Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 17 octobre 2022
Social

Des mesures pour le pouvoir d'achat, avant une semaine de tous les dangers pour le gouvernement

La Première ministre et le président de la République ont, chacun de leur côté, fait ces dernières heures des annonces en matière de pouvoir d'achat, à l'orée d'une semaine qui s'annonce difficile sur le plan social et politique. 

Par Franck Lemarc

Alors que trouver de l’essence relève encore, ce matin, du parcours du combattant sur une grande partie du territoire, Élisabeth Borne a annoncé que la remise de 30 centimes par litre financée par l’État allait être prolongée au moins jusqu’à « mi-novembre », alors qu’elle devait normalement diminuer, pour passer à 10 centimes par litre, le 31 octobre. 

Ristourne

Cette annonce, intervenue hier soir pendant le journal de 20 heures de TF1, est en partie contradictoire avec les propos du ministre chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, qui venait, le matin même, de déclarer qu’il n’était pas question de changer le calendrier prévu. Gabriel Attal avait évoqué le coût de cette mesure pour les finances publiques et le fait que, dans les régions frontalières notamment, des automobilistes étrangers en profitaient : « Je pense que l’argent du contribuable français n’a pas vocation à subventionner le plein de nos voisins indéfiniment. » 

Ceci dit, le gouvernement n’envisage pas, en effet, de prolonger la mesure « indéfiniment », mais seulement de la proroger d’une quinzaine de jours, ce qui ne semble pas illogique puisque de très nombreux Français, dans l’incapacité de faire le plein en ce moment, n’en profitent pas. 

La Première ministre a également annoncé hier que le groupe Total avait lui aussi accepté de prolonger sa propre ristourne (20 centimes par litre) pendant la même période. 

Ces annonces seront évidemment bien accueillies par les automobilistes confrontés, en plus de la pénurie, à une hausse importante des prix ces derniers jours. Elles le sont bien moins du côté des associations de défense de l’environnement, comme Réseau action climat qui dénonce une décision « climaticide » : « Le gouvernement prétend agir contre le changement climatique mais il souffle sur le feu en prolongeant la remise sur le carburant pour tous », écrit l’association. 

Du côté des pénuries d’essence, la situation est, aux dires du gouvernement, en légère amélioration, pas forcément perceptible toutefois dans de nombreuses régions. La Première ministre a fermement demandé aux salariés de Total, hier, de mettre fin à la grève – appel qu’ils n’ont apparemment pas entendu puisque la grève a été reconduite, ce matin, dans les cinq sites touchés. Le ton a été le même, hier, chez Gabriel Attal, qui a jugé « inacceptable »  la poursuite de la grève, parlant de « quelques syndicalistes qui s’assoient sur les intérêts de millions de Français ». Le patron des patrons, Geoffroy Roux de Bézieux, a également fustigé « 150 personnes qui prennent les Français en otage »  et exigé des « réquisitions ». 

Bonus écologique

Sur le thème du pouvoir d’achat, le président de la République a également annoncé des mesures, cette fois sur le dossier de la mobilité électrique. Attendu à l’ouverture du Mondial de l’Auto, ce matin, le chef de l’État a annoncé dans une interview au quotidien Les Échos que le bouclier tarifaire va être étendu « aux bornes de recharge des voitures électriques, afin que les prix « restent raisonnables ». 

Le président de la République a également annoncé une augmentation du « bonus écologique »  pour « la moitié des ménages, les plus modestes ». Ce bonus de 6 000 euros sur l’achat d’une voiture électrique sera porté à 7 000 euros. Il est valable pour les véhicules de moins de 47 000 euros. Par ailleurs, Emmanuel Macron a annoncé qu’un plan permettant la location longue durée de voitures électriques pour « 100 euros par mois », là encore à destination des ménages modestes, serait lancé « au deuxième semestre 2023 ». 

Risques sociaux et politiques

Ces annonces interviennent dans un contexte socialement tendu, alors qu’une grève interprofessionnelle doit se dérouler demain, à l’appel de plusieurs syndicats, pour exiger des hausses de salaire face à l’inflation. Cette grève va également toucher la fonction publique territoriale, la CGT ayant lancé un appel dans les trois versants de la fonction publique, notamment pour réclamer une augmentation « de 10 % »  du point d’indice et l’indexation de celui-ci sur l’inflation. 

La semaine sera également compliquée sur le terrain politique, puisque le gouvernement ne fait pas mystère de faire jouer l’article 49-3 pour mettre fin aux débats sur le projet de loi de finances pour 2023, comme l’a confirmé hier la Première ministre. L’exécutif semblait, dans un premier temps, déterminer à le faire dès aujourd’hui, mais la perspective de faire jouer ce mécanisme à la veille de la manifestation du 18 octobre l’a fait changer d’avis, et le 49-3 ne devrait être utilisé que mercredi ou jeudi. 

L’usage du 49-3 n’est, cette fois, pas sans risque pour l’exécutif, contrairement aux mandatures précédentes où il disposait d’une confortable majorité à l’Assemblée nationale. Une motion de censure sera en effet déposée et, si elle devait être votée – ce qui n’est arithmétiquement pas impossible –, le gouvernement tomberait.

Le chef de l’État a d’ores et déjà annoncé que si cette situation devait advenir, il dissoudrait l’Assemblée nationale, provoquant alors la tenue de nouvelles élections législatives. 

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