Maire-info
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Édition du mercredi 3 janvier 2024
Logement

Les ménages « Dalo » devront désormais être logés hors quartiers prioritaires

Dans une circulaire rendue publique fin décembre, le ministre du Logement, Patrice Vergriete, demande aux préfets de mener des « actions fortes » pour favoriser la mixité sociale dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, faisant même de celle-ci « l'unique priorité » en matière d'attribution.

Par Franck Lemarc

La mixité sociale doit devenir « la première et unique priorité des politiques d’attribution de logement social dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville »  (QPV), indique le ministre chargé du Logement dans une circulaire signée le 18 décembre et rendue publique dix jours plus tard. Concrètement, il s’agit d’augmenter le nombre de ménages plus aisés résidant dans les QPV et de permettre aux ménages les plus pauvres d’en sortir. Il est demandé aux préfets de cesser toute attribution de logements en QPV aux ménages Dalo (droit opposable au logement). 

« Volontarisme » 

Malgré un objectif de mixité sociale dans les QPV affiché depuis des années, les résultats ne suivent pas : les nouveaux arrivants dans le parc social de ces quartiers restent essentiellement des ménages précaires. Pour le ministre, il faut donc changer de braquet et mener une politique « volontariste » , en s’appuyant notamment sur les maires. Le ministre rappelle que le Code de la construction et de l’habitation impose la création dans chaque QPV d'une « commission de coordination »  (élus, bailleurs sociaux, réservataires), chargée de désigner « les candidats pour l’attribution disponibles » . Ces commissions sont à même, explique par exemple le ministre, de décider « d’un dispositif de commercialisation des logements sociaux »  destiné à des ménages plus aisés, ou « d’encourager la mise en place de dispositifs visant à favoriser l’accueil d’une part de jeunes actifs et étudiants ». 

De nombreuses dispositions existent pour favoriser la mixité sociale, et les préfets sont appelés à les faire connaître aux maires, notamment pour ce qui concerne les possibilités de dérogations sur les plafonds de ressource. Il est également demandé d’encourager l’accès des fonctionnaires aux logements situés en QPV. 

Pour espérer faciliter l’accès des ménages les moins pauvres aux QPV, il faudra « adapter l’offre » , c’est-à-dire améliorer la qualité de ces logements. Le ministre demande donc aux préfets d’encourager les opérations de « rénovation lourde » .

Parallèlement, une politique volontariste est également attendue en sens inverse, pour « faire sortir »  les ménages les plus pauvres des QPV. La mesure la plus spectaculaire – et la plus décriée par les associations luttant contre le mal-logement – figure clairement dans la circulaire : « Nous vous demandons de ne plus désigner de candidats ayant bénéficié de la reconnaissance d’un droit au logement opposable (Dalo) en situation sociale ou professionnelle précaire », dans les QPV. 

Le ministre rappelle toutefois que « la mixité sociale dans les QPV ne (doit) pas conduire à l’éviction de l’accès au parc social des ménages défavorisés » , et qu’il faut donc mener un effort particulier pour favoriser l’accès de ces ménages au parc social hors QPV. 

Pour mémoire, la liste des QPV a été modifiée par un décret du 28 décembre 2023. 111 nouveaux QPV font leur entrée dans cette géographie actualisée.

Conférences intercommunales

En annexe de la circulaire est rappelé, sur une dizaine de pages, l’ensemble des dispositifs permettant d’encourager la mixité sociale dans les QPV, qui constituent un « cadre général » . Mais il est « impératif » , rappellent les services du ministère, de laisser aux maires « une marge de manœuvre dans l’attribution des logements sociaux », tout en en restant « dans le cadre des limites et priorités fixées par la loi ». 

Le texte détaille le rôle que vont désormais jouer les CIL (conférences intercommunales du logement), qui réunissent, sous la co-présidence du président d’EPCI et du préfet, « les communes membres de l’EPCI dotées d’un programme local de l’habitat (PLH) approuvé, les bailleurs sociaux, les réservataires, le département, ainsi que des représentants d’associations de locataires ou de personnes mal logées ou sans logement » . Ces instances « peuvent être le lieu où s’engage une réflexion sur les politiques de peuplement »  et où « discuter et fixer les priorités locales » . Il est demandé aux préfets, dans le cadre de ces réunions, « d’appuyer »  le développement de dispositifs tels que « la location voulue » , la définition de « résidences à enjeu de mixité sociale »  issues de la loi 3DS et dont un décret va bientôt « définir les contours ».

La circulaire insiste également sur le rôle que doivent jouer les préfets dans les Caleol (commissions d’attribution et d’orientation du logement), et sur la volonté gouvernementale d’encourager la création de Caleol intercommunales.

Un large chapitre de la circulaire, plus technique, est également consacré aux possibilités de dérogations aux plafonds de ressources pour développer la mixité sociale, ainsi qu’à l’exemption du SLS (supplément de loyer de solidarité) pour les locataires les plus aisés des QPV. 

Enfin, la circulaire détaille les modalités de la « nouvelle politique des loyers »  (NPL) existant depuis 2017, qui a pour finalité « de rendre compatibles les loyers de logements sociaux hors QPV avec les revenus des ménages les plus pauvres en redistribuant les loyers au sein du patrimoine d’un même bailleur social (à somme des loyers plafonds constante) » . Il est demandé aux préfets de soutenir autant que faire se peut les initiatives des bailleurs volontaires pour mettre en place une telle politique. 

Ces instructions du ministre doivent être mises en œuvre immédiatement, et feront l’objet d’une évaluation dans six mois. 
 

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