Maire-info
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Édition du mercredi 18 septembre 2019
Stationnement

Décentralisation du stationnement : un rapport plus nuancé qu'il n'y paraît

Les sénateurs Thierry Carcenac et Claude Nougein ont rendu public hier leur rapport, fait au nom de la commission des finances, sur « le recouvrement des amendes de circulation et des forfaits de post-stationnement ». Si la synthèse de quatre pages de ce rapport apparaît particulièrement sévère avec le système, le rapport complet, lui, est plus nuancé et ne remet pas en cause la réforme. 
« Le recouvrement : un système en difficulté », « des chiffres préoccupants », peut-on lire, en gras, en page 1 et 2 de la synthèse. Rien de surprenant, dans ces conditions, que les grands titres de la presse soient, ce matin, eux aussi « à charge » : « Un nouveau système complexe et inefficace »  pour LCI, « Règles absurdes et usagers perdus »  pour l’AFP, « Alerte sur un système qui explose », pour Capital, « Le grand bazar du recouvrement des amendes »  pour Le Figaro… n’en jetez plus ! 
Que dit réellement le rapport des deux sénateurs ? Il pointe, en effet, un taux de recouvrement des amendes insuffisant – pas seulement pour les amendes de stationnement mais y compris pour les amendes routières. En cause : la multiplicité des intervenants, la complexité du système, le manque de moyens criant de l’agence chargée de centraliser les recouvrements, l’Antai. 
Pour ce qui concerne spécifiquement la dépénalisation et la décentralisation du stationnement payant, mises en place par la loi Maptam de 2014 à partir du 1er janvier 2018, les rapporteurs se montrent très nuancés : si la réforme n’a pas encore « tenu toutes ses promesses », elle a déjà permis « un taux de paiement spontané en hausse ». Les rapporteurs rappellent, ce qui n’est pas anodin, que « les objectifs premiers de cette réforme n’étaient pas budgétaires » : « La réforme visait moins à accroître les recettes des collectivités qu’à améliorer le fonctionnement de la cité et à développer des projets de mobilité durable. »  Rappelons, pour mémoire, que les recettes supplémentaires issues du stationnement payant décentralisé, doivent obligatoirement être affectées à l’amélioration de la mobilité.  Ces recettes, si l’on en croit une première estimation faite par la DGCL (lire article ci-dessus) s’élèveraient à quelque 500 millions d’euros pour l’année 2019.
Selon les premières études menées par le Gart (Groupement des autorités responsables du transport), les taux de paiement spontané seraient en hausse et atteindraient « en moyenne 60 à 70 % ». Le taux de recouvrement progresserait de deux points, tout en restant « insuffisant »  selon les rapporteurs (26,4 % en 2018 contre 24,3 en 2017). 
Selon le rapport toujours, les collectivités ont mené « un important effort d’adaptation », ce qui a évidemment eu un coût. L’entrée en vigueur de la réforme « a pu susciter des tensions au niveau des relations financières et comptables entre les communes, les métropoles et le DDFiP ». Ces problèmes sont aujourd’hui « pour la plupart résolus ». 

Des recommandations… à l’État 
Les rapporteurs se livrent à un certain nombre de recommandations, dont la majorité est adressée non aux collectivités mais à l’État : lutter contre la fragmentation des acteurs impliqués en instaurant « un point de contact unique », « clarifier les instructions données aux collectivités », en particulier sur la jurisprudence, améliorer fortement le système informatique utilisé, etc. Relevant de graves dysfonctionnement pour les personnes en situation de handicap – qui doivent payer le FPS avant de pouvoir le contester – la mission recommande « de dispenser du paiement préalable les personnes à mobilité réduite titulaires d’une carte de stationnement »  et de continuer les travaux sur le sujet de la falsification de ces cartes. 
Pour les responsables du Gart, joints ce matin par Maire info, ce rapport « pointe plusieurs dysfonctionnements que nous, collectivités, avons constatés et signalés depuis longtemps – en particulier sur la question de la fraude aux cartes de stationnement. Ce qu’il dit sur la faible efficacité du recouvrement est vrai, mais c’est quelque chose qui ne pourra être réglé qu’au niveau de l’État. »  Les préconisations du rapport vis-à-vis de l’Etat sont donc globalement partagées par le Gart.

« Disparition »  de la Mids
Le Gart retient surtout que ce rapport « ne remet absolument pas en cause l’esprit de la réforme ». « Cette réforme est positive, insistent les responsables de l'association, absolument tous les maires que nous rencontrons le disent. En revanche, nous ne pouvons que regretter que l’Etat se soit un peu trop rapidement désintéressé du sujet… ». Une façon de rappeler la (trop) rapide disparition de la Mids (mission interministérielle pour la décentralisation du stationnement). 
Même avis du côté de l’AMF, où l’on estime, ce matin, qu’une telle réforme prend forcément plusieurs années pour devenir pleinement opérationnelle, et qu’il faut « laisser du temps au temps ». L’AMF regrette également la disparition de la Mids, mais rappelle qu’en revanche, le CTL (Comité technique de liaison) que la Mids animait, et auquel participent tant l’AMF que le Gart, existe toujours, et « qu’il se réunit régulièrement pour accompagner la mise en place de la réforme ». 

Franck Lemarc

Télécharger le rapport des sénateurs.


 

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