Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 14 juin 2013
Environnement

Nitrates : la France condamnée

L’arrêt de la Cour de justice européenne est tombé hier : la France est condamnée pour « manquement »  aux obligations de la directive européenne nitrates de 1991. La Cour reproche – depuis des années – à la France de « sous-estimer »  les zones touchées ou menacées par la pollution aux nitrates : dès 2007, la Commission européenne a entamé une procédure contre l’État français, estimant que son recensement des zones vulnérables aux nitrates était incomplet : il manque, selon les analyses de la Commission, dix zones vulnérables dans le recensement, dans les bassins Adour-Garonne, Rhône-Méditerranée, Rhin-Meuse et Loire-Bretagne. La France avait alors obtenu un délai (jusqu’à fin 2011) pour effectuer un recensement complet. Mais à ce jour, il n’est toujours pas fait, d’où la condamnation d’hier.
Le montant de l’amende n’a pas été décidé par la Cour, dont l’arrêt indique simplement que « la République française a manqué aux obligations qui lui incombent »  et qu’elle est « condamnée aux dépens ». L’amende qui pourrait être assortie à cette condamnation pourrait se chiffrer en dizaines de millions d’euros, sans compter une astreinte qui pourrait, selon les spécialistes, dépasser les 100 000 euros par jour.
Les ministres français de l’Écologie et de l’Agriculture, Delphine Batho et Stéphane Le Foll, ont immédiatement réagi à cette décision par voie de communiqué, en estimant qu’elle était « prévisible »  et en l’imputant à « l’inaction des précédents gouvernements ». Delphine Batho annonce qu’elle va rencontrer d’urgence le commissaire européen à l’Environnement, Janez Potocnik, pour lui « présenter les mesures correctives »  envisagées, et tenter d’éviter une lourde amende.
Les ministres en ont profité pour annoncer ou rappeler un certain nombre de mesures qu’ils s’apprêtent à prendre dans le domaine de la lutte contre la pollution aux nitrates : un arrêté fixant les mesures de prévention dans les zones vulnérables, instaurant des bandes végétalisées le long des cours d’eau et réglementant les conditions d’épandage, est « en cours d’examen »  et sera publié « en septembre 2013 ». Un autre arrêté, fixant les allongements de période d’interdiction d’épandage lorsque les conditions climatiques l’exigent « entrera en vigueur au premier trimestre 2014 ». Des actions vont de plus être multipliées pour « substituer l’azote minéral par l’azote organique provenant des effluents d’élevage ou contenu dans les sous-produits issus de la méthanisation ».
Des députés européens défenseurs de l’environnement se sont exprimés hier sur cette condamnation. José Bové l’a saluée d’un lapidaire « Bien fait ! », tandis que l’ancienne ministre de l’Écologie, Corinne Lepage, a dénoncé « l’incurie »  des gouvernements. Elle accuse à demi-mot le gouvernement de double langage, puisque, derrière les dénégations de Delphine Batho, « un arrêté a été pris en catimini pour prolonger encore des pratiques inacceptables », dénonce Corinne Lepage. Allusion à la décision prise en mars dernier, suite à une concertation avec le monde agricole, de laisser trois années supplémentaires aux éleveurs, jusqu’en 2016, pour mettre aux normes leurs installations en matière de lutte contre les nitrates.

Télécharger l'arrêt de la Cour européenne de Justice

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