ce dernier, « cette mesure est un levier supplémentaire pour atteindre les objectifs fixés par la feuille de route signée par la ministre (du Logement) en février 2025, visant la production de 116 500 logements sociaux et la rénovation de 130 000 logements ». 

Pour autant, l’USH redoute déjà l’année à venir après les annonces de François Bayrou sur le budget pour 2026, qui sont loin d’avoir rassuré le monde HLM. « Les annonces du Premier ministre sur le gel de l'APL et ses silences sur l’ambition de rénovation énergétique et de relance de la production de logements sociaux alimentent nos craintes sur la fragilisation des ménages aux revenus modestes », a ainsi prévenu Emmanuelle Cosse.

L'ancienne ministre du Logement de François Hollande a donc assuré qu’elle serait « extrêmement vigilant[e] quant aux décisions qui seront prises dans les prochains mois dans le cadre du projet de loi de finances pour 2026 ». D’autant que la situation s’est aggravée ces dernières années : alors que 2,7 millions de personnes sont en attente d’un logement social – c’est deux fois plus qu’il y a 20 ans et quatre fois plus qu’il y a 40 ans – , l’offre ne cesse pourtant de diminuer, avec « environ 84 000 logements sociaux financés en 2024 »  contre 124 000 en 2016. 

Collectivités et taux variables

Cette baisse du taux d'intérêt du Livret A va également soulager un certain nombre de collectivités. Celles qui ont contracté des emprunts à taux variables indexés sur celui-ci ont, en effet, été mises en grave difficulté au moment de la crise inflationniste qui a fait passer, en quelques mois, le taux du livret A de 1 à 3 %. 

La raison en est que La Banque des territoires propose à de nombreux maires des emprunts adossés sur le taux du Livret A, à taux variables donc. Mécaniquement, le triplement du taux ces dernières années a entraîné, pour ces communes, une augmentation importante des échéances à rembourser. Avec des intérêts qui ont augmenté de plus de 30 %, par exemple.

Au regard de l’« impact conséquent sur le budget d'une commune emprunteuse, sur plusieurs années », la sénatrice de Moselle Christine Herzog a, d’ailleurs, récemment, demandé au gouvernement quelles solutions il proposait pour les communes « dans cette situation financière délicate »  afin de « leur permettre de continuer à disposer d'un budget d'investissement local ».

Rappelant qu’il avait été décidé de « limiter l’augmentation du taux du livret A à 3 % en février 2023, alors qu'une application automatique de la formule réglementaire aurait donné un taux de 3,3 % », le gouvernement signale, dans sa réponse à la sénatrice, que « les emprunts souscrits sur fonds d'épargne auprès de la Banque des territoires peuvent bénéficier du mécanisme dit de “double révisabilité” [qui] permet de ralentir l'amortissement lorsque le taux d'intérêt augmente afin de lisser les annuités dues par les collectivités ».

Ménages modestes et nucléaire 

Cette décision d’abaisser le taux du livret A est aussi, pourrait-on dire, un « signal fort »  envoyé aux épargnants et aux banques puisque ces dernières auront moins d'intérêts à verser aux premiers, qui eux en ressortent comme les grands perdants. Ce n’est d’ailleurs pas une nouveauté, le taux du Livret A a fait l'objet de fréquentes dérogations ces dernières années, principalement au désavantage des épargnants.

D’autant que cette diminution va entraîner mécaniquement la baisse de taux du Livret de développement durable et solidaire (LDDS) - qui s’aligne toujours sur celui du livret A - et sur le taux du Livret d'épargne populaire (LEP), réservé aux ménages modestes, qui passera quant à lui de 3,5 % à 2,7 %. Contrairement aux deux autres, ce dernier taux a cependant fait l'objet d'un « coup de pouce », car sa formule théorique aurait dû le faire ressortir à 2,2 %. 

« Avec ces nouveaux taux [du Livret A et du LEP, NDLR], nous protégeons l’épargne des Français », a toutefois plaidé Bercy, dans un communiqué, Les Français cumulent plus de 600 milliards d'euros d'épargne sur le Livret A et le LDDS, plafonnés respectivement à 22 950 euros et 12 000 euros. Et si le pays dénombre « presque 12 millions »  de LEP ouverts, il reste toujours loin des 19 millions de personnes qui y sont éligibles.

Si l'argent du fonds d'épargne de la Caisse des dépôts est également fléché, depuis fin 2024, vers des prêts dédiés à la transition énergétique et écologique, il a été également envisagé de le mettre à contribution pour financer la relance du nucléaire en France. Et « même si nous finançons les (réacteurs nucléaires) EPR, on aura toujours assez d'argent pour financer le logement social ou les collectivités locales », a voulu rassuré, en juin dernier sur Franceinfo, le nouveau directeur général de la Caisse des dépôts, Olivier Sichel.

Pour rappel, le taux du Livret A est calculé tous les six mois, mi-janvier et mi-juillet, à partir du taux moyen d'inflation (hors tabac) et d'un taux moyen d'intérêt interbancaire dépendant de la politique monétaire européenne, sur le semestre qui vient de s'écouler. Deux éléments en baisse depuis le début de l'année. 
 

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