Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 7 juillet 2008
Immigration

Politique d'«immigration choisie»: une commission du Conseil constitutionnel en nie non seulement la légalité mais aussi tout l'intérêt

Au moment où la France doit, ce lundi à Cannes, présenter aux ministres européens de l'Intérieur et de la Justice un projet de pacte européen sur l'immigration et l'asile - qu'elle espère voir adopté en octobre -, le rapport des treize sages de la commission du Conseil constitutionnel français sur la politique d’immigration choisie estime que cette politique ne respecte pas le «principe d’égalité» entre tous les citoyens, quelle que soit leur nationalité, garanti par la Constitution et les traités internationaux dont la France est signataire. Le rapport de la commission, animée par Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, que le quotidien "Libération" (7/7) s’est procuré avant sa remise le 11 juillet prochain à Brice Hortefeux, ministre de l’Immigration, nie tout besoin de changement dans la «maîtrise des flux -particulièrement, les quotas - et la simplification du contentieux des étrangers», aujourd’hui confié à deux juridictions, administrative et judiciaire. Dans sa lettre de mission, le ministre lui demandait d’étudier «deux domaines de la politique d’immigration»: la volonté d’établir des quotas d’étrangers admis à entrer en France (immigration «choisie») et des quotas par nationalité ou région du monde («quotas ethniques»). «Une politique de quota migratoire global ou par grand type d’immigration n’est pratiquée nulle part en Europe», expliquent les sages. Pour la commission, quota est synonyme de «fixation unilatérale et opportuniste de contingents d’entrées». Sur le fond, la commission Mazeaud juge que «des quotas migratoires contraignants seraient irréalisables ou sans intérêt». Quant aux «quotas ethniques», elle estime, outre leur inconstitutionnalité, que «les contingents par pays» ne pourraient être justifiés que «par l’intérêt commun du pays d’accueil et du pays d’origine». Concernant l’immigration familiale, principale porte d’entrée en France, «les pouvoirs publics nationaux ne disposent pas d’un pouvoir discrétionnaire pour déterminer les flux», expliquent les conseillers constitutionnels. La Constitution et les traités internationaux garantissant le droit de vivre en famille, l’Etat ne peut «s’arroger le droit de fixer le nombre d’étrangers autorisés à entrer en France, chaque année, à la suite d’un regroupement familial ou d’un mariage mixte.» Par ailleurs, s’agissant de l’immigration de travail, «des quotas [par branche ou par métier, NDLR] sont envisageables au niveau national ou européen, mais ne sont pas indispensables à la maîtrise du flux». Enfin, toujours selon le rapport analysé par "Libération", une politique de quotas n’aurait pas de sens pour l’immigration irrégulière. Elle risque même de l’encourager: «L’affichage d’un contingent pourrait avoir, paradoxalement, un effet incitatif.» Pour faire sauter les verrous législatifs, Brice Hortefeux avait demandé aux experts d’étudier l’opportunité d’une révision constitutionnelle. «Unanime», la commission invite «les pouvoirs publics à ne pas s’engager dans cette voie».

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