Les missions locales : un accompagnement indispensable pour les jeunes ruraux
Par Lucile Bonnin
On compte aujourd’hui en France 426 missions locales et près de 6 800 lieux d’accueil qui maillent l’ensemble du territoire métropolitain et ultramarin. Premier échelon de l'accompagnement des 16-25 ans, les missions locales constatent depuis septembre une hausse de 8 % des premiers accueils, notamment de jeunes mineurs (+ 10 %).
Les missions locales permettent de répondre aux besoins des jeunes et notamment dans des territoires enclavés comme dans les zones rurales, « où les jeunes rencontrent des difficultés spécifiques, souvent même plus intenses que celles rencontrées dans les milieux urbains ou périurbains », explique Didier Rumeau, président de la commission associative nationale Ruralité de l’Union nationale des missions locales (UNML).
Des structures plébiscitées par les jeunes
Le succès des missions locales ne se dément pas. Selon le baromètre des missions locales 2025 publié il y a quelques jours, 96 % des jeunes se déclarent satisfaits des services rendus par leur mission locale.
Les résultats de l’enquête de satisfaction montrent que « les jeunes soulignent la pertinence d’un accompagnement individualisé, centré sur la construction de leur projet professionnel et l’accès à l’emploi durable » et que « les entreprises valorisent la réactivité, la connaissance du terrain et la capacité des missions locales à proposer des profils adaptés à leurs besoins. »
Enfin, en 2025 la majorité des jeunes se sont engagés dans un accompagnement relativement récemment : 58 % depuis moins d’un an, 24 % entre 1 et 2 ans, 10 % entre 2 et 3 ans, 9 % plus de 3 ans. Au total, 67 % des jeunes sont inscrits dans un accompagnement : 72 % CEJ (Contrat d’engagement jeune), 19 % Pacea (Parcours contractualisé vers l’emploi et l’autonomie), 6 % Garantie jeunes, 2 % Service civique.
Enquête sur les particularités du monde rural
20 % des jeunes accompagnés par les missions locales résident dans une commune rurale. « Pour les accompagner, 367 missions locales interviennent directement sur ces territoires » et « 86 % du réseau couvrent au moins une commune rurale » . En 2024, ces structures ont accompagné 217 830 jeunes.
La deuxième édition de l’Observatoire national du réseau des missions locales – qui a été publié il y a quelques jours – consacre cette année un dossier thématique très riche sur les jeunes résidant en milieu rural accompagnés en mission locale. Le but : prendre en compte « la spécificité de la situation des jeunes en milieu rural, et des modalités d'action à leur égard » . En compilant enquêtes, témoignages et recherches, ce dossier permet de mettre en perspective la responsabilité des missions locales qui est d’accompagner les jeunes dans leur parcours vers l’emploi, la formation et plus largement l’autonomie ; et les besoins des jeunes ruraux.
La mobilité apparaît comme un enjeu central pour ces jeunes de milieux ruraux. 70 % des jeunes sondés ont estimé que sans le permis de conduire, un jeune ne peut pas trouver de travail. L’enquête montre qu’au-delà des obstacles matériels liés à la mobilité (absence de transport en commun ou manque de moyens financiers par exemple) les freins psychologiques sont aussi puissants et souvent invisibles chez les jeunes ruraux. Ainsi, il arrive que « les missions locales négocient avec des associations, des voisins ou avec d’autres jeunes accompagnés pour trouver un vélo, organiser un covoiturage ou trouver un endroit où passer la nuit » lorsqu’un jeune doit se déplacer pour un entretien professionnel par exemple.
La précarité qui s’étend en France n’épargne pas non plus les jeunes ruraux et tous les milieux sont concernés. « Avant, les plus précaires, c’étaient les classes moyennes et classes plus basses – là ça infuse à tous les niveaux » , explique une conseillère d’une mission locale. La précarité est très visible dans les ruralités agricoles et touristiques « où l’économie locale repose sur des emplois précaires et où le logement est souvent vétuste, voire insalubre ».
Face à ces situations, « les conseillers soulignent que leurs missions dépassent largement l’insertion professionnelle pour toucher à la socialisation, à la mobilité, à la santé, à l’accès aux droits fondamentaux ».
L’enquête rappelle enfin qu’il n’y a pas « une ruralité » mais « des ruralités » avec des réalités différentes. Si chaque territoire a sa problématique, les missions locales s’adaptent elles aux réalités locales, et c’est ce qui fait leur force. À Albertville par exemple, « la mission locale agit dans un territoire où le tourisme structure toute l’économie et impose ses propres contraintes ». Elle s’efforce donc de « transformer la contrainte de la saisonnalité en opportunité » grâce à des initiatives locales. À Cadillac, c’est le déficit d’acteurs dédiés à la jeunesse sur son territoire qui pose problème. Alors, la mission locale s’impose comme « l’un des rares repères fixes pour des jeunes parfois sans autre ressource ».
Baisse des crédits pour 2026 finalement contrée au Sénat
« Les subventions nationales représentent en moyenne 67 % des ressources financières du réseau des missions locales » , peut-on lire dans le rapport.
Pourtant le gouvernement prévoit dans le projet de loi de finances pour 2026 – après une première baisse de 5,6 % en 2025 – de diminuer de 13 % le budget alloué au soutien des missions locales (programme 102, « Accès et retour à l'emploi » ) (lire Maire info du 6 novembre).
Le Sénat a adopté un certain nombre d'amendements au budget de la mission Travail et Emploi du PLF 2026 ajoutant ainsi 77,8 millions d'euros pour les missions locales et restaurant les crédits au niveau de 2025.
Comme l’a rappelé la sénatrice du Pas-de-Calais Cathy Apourceau-Poly, « en cette fin d'année 2025, quelque 20 % des missions locales sont déjà en grande difficulté financière et avertissent sur leurs difficultés à mener à bien leur action pour la réussite des jeunes. » Le maintien de cet engagement de l’État est certes une bonne nouvelle mais ne renforce pas les moyens de ces dernières.
Enfin, les critères de financement des missions locales ne servent pas réellement les intérêts de ces structures dans le milieu rural. Étant donné que « la majeure partie de ces financements est distribuée selon des critères de volume » (nombre de jeunes entrés en CEJ par exemple), cette logique pousse les missions locales rurales à élargir leur zone de couverture. En moyenne, elles interviennent « sur au moins un territoire rural couvrent 94 communes, contre 82 en moyenne pour l’ensemble ». « Cette extension entraîne non seulement une multiplication des interlocuteurs politiques locaux, mais aussi une augmentation des distances à parcourir pour les professionnels. Il ne s’agit pas seulement de réclamer davantage de moyens pour les missions locales rurales, mais de faire prendre conscience que sur huit heures de travail effectif, deux peuvent être absorbées par les déplacements, sans possibilité réelle de les compenser. »
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