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Édition du lundi 1er décembre 2025
Handicap

Remboursement des fauteuils roulants : la fin du parcours du combattant espérée par les associations

C'est aujourd'hui qu'entre en vigueur la très attendue réforme du financement des fauteuils roulants : les « VPH » (véhicules pour personnes en situation de handicap) seront désormais remboursés à 100 % par l'Assurance maladie. Explications. 

Par Franck Lemarc

C’était un engagement pris par le chef de l’État en 2023, à l’occasion de la Conférence nationale du handicap : le financement « injuste et indigne »  des fauteuils roulants serait entièrement remis à plat et sans reste à charge pour les personnes concernées, qu’il s’agisse de handicap provisoire ou permanent. 

Cette réforme entre en vigueur ce lundi 1er décembre. Elle concernera l’ensemble des dispositifs (manuels, électriques, modulaires, spécifiques ou sportifs). En France, chaque année, 150 000 fauteuils roulants sont achetés et 500 000 loués.

Plus de reste à charge et délais restreints

Jusqu’à présent, l’obtention d’un fauteuil roulant était à la fois compliquée et coûteuse : le financement devait passer par la constitution d’un dossier après de la MDPH (maison départementale des personnes handicapées), avec des délais pouvant dépasser les 18 mois, en mobilisation parfois jusqu’à cinq financeurs différents (MDPH, complémentaires santé, fonds divers)  et, surtout, avec un reste à charge pouvant atteindre plusieurs milliers d’euros. Une situation particulièrement choquante, dans la mesure où une proportion importante de personnes handicapées vit avec de très faibles moyens. 

Désormais, les choses deviennent plus simples : l’Assurance maladie devient à la fois l’interlocuteur et le financeur unique. C’est elle qui va recevoir, examiner, valider et financer les demandes. Si le distributeur pratique le tiers payant, il n’y aura pas d’avance de frais pour le demandeur. La réforme prévoit également un encadrement des délais, qui devraient être au maximum de 15 jours « pour les fauteuils les plus courants »  et de deux mois « pour les besoins très spécifique » , indique le ministère chargé du handicap. Le principe du « silence vaut accord »  s’appliquera : en cas de non-réponse de l’Assurance maladie, le devis sera réputé validé.

Pas de plafond

Concrètement : le médecin va prescrire un fauteuil adapté, éventuellement après consultation de l’ergothérapeute pour affiner la demande. La demande est transmise à un fournisseur de matériel qui se chargera de faire passer la demande à l’Assurance maladie. L’usager ne devrait plus avoir de démarche à effectuer. 

Le remboursement se fera sans plafond, indique le gouvernement, qui précise qu’il s’attend, dans certains cas spécifiques, à rembourser des sommes pouvant aller jusqu’à plusieurs dizaines de milliers d’euros pour un dispositif. Le changement est considérable : jusqu’ici, indique le site handicap.fr, un fauteuil manuel était remboursé « autour de 600 euros »  – il pourra désormais l’être jusqu’à 6 000 euros. Les fauteuils les plus chers (fauteuils électriques à positionnement) pourront bénéficier d’un remboursement allant jusqu’à 21 000 euros, sans compter les options qui seront, elles aussi, prises en charge. 

Les réserves des médecins

Pour l’APF (Association des paralysés de France), c’est un aboutissement après « un combat de plus de 20 ans », « une révolution que nous attendions et que nous sommes fiers d’avoir contribué à faire naître » , se réjouit Pascale Ribes, présidente de l’association. La prudence est toutefois de mise : un « comité de suivi » , associant l’Assurance maladie, les experts, l’administration, les médecins et les associations, sera mis en œuvre dès le mois de janvier et se réunira chaque trimestre. Il veillera, selon l’APF, à s’assurer que « que tous les modèles d’aides à la mobilité et toutes leurs options, adjonctions et accessoires, seront bien pris en charge dans le cadre d’un parcours d’acquisition fluide, malgré la multiplication des déserts médicaux et dans un marché des aides techniques en pleine évolution ». 

Seul bémol dans le concert de satisfecit qui a fait suite à cette réforme : les inquiétudes de la Fédération des médecins de France (FMF). Dans une tribune publiée hier et intitulée Fauteuils roulants, le grand foutoir, les médecins s’inquiètent de la complexité des dossiers à constituer. « La prescription se fera au moyen de deux formulaires, la Fiche d’évaluation des besoins (9 pages) et la Fiche de préconisation (8 pages) », déplore la FMF. Pour les besoins complexes, il faudra réunir « une équipe pluridisciplinaire », et les prescripteurs devront suivre une formation spécifique. 

La complexité du parcours, pour le fournisseur, fait craindre à la FMF que « la très grande majorité »  des pharmaciens se désengage du dispositif. De plus, les médecins déplorent certaines dispositions, comme « la limitation de la location de courte durée à 6 mois, au bout desquels on doit acquérir le fauteuil loué ; et si finalement ce dernier ne convient pas et que le patient refuse l’achat, il ne peut plus bénéficier d’une autre VPH avant un délai de carence d’un an ». 

Il reste à voir comment cette réforme s’appliquera dans le temps – mais quoi qu’en dise la FMF, elle apparaît comme un réel progrès en particulier pour les patients les plus modestes. Il faut maintenant, comme l’espère l’association AFM Téléthon, que les mêmes principes et le même modèle s’appliquent « à toutes les aides techniques qui sont aujourd’hui inaccessibles à de nombreuses personnes. Ce qui est devenu possible pour les fauteuils doit le devenir pour toutes les autres aides techniques indispensables à la vie de nos concitoyens en situation de handicap. » 

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