Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du lundi 29 novembre 2021
Crise sanitaire

Nouveau protocole dans les écoles : quelques réponses mais encore beaucoup de questions

C'est à partir d'aujourd'hui que va se mettre en place, progressivement, la nouvelle procédure qu'il faut adopter face aux cas positifs dans les écoles élémentaires : plus de fermeture de classes mais un dépistage de tous les élèves. Explications. 

Par Franck Lemarc

Depuis la rentrée, le gouvernement a tenu bon sur sa doctrine, malgré les recommandations inverses du Conseil scientifique : chaque cas positif repéré dans une école élémentaire donnait lieu à la fermeture de la classe. Mais la cinquième vague a rebattu les cartes, et l’explosion du nombre de fermetures de classes (dans certaines écoles de la région parisienne, 14 classes sur 15 étaient fermées vendredi) a conduit le gouvernement à changer son fusil d’épaule. Désormais, la détection d’un cas positif donnera lieu non à la fermeture de la classe mais au dépistage de tous les élèves, et seuls ceux qui sont testés positifs ou auront refusé de faire le test seront renvoyés à la maison, pour 10 jours. 

Interrogations 

Les détails de ce nouveau protocole sont expliqués dans la FAQ (foire aux questions) du ministère de l’Éducation nationale mise à jour vendredi 26 novembre. 

Comme l’a indiqué le ministre Jean-Michel Blanquer, cette évolution sera « progressive »  et commencera seulement à entrer en vigueur aujourd’hui. La FAQ donne un délai : elle devra être entrée en vigueur dans toutes les écoles « au plus tard le lundi 6 décembre ». Le ministre avait indiqué jeudi dernier que les académies tiendraient au courant au fil de l’eau les communes et les directeurs d’école de l’entrée en vigueur de la mesure dans leur secteur. On peut donc supposer qu’en l’absence de communication de leur académie, les directeurs d’école doivent, pour l’instant, en rester à la fermeture de classes là où un cas positif a été détecté.

Une fois que l’académie leur aura donné le feu vert, le protocole à suivre est le suivant : lorsqu’un cas positif est repéré dans une classe, les directeurs d’école devront « prévenir les responsables légaux (…) que leur enfant pourrait poursuivre l’apprentissage en présentiel sous réserve de présenter un résultat de test négatif ». Les tests à réaliser sont aussi bien des tests PCR que des tests antigéniques, mais en aucun cas des autotests, qui « ne sont pas reconnus pour ce type de situation ». « Ces tests peuvent être réalisés auprès des professionnels de ville autorisés, les laboratoires de biologie médicale et les officines pharmaceutiques notamment ».

En cas de test positif, l’élève devra être isolé pendant dix jours. En cas de refus de faire un test, l’élève sera refusé en présentiel pendant sept jours et son apprentissage devra se faire « à distance ». 

Si le test est négatif, l’élève sera accueilli à l’école et pourra l'être dans les accueils périscolaires. 

En revanche, le dépistage immédiat pour la poursuite des cours en présentiel ne s’applique pas aux personnels. 

Pas de changement de niveau du protocole

Malgré la flambée de l’épidémie, le ministère a choisi de ne pas passer, pour l’instant, au niveau 3 du protocole, et l’on ne sait toujours pas quand il le fera, dans la mesure où aucun indicateur objectif et chiffré n’a été donné pour le passage d’un niveau à l’autre. Le protocole national reste donc au niveau 2, qui impose, notamment, le port du masque en intérieur pour tous les élèves de l’école élémentaire. 

D’où un certain étonnement à la lecture de la FAQ du ministère, qui indique que « les élèves de la classe dont l’accueil en présentiel est maintenu devront porter un masque en intérieur, pendant les 7 jours après la survenue du cas, à l’école et pour les activités périscolaires ». Pourquoi cette mention, dans la mesure où le port du masque est déjà obligatoire en intérieur pour tous les élèves ? 

La FAQ indique par ailleurs que « des mesures complémentaires »  peuvent être décidées, comme « le port du masque à l’extérieur ou la limitation du brassage au sein de l’établissement scolaire ». Ces mesures sont en principe prises par le préfet du département. La FAQ précise en effet, pour le niveau 2 du protocole, que le masque est obligatoire dans les espaces extérieurs lorsqu’une décision préfectorale impose le port du masque dans l’espace public. En revanche, il le devient de facto pour le niveau 3

Inquiétude des directeurs d’école

Si cette évolution était souhaitée tant par les scientifiques que par plusieurs associations d’élus (AMF et France urbaine en particulier), elles ne vont pas sans poser un certain nombre de problèmes organisationnels qui semblent fortement inquiéter les directeurs et les enseignants. Le Syndicat des directrices et directeurs d’école, par exemple, a fait parvenir dès vendredi un courrier au ministre Blanquer pour poser la question de ces difficultés opérationnelles : « Le retour des élèves avec un test négatif à J+7 rassurait l’ensemble de la communauté éducative et, désormais, le seul test à J0 ne permettra nullement de travailler en toute confiance sanitaire. De nombreux collègues expriment leur crainte d’enseigner face à des élèves potentiellement positifs et de ramener le virus chez eux », s’inquiète le syndicat. Le fait de devoir enseigner à distance aux élèves dont les parents auraient refusé le test étonne aussi : « Nous ne pouvons assumer nos heures de classe et la gestion à distance. Le choix des familles de ne pas faire tester leurs enfants ne doit pas signifier double tâche aux enseignants. »  Enfin, les directeurs d’école se demandent comment ils pourront « gérer l’urgence de prévenir les familles et la nécessité de faire le jour-même la déclaration de cas positif à la cellule sanitaire en gérant notre classe en même temps en semaine ». Et d’ajouter : « Est-on d’astreinte le week-end pour gérer les déclarations et les annonces aux familles si un cas nous est signalé ? Est-ce notre métier de vérifier au portail à 8 h 30 ou 13 h 30 les attestations des tests négatifs de nos élèves qui risquent de revenir au compte-goutte ? ».

Explosion des cas chez les 6-10 ans

La question de l’évolution du protocole risque de se poser encore plus, dans les jours à venir, dans la mesure où les experts se montrent inquiets de la diffusion du virus chez les enfants de 6 à 10 ans. Cette classe d’âge connaît en effet des taux d’incidence effarants dans certains départements, et, qui plus est, en hausse exponentielle. Dans 30 départements, le taux d’incidence des 6-10 est supérieur à 600. Dans deux (l’Ardèche et les Hautes-Pyrénées), il dépasse déjà les 1000. Dans les Hautes-Alpes, ce chiffre a augmenté de 657 % en une semaine ! Dans le Lot, de 488 %, dans le Jura, de 351 %, en Haute-Savoie, de 344 %... 

Cette situation n’est pas tant inquiétante pour les enfants eux-mêmes, qui ne développent que très rarement des cas graves, que pour l’entourage et les parents. On connaît à présent suffisamment les cycles d’évolution du virus pour savoir que cette explosion des cas chez les enfants sera mécaniquement suivie, dans les jours qui viennent, d’une explosion similaire chez les adultes. 

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