Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 15 janvier 2025
Jeunesse

Parler de la jeunesse ne suffit pas, il faut s'occuper d'elle, alertent les missions locales 

L'accompagnement des 16-25 ans ne doit pas faire les frais des économies budgétaires, met en garde le réseau des missions locales. Or les réductions de financements annoncées tant par l'État que par certaines régions hypothèquent ce travail quotidien en faveur de leur insertion sociale et professionnelle.

Par Emmanuelle Stroesser

Le message lancé par Stéphane Valli, président de l'Union nationale des missions locales, mardi 14 janvier, est court et cinglant : «  C'est un cri d’alerte sur le financement du réseau ! »  Un cri d'alerte relayé par une campagne nationale « Alerte 16-25 ans »  qui débute ce mercredi.

Un cumul impossible à compenser

En ligne de mire : les baisses « significatives »  du budget alloué par l'État (- 6 % dans le projet de loi de finances 2025, avec un passage de 630 à 600 millions d'euros), le plus gros contributeur des missions locales qui dépendent « à 98 % »  de financements publics, dont 70 % de l'État, 15 % des régions, 10 % du bloc communal et 5 % des départements. 

Si rien n'est définitif concernant le budget 2025, la tendance est suffisamment lourde pour inquiéter, car ce recul se cumule à d'autres baisses « considérables »  déjà constatées du côté des régions. Avec le cas le plus extrême des Pays de la Loire –  « dont le financement est carrément supprimé ». Autres régions citées : l'Île-de-France, « qui a divisé par quatre en trois ans son enveloppe », la région Paca, « qui annonce une baisse de 30 % », ou encore les Hauts-de-France (- 10 %). D'autres régions (Nouvelle-Aquitaine, Normandie, Bretagne), à l'inverse, ont pris l'engagement de ne pas revoir à la baisse leur financement, preuve qu'un autre arbitrage est possible. Et non au détriment des politiques jeunesse.  

Le bloc communal a lui « été très stable ces dernières années, voire a fait progresser sa participation », observe Stéphane Valli. Logiquement, « car le bloc communal est en connexion forte avec les acteurs de terrain, et les missions locales sont généralement présidées par les élus locaux », explique Stéphane Valli, lui-même maire de Bonneville (Haute-Savoie). Cela ne l'empêche pas d'être également inquiet. « Car le bloc communal ne pourra pas compenser les baisses des autres contributeurs, à défaut d'en avoir les moyens, comme c’est mon cas », reconnaît-il. Mais surtout, il redoute qu'en cas d'arbitrage, certaines ne choisissent « pas forcément »  de le faire pencher « en faveur de la jeunesse ». 

Conséquences en cascade

Le réseau repart donc à la bataille médiatique pour rallier les moins informés à sa cause en lançant une campagne de communication. Car les répercussions de ces réductions budgétaires n'auront rien de théorique : elles se traduiront par une dégradation de l'accompagnement des jeunes, préviennent les acteurs du réseau. Si les missions locales font partie du service public de l'emploi, « nous ne sommes pas des opérateurs en charge uniquement de l’insertion professionnelle, mais bien de l’insertion sociale et professionnelle des jeunes, de leur autonomie », souligne avec insistance Stéphane Valli. « Or, les problèmes d'accès au logement, à la santé, etc., deviennent de plus en plus souvent plus importants que l’insertion professionnelle seule. Surtout, l’un ne va pas sans l’autre », dans un contexte où les missions accueillent ces dernières années « de plus en plus de jeunes,  de plus en plus dans des situations compliquées ». En 2023, les missions locales ont accompagné près d’1,1 million de jeunes, dont 425 000 ont été accueillis pour la  première fois. Plus de la moitié n’ont pas le bac. 

Le président de l'UNML ne parle pas encore de fermeture possible de certaines structures, mais d'une dégradation certaine de la qualité de leur accueil, avec des effectifs qui pourraient être réduits dans une proportion de 10 %. Le réseau des 437 missions locales et leurs 6 800 lieux d'accueil risque donc de réduire la voilure, en qualité et en quantité, « alors que ces dernières années, dans le cadre notamment de la stratégie de lutte contre la pauvreté, on avait réussi à développer des réponses exigeantes pour la jeunesse ». Autre crainte : devoir contingenter l'accès à certains dispositifs dont les ambitions ont déjà été limitées depuis 2024. Comme le contrat d'engagement jeune. « Nous avions un objectif d'au moins 200 000 entrées, un objectif dépassé l'an dernier de 10 000, et on nous dit aujourd'hui que c'est un plafond ! », se désole Stéphane Valli. 

Pour l'UNML, le seul avenir possible passe donc par « des moyens stables ou au moins pas de diminution significative ». Et pourquoi pas une « remise à plat de l'architecture du financement du réseau »  ; surtout si cela permet d'assurer une pluriannualité budgétaire et de formaliser l'ancrage territorial des missions, assure Stéphane Valli.

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