Maire-info
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Édition du vendredi 16 décembre 2022
Fonction publique territoriale

Dans quel cas un employeur territorial peut-il refuser une autorisation d'absence à un militant syndical ?

Le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques vient d'apporter une réponse à un sénateur qui s'interrogeait sur la conciliation de l'exercice du droit syndical chez les agents territoriaux et la continuité du service public. Décryptage.

Par Franck Lemarc

C’est le sénateur socialiste de la Sarthe Thierry Cozic qui a interpellé le gouvernement, l’été dernier, sur la question de l’exercice du droit syndical dans les communes, rappelant que le Conseil constitutionnel place au même niveau (« principe de valeur constitutionnelle » ) l’exercice du droit syndical et la continuité du service public. 

Comment concilier ces deux impératifs ? Dans certaines petites communes notamment, la présence d’un ou plusieurs agents syndiqués qui exercent, tout à fait normalement, leur activité militante, peut « désorganiser »  le service public. Le sénateur cite un exemple extrême, certes, mais parlant : « Voici l'exemple d'une petite commune, où deux agents du même service périscolaire sont syndiqués. Ils bénéficient d'une décharge d'activité de service (DAS) pour motif syndical, correspondant à 70 heures par mois pour l'une et 60 heures pour l'autre, ainsi que d'autorisations d'absence pour motif syndical (…). Sur une durée de 8 mois, un agent n'a été présent sur son poste que 35 heures au total et l'autre agent a effectué un temps de présence sur le service sensiblement identique. »  Le sénateur déplore que cette situation « déstabilise le service public, déconcerte les usagers (…) et maintient le personnel remplaçant dans la précarité ». En outre, la situation n’est pas sans conséquence pour les finances de la commune : « Même si les absences des agents syndiqués sont partiellement compensées par les remboursements effectués par les centres de gestion (…), il est resté à la charge de (cette) commune pour 2021, la somme de 10 459,26 euros ». 

Le sénateur a donc demandé au ministre « quelles mesures concrètes il compte mettre en œuvre afin de garantir l'expression du droit syndical dans les petites collectivités territoriales sans que cela ne déstabilise structurellement le fonctionnement des services de ces dernières ». 

Nécessités de service

Le ministère de la transformation et de la fonction publiques n’annonce aucune « mesure concrète »  nouvelle, mais rappelle le droit : dans un certain nombre de cas, l’employeur public peut refuser des autorisations d’absence, voire des décharges d’activité de service (DAS), pour assurer la bonne marche du service. 

Concernant les autorisations d’absence, certaines sont « de droit », d’autres sous réserve des nécessités du service, rappelle le ministère. Sont par exemple de droit les autorisations d’absence pour siéger dans les organismes consultatifs ou « pour participer à des réunions de travail ou des négociations ». En revanche, des autorisations d’absence pour assister à des congrès syndicaux ou des réunions « de leurs organismes directeurs »  ne sont pas automatiquement accordées : L'autorité territoriale ne doit accorder cette autorisation qu’en « l'absence d'un motif s'y opposant tiré des nécessités du service ». Le ministère précise, en s’appuyant sur plusieurs jurisprudences, que « le refus tiré des nécessités de service peut être en relation avec le nombre élevé des autorisations demandées et les dysfonctionnements qui en résultent, ou résulter de ce que le service aurait été dans l'impossibilité de fonctionner compte tenu des congés annuels accordés aux autres agents ou du champ de compétence des agents restés présents ». 

Concernant les DAS, « l'article 20 du décret du 3 avril 1985 prévoit que si la désignation d'un agent est incompatible avec la bonne marche du service, l'autorité territoriale motive son refus et invite l'organisation syndicale à porter son choix sur un autre agent ». Il est donc « légal »  de refuser une DAS ou de ne l’accorder que « partiellement », si elle se heurte à des nécessités de service. Dans ce cas, l’employeur doit impérativement produire une motivation écrite. 

Compensations financières

Enfin, sur la question financière, le ministère rappelle que les centres de gestion sont « chargés du calcul du crédit de temps syndical et du remboursement des charges salariales (rémunération et cotisations sociales) afférentes à l'utilisation de ce crédit », mais uniquement pour l’utilisation de ces crédits prévus « au 1° et 2° de l’article L214-4 du Code général de la fonction publique ». À savoir : autorisations d’absence pour assister aux congrès ou aux réunions statutaires des instances dirigeantes de OS ; et DAS pour exercer, pendant les heures de service, « une activité syndicale au profit de l’organisation syndicale à laquelle (l’agent) appartient ». 

En revanche, les autorisations d’absence accordées pour un certain nombre d’autres réunions, listées à l’article 18 du décret du 3 avril 1985 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique, ne donnent lieu à « aucun remboursement par les centres de gestion ». Ces réunions sont très nombreuses : en font partie les réunions « des comités techniques, des commissions administratives paritaires, des commissions consultatives paritaires, des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, des commissions de réforme » … 

Le gouvernement n’envisage pas d’étendre les droits de remboursement par les centres de gestion, puisque cela « ferait peser une charge supplémentaire sur les collectivités ». En effet, la prise en charge du remboursement des heures syndicales par les centres de gestion est financée par une cotisation obligatoire, versée par les collectivités elles-mêmes. 

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