Maire-info
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Édition du mardi 1er mars 2022
Forêts

L'accès des experts forestiers aux données cadastrales simplifié par une nouvelle loi

Une loi visant à simplifier l'accès des experts forestiers aux données cadastrales a été publiée ce matin au Journal officiel. Une mesure qui participe à encourager la gestion forestière.

Par Lucile Bonnin

Quelques jours après la signature d’un accord de filière « chêne », « pour répondre à l’impérieuse nécessité de sécuriser l’approvisionnement des scieries situées sur le territoire national » , les avancées en matière de gestion et de gouvernance de la forêt continuent. 

Une loi visant à simplifier l'accès des experts forestiers aux données cadastrales a été adoptée le 17 février dernier et publiée ce matin au Journal officiel. La question de l’accès aux cadastres n’est pas récente mais le sujet a été remis au goût du jour lors des Assises de la forêt et du bois. 

Comme l’a expliqué Julien Denormandie, ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation, lors de l’adoption définitive de la proposition de loi, « ces assises ont permis, en associant les territoires à la réflexion, de nourrir une vision partagée des actions concrètes à mettre en œuvre pour faire avancer la filière forêt-bois, aujourd’hui et demain. » 

Pérenniser une expérimentation  

Entre janvier 2016 et octobre 2017, une expérimentation prévue par la loi d’avenir pour l’agriculture et la forêt (LAAF) de 2014 prévoyait une habilitation pour les gestionnaires forestiers à accéder à des données du cadastre. Cette autorisation temporaire permettait aux experts forestiers d’accéder aux informations cadastrales situées dans le périmètre géographique d'exercice de leurs missions. 

Le 14 décembre 2020, une proposition de loi a été déposée afin de pérenniser cette habilitation et ainsi répondre à la demande exprimée par les gestionnaires. « Déjà passé par le filtre du débat parlementaire, l'article unique de ce texte reprend à l'identique un dispositif adopté par le Sénat dans la loi ASAP » , explique sa rapporteure, Anne-Catherine Loisier.

Mercredi 9 février 2022, la commission des affaires économiques du Sénat a adopté sans modification le texte initial. Puis, lors de sa séance publique du 17 février 2022, le Sénat a adopté sans modification la proposition de loi.

Vers une simplification des démarches 

« La grande majorité de la surface forestière française est (…) atomisée entre de nombreux propriétaires privés - 3,8 millions de propriétaires possèderaient ainsi près de 76 % de la surface forestière, exposait Patricia Schillinger lors de l’examen en commission de la proposition de loi. Cette extrême parcellisation du foncier forestier pose problème en matière de gestion. « La matrice cadastrale est en effet le seul instrument grâce auquel il est possible d’identifier les propriétaires de parcelles forestières » , a confirmé Julien Denormandie. 

Ainsi, l’unique article de la loi désormais promulguée facilite l’accès au cadastre pour trois familles de gestionnaires : les experts forestiers, les organisations de producteurs (coopératives), et les gestionnaires forestiers professionnels.

Pour rappel, le droit existant permet à toute personne d’accéder en mairie aux données cadastrales de cinq parcelles par semaine mais la loi tout juste publiée permet à ces acteurs de consulter les données « sans limitation du nombre de demandes »  tout en en informant « le maire des communes concernées »  à chaque fois. La loi précise que « ces données leur sont communiquées afin de leur permettre de mener des actions d'information à destination des propriétaires identifiés sur les possibilités de valorisation économique de leurs bois et forêts. » 

Un accès qui reste limité 

Si la proposition de loi n’a pas fait l’objet de modifications, certains vont être déçus par la liste limitative des acteurs concernés. Les exploitants forestiers, les syndicats de propriétaires forestiers ou encore les experts fonciers et agricoles avaient sollicité cet accès plus facile au cadastre.

Tous sont en effet, soit des acteurs économiques, soit des acteurs qui défendent des intérêts privés soit des acteurs non forestiers. « D'autres acteurs ont manifesté leur intérêt pour la mesure, mais il ne semble pas opportun juridiquement de les inclure dans son périmètre » , expliquait Anne-Catherine Loisier, avant d’ajouter que ce texte n’était pas « le véhicule approprié »  car il vise uniquement « à encourager la gestion forestière. » 

Un code de bonnes pratiques attendu 

L’adoption de cette proposition de loi a été accompagnée d’une suggestion de la part de la rapporteure : « Pour sécuriser les gestionnaires dans leur usage des données cadastrales à venir, et surtout protéger les propriétaires de détournements de la loi, un code de bonnes pratiques élaboré par les pouvoirs publics et la filière serait bienvenu. » 

Ainsi, la commission des affaires économiques a appelé à un engagement de la part du ministre pour accompagner « la filière dans l’élaboration d’un code de bonnes pratiques favorisant l’appropriation par les gestionnaires forestiers des règles fixées dans la loi, dans le décret d’application et par la CNIL. Cette proposition figurait d’ailleurs déjà dans un rapport du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) publié en 2019. Ce code de bonnes pratiques pourrait ainsi opportunément clarifier la distinction essentielle entre l’information à diffuser et le démarchage commercial abusif. Il rappellerait les sanctions administratives, voire pénales, en cas d’utilisation des données cadastrales à d’autres fins que la gestion durable et définirait, enfin, des modalités de suivi et d’évaluation des impacts de la mesure. » 

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